L’enquête dévoile les liens de Coulibaly avec les frères Kouachi ainsi que les derniers instants avant les attentats de janvier.
L’enquête sur les attentats de Paris dévoile le parcours d’Amédy Coulibaly et son lien avec les Kouachi, ainsi que ses motivations. Six proches de Coulibaly ont été mis en examen, notamment pour avoir fourni armes, véhicules et matériel au tueur de l’Hyper Cacher.
Lorsque l’enquête commence sur les frères Kouachi juste après la tuerie de Charlie Hebdo le 7 janvier, un nom ressort dans leur entourage : celui deCoulibaly, un délinquant radicalisé que Chérif Kouachi a croisé en prison. Ils partagent un mentor, Djamel Beghal, figure de l’islamisme le plus radical. Des analyses ADN et les dépositions de témoins de l’assassinat d’une policière municipale à Montrouge le 8 janvier, notamment un homme à qui Coulibaly a tenté de voler la voiture, confortent l’information.
Dans une vidéo de revendication filmée dans l'”appartement conspiratif” loué à Gentilly comme, selon une source proche de l’enquête, dans ses déclarations aux otages de l’Hyper Cacher, Coulibaly explique agir en lien avec les frères. Au premier semestre 2014, les échanges sont nombreux entre les téléphones des compagnes de Chérif Kouachi et de Coulibaly.
L’entourage de Coulibaly était-il au courant de ses funestes projets ?
Dans la nuit du 1er au 2 janvier, Coulibaly conduit sa compagne Hayat Boumeddiene à la frontière avec l’Espagne d’où cette jeune femme s’envole vers la Syrie via la Turquie, en compagnie d’autres islamistes, comme les frères Belhoucine. Connaissaient-ils les projets terroristes de Coulibaly?
Celui-ci les a alors en tête: le 26 décembre, il a loué sur internet l’appartement de Gentilly, du 4 au 11 janvier. Le 5, sa mère, à qui Coulibaly rend visite chaque semaine à Grigny, ne note rien d’anormal. Il passe une partie de la journée et du lendemain avec un homme qui sera un des six mis en examen, lui prodigue des conseils religieux.
Le 6, après un échange téléphonique, Coulibaly semble rendre visite à Chérif Kouachi à Gennevilliers. Le 7 en milieu de matinée, une heure avant d’attaquer Charlie Hebdo, Kouachi envoie un SMS à Coulibaly.
Revendication et antisémitisme
Dans sa vidéo, il a fait allégeance à l’organisation Etat islamique (EI) mais à l’Hyper Cacher, Coulibaly évoque aussi Al Qaïda,selon une source proche de l’enquête. Se présentant en “soldat de Dieu” dans un discours “extrêmement confus”, il parle de la Syrie, du Mali, explique qu’avec leurs impôts, les civils cautionnent les actions du gouvernement contre les musulmans. Son antisémitisme est patent, d’après des propos rapportés par un otage aux enquêteurs: “Vous êtes de quelle origine? Juifs. Vous savez pourquoi je suis là alors!”
Par certains aspects, elle semble minutieuse. Il utilise 13 portables, crypte ses échanges sur le net, utilise une “boîte mail morte”: les deux interlocuteurs disposent de codes régulièrement modifiés, consultent des messages mis en brouillon avant de les détruire sans les envoyer.
Le choix des cibles semble moins préparé : la policière de Montrouge a peut-être été une victime fortuite. La proximité d’une école juive a été relevée. Pour l’Hyper Cacher le 9 janvier, aucun élément ne vient pour le moment étayer la thèse d’un repérage antérieur.
Les complicités
Six membres de l’entourage délinquant de Coulibaly, sont en prison, soupçonnés d’avoir fourni armes, véhicules ou matériel. Pour l’instant, aucun élément ne permet d’affirmer qu’ils étaient au courant des projets terroristes de Coulibaly. Certains reconnaissent avoir eu conscience que Coulibaly préparait quelque chose d’illégal, mais ont expliqué avoir pensé à un “Go Fast”, une séquestration ou un braquage. Mais pourquoi l’un a-t-il coupé tout contact téléphonique avec Coulibaly dès le 7, après l’attaque de Charlie Hebdo? Qu’a dit Coulibaly à un autre lors de leurs rencontres et nombreux échanges peu avant les attentats?
Et le dossier des complicités n’est pas clos. Qui est ce correspondant de la “boîte mail morte” avec qui Coulibaly a eu un ultime échange en fin d’après-midi le 8 janvier, entre l’assassinat de Montrouge et l’attaque de l’Hyper Cacher? A qui appartient l’ADN sur le drapeau de l’Etat islamique dans l’appartement de Gentilly, identique à celui relevé dans l’appartement d’un des frères Belhoucine? Qui est ce “mec gros”, aux “cheveux courts, mat de peau”, “un peu de barbe, environ 30 ans”, décrit par deux fournisseurs de Coulibaly?
Coulibaly entretenait des liens avec la pègre des environs de Charleroi en Belgique : les enquêteurs s’interrogent sur trois hommes qui pourraient avoir joué un rôle dans la fourniture d’armes.
Source : RTL.FR