A Fès, au Maroc se déroule depuis lundi un colloque international sur Dialogue des civilisations. Il est organisé conjointement par l’OIF, l’UNESCO et l’ISECO en partenariat avec le Royaume du Maroc. Plusieurs tables rondes ont eu lieu à cette conférence. L’une, consacrée à » Religions et Médias, » est intitulée : La question religieuse est-elle une actualité comme une autre ? Comment la traiter ? Elle a été animée par El Hadj Mahamane Hamèye CISSE, directeur du Scorpion.
Voici un extrait.
La religion et les médias, c’est comme médias et société.
Car la religion a toujours traversé la société et les medias. Le traitement que ces derniers réservent à la religion peut conforter ou négativer son humanisme, sa tolérance j’allais dire sa forte civilité vue sous l’angle du culte du savoir vivre ensemble.
Au Mali par exemple, les médias couvrent l’actualité religieuse et se consacrent même au traitement des préceptes et autres doctrines religieuses.
Ainsi, vous avez des radios et des journaux qui consacrent des chroniques, des débats, des dossiers et autres magazines et enquêtes sur les religions chrétienne et musulmane essentiellement.
Il faut toutefois reconnaitre que le Mali tout en étant une république laïque reste très respectueux des religions et coutumes, surtout les deux religions prises en compte par les institutions.
Ainsi, les fêtes chrétiennes et musulmanes sont reconnues et consacrées par la république.
De même que les medias de service public les traitent de manière équitable et leur réserve des émissions spéciales.
Dans les années 80 jusqu’à la révolution de mars 1991 qui instaura la démocratie au Mali, le pays intellectuel et institutionnel est généralement toute ouie au discours (prononcé à l’occasion de la Saint Sylvestre et pendant les cérémonies de présentations des vœux au chef de l’Etat) de l’Archevêque de Bamako, Mgr Luc Sangaré tant il peint et présente objectivement la situation sociopolitique et économique assortie de recommandations sages et partagées.
Les années 2000 ont vu les musulmans s’intéresser de plus en plus à la politique. Le point culminant a été le soutien clair d’un leader religieux et sa confrérie et d’une association de jeunes musulmans (Sabati) au candidat du RPM à l’élection présidentielle 2013. C’est ce candidat qui a du reste gagné la présidentielle.
Aussi, vous avez des associations de journalistes chrétiens et des journalistes spécialisés en questions religieuses notamment musulmanes dans plusieurs médias maliens : de l’audiovisuel à la presse en ligne en passant par la presse écrite.
S’agissant de la couverture et du traitement des questions religieuses l’on peut déjà retenir le temps d’antennes qui leur sont consacrés par les services de stations radios télévisions publiques en plus des couvertures factuelles. Il en est ainsi dans plusieurs radios privées en plus des radios confessionnelles qui consacrent l’essentiel de leur émission à la religion.
Pour la religion musulmane au Mali et la montée des islamistes qui y a vite pris corps l’on peut se demander si le traitement ou la manière de couvrir la religion n’y est pour quelque chose. Tout en répondant par non, il n’est tout de même superfétatoire de rappeler que la précarité a été un terreau favorable que AQMI et autres narco-djihadistes ont exploité. Tout comme la collusion des pouvoirs publics de l’époque avec ces milieux ont aussi fait le lit à ce qu’on a vécu au Mali. Les négociations directes ou indirectes avec la nébuleuse AQMI pour la libération des otages et l’avion cargo de drogue calciné dans le nord Mali sont passés par là.
Il est toutefois bon de rappeler qu’au Mali la religion musulmane a été généralement perçue sous l’angle de l’humanisme, de la tolérance et de la solidarité. Musulmane jusqu’à 90% (selon certaines sources), la population malienne à l’instar des principaux Imams et autres prêcheurs de même que les principales associations islamiques dont le Haut Conseil Islamique (HCIM), la plus importante ont toujours prêché et montré l’islam comme creuset d’humanisme et de solidarité, fondé sur la tolérance et la compréhension mutuelle.
Les radios qui ont la plus grande audience ont toujours traité l’information sous cet angle.
Ainsi, on peut (juste pour la gouverne des confrères) préciser que les djihadistes islamistes qui ont sévi dans le nord du Mali en 2012 ont pris pour principales cibles les médias notamment les radios qu’ils ont saccagés et détruits lorsqu’ils ne les ont pas transformés en outils de propagande. Ce qui corrobore que les médias maliens en tout cas n’étaient pas leurs alliés- loin s’en faut. Somme toute ce fut là un épisode triste sur lequel nous reviendrons les débats édifieront davantage.
El Hadj Mahamane
Hamèye CISSE