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GEOPOLITIQUE: La montée en puissance du religieux et ses liens avec le politique

Le religieux, au cœur de la géopolitique, joue un rôle croissant en Afrique. Encore faut-il prendre en compte la complexité de son rapport au politique, avoir une perspective historique et éviter le manichéisme de type Huntington. Le religieux ne peut ni être réduit à des croyances privées, ni assimilé à une dynamique politique. Il n’est pas une implantation externe mais une appropriation et une récréation permanente. Il est au cœur des représentations et du sens. La religion qui relie et le sacré (sacrifice, sacrilège) sont la pierre angulaire de toute institution sociale, politique, économique.

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Les Eglises sont à la fois des forces d’opposition et de résistance et des forces de soutien aux pouvoirs politiques  cherchant à les instrumentaliser. Les Eglises chrétiennes contribuent aux compromis socio-politiques. Les églises et les réseaux religieux sont des relais des Etats défaillants comme lieux de socialisation, d’entraide d’éducation, de soins et de redistribution. Ils contribuent au soulagement des misères.

Les religions sont des fenêtres ouvertes sur le monde : par elles arrivent les flux monétaires et d’information et se constituent des réseaux transnationaux.

Inversement, les «entrepreneurs politiques», utilisent le registre religieux en créant des cultes ou en  récupérant une église comme instrument de pouvoir. Les Missions catholiques d’Afrique (pères blancs) sont créées en 1863. On peut considérer que les missionnaires ont été des agents de la colonisation en précédant ou en accompagnant les marchands et les militaires (les trois M). L’esprit missionnaire a souvent méprisé les valeurs anciennes et fait preuve de prosélytisme.

L’assimilationnisme a été plus prononcé chez les catholiques que chez les protestants. En réalité, les relations ont été souvent tendues ou conflictuelles avec les colonisateurs-notamment la période de séparation de l’Eglise et de l’Etat en 1905. Les administrateurs coloniaux se sont souvent appuyé sus l’islam dans leur administration, notamment par le biais de l’indirect rule et celui-ci s’est fortement développé à l’époque coloniale.

Les missions ont souvent assuré, en dehors de leurs taches spirituelles, des actions sociales et éducatives. Les Eglises ont joué un rôle essentiel dans la formation des élites nationalistes. On observe, depuis les indépendances, des mouvements d’africanisation dénommés inculturation (catholiques) ou contextualisation (protestants).

Le christianisme est aujourd’hui en pleine expansion dans la zone forestière (Afrique de l’Ouest, Afrique équatoriale) mais également en Afrique centrale, orientale et australe. Les Eglises indépendantes, éthiopiennes ou messianiques jouent un rôle important (comme le Kimbanguisme au RDCV). Elles sont une indigénisation ou endogénéisation des apports extérieurs.

Certaines religions se développent en liaison avec des enjeux stratégiques des puissances occidentales et du monde arabo-musulman. Le fondamentalisme religieux croit avec notamment les néo-pentecôtistes appuyés par les Etats-Unis et l’islamisme financé notamment par l’Arabie saoudite.

L’instrumentalisation du religieux est au cœur des conflits du Soudan, du Nigeria, voire de la Cote d’Ivoire opposant un Nord musulman et un Sud chrétien.

 

Philippe Hugon

Source: L’Inter de Bamako

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