Les Maliens sont appelés à voter entre Oui et Non lors du référendum constitutionnel du 18 juin dans un contexte d’inquiétude majeure lié à l’insécurité complexe dans le pays, a indiqué Boubacar BOCOUM, analyste politique, lors d’un entretien ce lundi 8 mai. Face à cette situation, il a estimé que le gouvernement, par anticipation, doit prendre des dispositions pour circonscrire les zones où les élections doivent se tenir de concert avec les forces vives.
Le gouvernement en convoquant le collège électoral arrête la date du référendum. Or celle-ci devrait être faite par l’Autorité indépendante pour la gestion des élections (AIGE). Alors y a-t-il eu vice de forme ?
Boubacar BOCOUM : Je ne pense pas. Peut-être qu’il y a un problème de méthodologie. Dès lors que l’AIGE et l’Administration territoriale travaillent en bonne intelligence. Les deux travaillent concomitamment. C’est ça la réalité. Parce que l’AIGE ne peut pas travailler sans le découpage électoral ; sans les dispositions prises par le gouvernement. L’AIGE ne pourrait aucunement travailler sans la logistique mise en œuvre et mis à sa disposition par le gouvernement. Elle n’est pas une structure totalement autonome. Donc, elle est obligée de travailler avec le gouvernement. Forcément, il y a certains aspects de la gouvernance qui sont toujours gérés par l’Administration territoriale, ça c’est un fait.
Le fait que l’Administration territoriale annonce le calendrier, c’est logique, car c’est son rôle en tant que membre du gouvernement et aussi c’est son rôle de rassurer la communauté internationale, tous les partenaires techniques et financiers par rapport à la disposition qu’ils ont prise pour le processus.
L’AIGE ne peut pas imposer au gouvernement une date, ça il faut le comprendre. Donc, que le gouvernement décide de fixer la date, par rapport à sa capacité organisationnelle, par rapport à sa disponibilité est une chose. Maintenant que l’AIGE passe à une seconde communication est une autre chose.
Il faut bien que le gouvernement prenne les dispositions parce que c’est lui qui assure les finances, donne la logistique en termes de découpage, de disponibilité du matériel sur le terrain et assure la sécurité. Donc je pense que l’État se dit prêt pour aller à l’élection à cette date.
Selon vous, ce délai est-il tenable ?
Boubacar BOCOUM : Le respect du calendrier est forcément dû à la disponibilité de la logistique. Aujourd’hui, on peut tenir ce calendrier. Il s’agit juste de se mettre d’accord sur les points où on va faire le vote, faire acheminer les matériels électoraux, ensuite mettre à la disposition de l’AIGE, les moyens nécessaires pour aller à l’organisation des élections. Je pense que tout ça dépendra exactement des moyens dont dispose l’État. Je pense que ce que l’État annonce aujourd’hui, c’est dire qu’ils sont disponibles. Dès lors que l’État le dit, le reste ce n’est qu’un problème de mise en œuvre.
Je ne suis pas totalement inquiet par rapport au calendrier donner ; mais il n’en demeure pas moins qu’il peut avoir des contraintes à l’intérieur qui pourraient amener effectivement le gouvernement à revisiter le chronogramme en le prolongeant, si effectivement il y’a des difficultés fonctionnelles.
Je n’ai aucune idée sur le coût de ces élections, mais c’est le gouvernement qui décidera de ce qu’ils vont en mettre. Est-ce qu’ils ont pu mobiliser les fonds ? Est-ce que la planification est tenable ou pas ? C’est à travers cette attitude que le gouvernement pourra décider du report des élections, mais celui-ci ne sera pas sur une longue date.
Vous avez aussi indiqué que des difficultés fonctionnelles pouvaient contraindre le gouvernement à revoir le chronogramme. Vous faites allusion à quels genres de problèmes au-delà des finances ?
Boubacar BOCOUM : Je pense que les défis apparents sont, d’une part, la disponibilité de la carte d’identité biométrique et, d’autre part, le défi sécuritaire. Comment organiser aujourd’hui les élections sur l’ensemble du territoire national sachant que le pays traverse une insécurité complexe ? C’est une inquiétude majeure, il va falloir que l’État prenne des dispositions pour circonscrire les zones où on doit faire les élections.
L’autre chose c’est de se mettre d’accord sur les zones où les élections sont possibles. Parce que ce qui est certain, il y aura des localités où ça ne sera pas possible. Par anticipation, il est bon que le gouvernement et l’AIGE ainsi que les partis politiques se mettent d’accord sur la cartographie sécuritaire et qu’ils essayent de voir dans quelle mesure ces élections sont possibles et où elles peuvent l’être.
Dans notre contexte de forte divergence entre des forces vives de la nation, selon vous ce débat est-il possible pour se mettre d’accord sur cette cartographie sécuritaire ?
Boubacar BOCOUM : On n’aura jamais l’unanimité, mais juste il faut voir les tendances les plus objectives et celles qui sont inscrites dans la dynamique du changement. En prenant la classe politique, il y a ceux qui ont été renversés. Ceux-ci ne vont jamais accompagner la dynamique, même si objectivement ils pensent que c’est une bonne chose.
Ils y aussi ceux qui veulent être pris en charge et venir aux affaires qui n’ont pas la possibilité d’y être. Je pense notamment à des religieux et autres qui ont leur tendance avec la volonté de gouverner le pays. Mais, aujourd’hui ils n’ont pas la latitude de le faire.
Donc cette division, elle fait partie de la dynamique normale, mais juste que l’on n’aura jamais l’unanimité. Seulement, il appartient aux autorités d’apprécier à sa juste valeur quelle est l’objectivité de la démarche et quelle est l’option qu’il faut avoir. Aujourd’hui, le plus important c’est d’avoir une certaine forme d’inclusivité. On inclut tout le monde, que l’onconsulte tout le monde. Maintenant que tout le monde soit d’accord, cela n’est même pas possible.
REALISEE PAR SIKOU BAH
Source : Info Matin