L’intégration économique est une perspective capable de changer réellement la donne. Les pays africains doivent se saisir de cette opportunité et l’exploiter pleinement afin de parvenir à un développement durable et inclusif susceptible de réduire la pauvreté multidimensionnelle, en particulier chez les femmes et les jeunes. Telle est la principale conclusion de la Conférence économique africaine 2018 (AEC 2018), qui a clôturé ses travaux hier à Kigali, au Rwanda.
Conjointement organisée par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA) et la Banque africaine de développement (BAD), la Conférence avait cette année pour thème : « L’intégration régionale et continentale au service du développement de l’Afrique ».
L’édition 2018 de la Conférence a réuni près de 400 participants, dont des chercheurs, des responsables gouvernementaux, des décideurs, des jeunes et des représentants de la société civile et du secteur privé africains. Il s’agit de la première réunion de ce type depuis l’adoption de l’accord portant création de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLEA) en mars 2018, qui prévoit l’instauration d’un marché continental unique pour les marchandises et les services facilité par la circulation des hommes d’affaires et des investissements.
Au cours des nombreux débats thématiques et des présentations qui ont jalonné la Conférence, les participants ont souligné la nécessité de s’attaquer aux obstacles qui entravent la réalisation d’une plus forte intégration régionale et continentale. Ils ont notamment mis en cause la faiblesse des institutions, l’insuffisance des capacités de production et le manque de connectibilité des infrastructures ; l’inadéquation entre la consommation locale et les modes de production ; la profusion d’accords multilatéraux au détriment des accords locaux ; l’engagement insuffisant du secteur privé africain ; la fuite illicite de capitaux et les règlements inutiles en matière de politiques.
Il a également été noté qu’un plus grand degré d’intégration pourrait aider les pays africains à faire entendre leur voix sur la scène mondiale et que le cadre proposé par la Zone de libre-échange continentale africaine pourrait grandement contribuer à corriger le déséquilibre des pouvoirs lors des négociations entre les différents blocs commerciaux régionaux.
S’adressant à l’assistance lors de la dernière session plénière de la Conférence, Ayodele Odusola, Économiste en chef au Bureau régional du PNUD pour l’Afrique, a fait observer que « l’intégration devrait être un moyen et non une fin en soi » en insistant sur le fait que nous devrions « veiller à ce qu’elle soit axée sur l’être humain et que personne n’en soit exclu ».
Moono Mupotola, Directrice du Département de l’Intégration régionale et du commerce à la Banque africaine de développement, a quant à elle déclaré : « dès lors qu’il existe une volonté politique, les décideurs et les responsables de la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine devraient s’efforcer d’instaurer le climat idéal pour commencer à appliquer ce que nos dirigeants politiques ont convenu ».
De son côté, Adam Elhiraika, Directeur de la Division des Politiques Macroéconomiques à la CEA, a appelé les pays africains à respecter leurs engagements tels que souscrits lors de la signature et de la ratification de l’accord prévoyant la création de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf).
« Nous connaissons tous les avantages qui découlent de la libre circulation des biens, des services et des personnes lorsque nous ouvrons nos frontières et que nous mettons en œuvre l’intégration. Le PIB de l’Afrique pourrait ainsi s’accroître de quelque 6 % par année », a-t-il expliqué. « Nous devons nous assurer que la vision de nos dirigeants et leur engagement en faveur de la constitution de la Zone de libre-échange continentale africaine soient concrétisés et appliqués. Un marché continental unique pour les biens et services est synonyme de richesse et de prospérité pour tous les Africains ».
À ce jour, 44 pays africains ont signé l’accord historique jetant les bases d’une Zone de libre-échange continentale africaine. Douze sur un minimum requis de 22 pays l’ont ratifié. La date limite de ratification a été fixée à la fin mars 2019.
Les points forts de la Conférence ont été notamment les lancements respectifs du Rapport sur le développement durable en Afrique 2018 et du Rapport sur la gouvernance en Afrique 2018 ainsi que la présentation de l’édition 2018 de l’Indice d’ouverture sur les visas en Afrique qui mesure le degré d’ouverture des pays africains en matière de politique des visas.
Dans le respect d’une tradition désormais annuelle, des prix ont été décernés le dernier jour de la Conférence aux deux meilleurs travaux de recherche présentés cette année et sélectionnés par les participants selon des critères d’innovation, de rigueur universitaire et d’impact en termes de politiques.
Le prix du meilleur document de recherche a été attribué à Blaise Gnimassoun, de l’Université de Lorraine, en France, pour son exposé intitulé « Regional Integration : Do intra-African trade and Migration improve income in Africa ? » (Intégration régionale : le commerce intra-africain et les migrations améliorent-ils les revenus en Afrique ?) Quant au deuxième meilleur article, il a pour titre « The Economic Diplomacy in Africa: The Impact of Regional Integration versus Bilateral Diplomacy on Bilateral Trade » (La diplomatie économique en Afrique : comparaison entre l’impact de l’intégration régionale et celui de la diplomatie bilatérale sur le commerce bilatéral) et a été rédigé par Sylvanus Kwaku Afesorgbor, Professeur assistant à l’Université de Guelph en Ontario au Canada et fondateur du Centre for Trade Policy Analysis and Development à Accra au Ghana.
La 14ème Conférence économique africaine devrait avoir lieu en décembre 2019.
SOURCE/ BAD