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Contes d’Afrique: La cuillère sale

Binta l’orpheline

Binta, l’orpheline, vivait dans la maison paternelle où la deuxième femme de son père  ne lui épargnait ni les grands travaux, ni les vexations, ni les cris, ni les coups. Tandis que sa demi-sœur Pinda passait le plus gros de son temps à sa toilette et à ses jouets, Binta allait chercher le bois mort, puisait l’eau, pilait le mil, lavait le linge et faisait la cuisine.

Les rares moments où elle pouvait s’échapper de la maison, elle les passait au cimetière, pleurant sur la tombe de sa mère. Celle-ci n’avait jamais pu répondre, on ne sait pourquoi, aux appels de sa fille.

Binta s’en retournait plus que malheureuse dans ses loques, pour subir à nouveau les cris, recevoir les coups de sa marâtre, souvent sous les yeux de son père. Celui-ci était le plus méprisable des hommes, c’est- à-dire un mari faible de caractère. Il n’osait pas défendre l’orpheline, car l’épouse qui lui restait le menaçait chaque fois qu’il tentait d’élever la voix.

Lasse, vraiment lasse à la fin de cette journée-là, Binta avait oublié, parmi les nombreux ustensiles et calebasses qu’elle avait à  récupérer après chaque repas, de laver une toute petite «Kok». Lorsque la femme de son père s’en aperçut, elle entra dans une colère terrible. Criant, hurlant, elle se mit à battre une fois de plus la petite fille.

Fatiguée de la rouer de coups, elle lui dit :

– Tu iras laver cette cuillère à la Mer de Danyane.

– Où se trouve ?… tenta de s’informer l’orpheline.

– A la Mer de Danyane, vociféra la méchante femme.Va-t-en, ordonna-t-elle en poussant la pauvre fille hors de la maison.

Et Binta l’orpheline s’en fut dans la nuit. Elle marcha jusqu’à ce que le ciel fût plein d’étoiles. Elle marcha jusqu’à ce que la terre fût froide.

Elle marcha jusqu’au premier chant du coq et après le deuxième chant du coq. Dans les villages des hommes, les bruits renaissaient, battements des pilons et cris des enfants.

Dans le domaine des bêtes et des souffles, où elle n’avait fait aucune mauvaise rencontre ceux de la nuit avaient disparu et les bruits du jouir remplissaient la savane et la forêt. Le soleil était sorti de sa demeure. Il était déjà à la moitié de son chemin de chaque jour et Binta l’orpheline marchait toujours. La nuit était venue et s’en était retournée et Binta l’orpheline allait toujours.

Trois fois le soleil avait brillé et brulé la terre des hommes et emporté ses charges de bonnes actions et de vilenies quand Binta l’orpheline s’arrêta au pied d’un arbre, d’un jujubier qui était en train de gauler lui-même ses fruits. La petite fille s’agenouilla et salua poliment le jujubier.

– Où vas-tu donc si seule et si tard, mon enfant ? S’enquit le jujubier

– Ma marâtre m’a envoyée laver cette «Kok» à la Mer de Danyane, expliqua la petite fille.

 

– Que le chemin de Dieu guide tes pas, souhaite l’arbre. Et il prit une grosse poignée de jujubes qu’il offrit à l’orpheline.
(A suivre)

Source: L’Inter de Bamako

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