Pour la première fois, l’organisation internationale a tenu son congrès en Afrique. Le choix du Mali n’est pas fortuit, car depuis 2012, notre pays connaît une crise ayant entraîné des crimes de masse, des crimes contre l’humanité
À peine rentré de Paris où il a pris part à la 2è édition du Forum de Paris sur la paix et à la 40è session de la Conférence générale de l’Unesco, le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, a présidé jeudi dernier au Centre international de conférences de Bamako, la cérémonie d’ouverture du 1er congrès du Barreau pénal international (BPI) en Afrique que notre pays a abrité du 14 au 16 novembre. C’était en présence du Premier ministre Boubou Cissé, des membres du gouvernement, des gardes de Sceaux des pays africains et des représentants des barreaux venus du monde.
Le thème retenu pour ce congrès est : «L’Afrique, nouveaux défis pour la justice pénale internationale et le Barreau pénal international». Dans ses mots de bienvenue, le maire de la Commune III Mme Djiré Mariam Diallo soulignera que l’organisation de ce 1er congrès dans notre pays traduit toute l’attention et la confiance de la justice internationale à l’égard du Mali.
À sa suite, le 1er vice-président du BPI, Me Abouba Ali Maïga, a indiqué que ce congrès marque de façon significative le fonctionnement futur de la justice pénale internationale. Il a rappelé que lors de son congrès de mars 2019 à Bruxelles, le nouveau comité exécutif du BPI a pris la décision d’organiser son prochain congrès en Afrique et le Mali fut choisi pour l’abriter.
D’après Me Maïga, le choix du Mali pour abriter ce 1er congrès n’est pas le fruit du hasard car il est depuis des années un endroit où se jouent toutes les problématiques de la justice pénale internationale mais reste encore debout. Le 1er vice-président du BPI a estimé que rares sont les pays qui résisteraient à une crise de l’ampleur de celle que le Mali connaît depuis 2012 avec des crimes de masse, des crimes de guerre, crimes contre l’humanité et en toute impunité. Toutes choses qui interpellent les acteurs de la justice pénale internationale. Pour l’efficacité attendue, Me Abouba Ali Maïga dira que le Barreau pénal international entend mettre en œuvre un programme ambitieux en direction des États signataires du traité de Rome, des puissances candidates au retrait du statut de Rome, des Nations unies et des sociétés civiles.
CONFLITS ARMÉS ET TERRORISME- Pour sa part, le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Mali, Me Alassane Sangaré dira que 17 ans après sa création, le choix du Mali par le BPI pour abriter ce congrès est la résultante d’un certain nombre de faisceaux concordants. Il s’agit, selon lui, de la reconnaissance envers le peuple malien à travers son Barreau qui a été de tous les combats chaque fois qu’il s’est agi de la défense des droits de l’Homme.
Pour Me Sangaré, le thème de ce congrès se justifie car plusieurs pays africains dont le nôtre font face à des conflits armés et au terrorisme. Et cette situation fait d’eux des terreaux favorables à la commission des plus graves crimes contre les populations, infractions pour lesquelles, la plupart des auteurs restent impunis. De son côté, le président du BPI, Pr Dragos Chilea, a remercié le chef de l’État pour son implication personnelle pour la tenue de cette activité.
Il a paraphrasé la devise du Mali en disant que pour la tenue de ce congrès, il y a tout un peuple autour d’eux. Aussi, il y a un but qui est la lutte contre l’impunité, l’éradication par la loi pénale internationale de tous les crimes abominables sur la base d’une foi en la justice internationale.
Pr Dragos Chilea a annoncé la nomination du président Keïta comme président d’honneur du Barreau pénal international pour l’Afrique avant de lui donner sa carte de membre. Mais aussi, la signature d’une convention de Bamako avec tous les bâtonniers présents à ce congrès et d’une déclaration de Bamako pour la justice pénale internationale. En plus, Pr Dragos Chilea dira qu’un bureau Afrique du Barreau pénal international va être ouvert au Mali pour permettre aux victimes de crimes de déposer leurs plaintes pour qu’elles soient plus facilement remontées vers la Cour pénale internationale (CPI).
La Procureure de la CPI, Fatou Bensouda a salué la grande hospitalité malienne, soulignant que la tenue de cette activité à Bamako est le signe de l’attachement du Mali à la justice pénale internationale, à la lutte contre l’impunité et les crimes graves qui portent atteinte à l’ordre public international. Elle a rappelé que le Mali a été parmi les premiers signataires du Statut de Rome.
Intervenant au nom du président de la CPI, la juge Reine Alapini-Gansou abondera dans le même sens. Selon elle, la CPI n’aurait pu naître dans un monde idyllique où la liberté des uns s’arrêtait là où celle des autres commençait.
Aussi, elle n’aurait jamais vu le jour dans un monde où la liberté d’aller et revenir, de prendre part à la vie politique publique, les droits des populations à des élections libres et transparentes, de vivre sont de mise.
PAYS D’AMITIÉ ET D’HONNEUR- La représentante du chef de la Minusma, M’baranga Gasarabwe, a souligné que le monde a fait d’énormes progrès dans la mise en œuvre d’un système de justice pénale internationale avec la CPI comme pièce maîtresse. Cependant, elle dira que les avancées ont été accompagnées de revers importants et de critiques. D’après elle, la force de la Cour et du système pénal international dépend du soutien qu’elle reçoit des praticiens de la justice pénale internationale.
Dans son intervention, le chef de l’État a exprimé toute l’estime qu’il a pour la profession des hommes et femmes qui portent la robe noire, rappelant que le Mali est un pays d’amitié et d’honneur. Ibrahim Boubacar Keïta a déclaré que la tenue de ce congrès était un grand honneur pour le Mali. Voir des gens venir au Mali par les temps qui courent est un acte de foi, a dit le président Keïta, ajoutant : «cela, nous le devons à tout ce que nous sommes, nous avons été et que nous devons tâcher de rester encore… C’est pourquoi, je dis toujours que nous n’avons aucun intérêt à nous diviser, à nous entredéchirer». En outre, le président de la République a indiqué que «notre pays n’est beau, n’est fort, n’est grand qu’autant qu’il soit soudé à l’intérieur, qu’autant qu’il soit uni, qu’autant que ses fils se donnent la main, que chacun de nous privilégie le Mali et sa grandeur car seule la grandeur sied au Mali».
C’est cela, a-t-il poursuivi, son destin ancré dans ses réalités mais ouvert au monde. «Ce monde le reconnaît. Il a beau essayer de se cacher, on vient le chercher et le mettre au soleil pour l’exposer, l’honorer et lui rendre hommage», a souligné le chef de l’État qui a promis de savoir porter cet honneur qui lui a été fait par le Barreau pénal international.
D. D.
Source: L’Essor- Mali