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Attentat du 6 avril 1994 au Rwanda : le Parquet de Paris requiert un non-lieu

Le Parquet de Paris a requis un non-lieu pour les neuf Rwandais soupçonnés d’être impliqués dans l’attentat du 6 avril 1994. Parmi eux se trouvent sept proches du gouvernement rwandais. Leur avocat, Bernard Magain salue “une étape très importante dans la reconnaissance de l’innocence” de ses clients.

Le Parquet a requis un non-lieu dans l’affaire, instruite depuis 1998, portant sur l’attentat commis le 6 avril 1994 contre l’avion de l’ex-président rwandais Juvénal Habyarimana. Dans ces réquisitions, datées du 10 octobre et signées du substitut du procureur Nicolas Renucci, le ministère public estime que les éléments contenus dans le dossier d’instruction sont insuffisants pour que les neuf Rwandais poursuivis dans cette affaire soient renvoyés devant une cour d’assises.

L’information a été confirmée à Jeune Afrique par l’avocat belge Bernard Maingain, qui défend sept Rwandais proches du gouvernement de Kigali. « C’est une étape supplémentaire et très importante vers la reconnaissance de l’innocence de nos clients », a-t-il réagi.

Ce tournant dans le dossier pourrait constituer une étape supplémentaire dans la réconciliation en cours entre Paris et Kigali. Cette affaire judiciaire empoisonne en effet les relations diplomatique entre les deux États depuis plus de vingt ans.

Vingt ans de procédures

Le 6 avril 1994, l’avion du président hutu Juvenal Habyarimana était abattu par un missile alors qu’il s’apprêtait à atterrir à l’aéroport de Kigali. Cet événement, qui a aussi coûté la vie au président burundais de l’époque, Cyprien Ntaryamira, a marqué le début du génocide des Tutsi au Rwanda.

En 1997, la famille de l’un des membres de l’équipage (français) du Falcon 50 présidentiel avait déposé plainte à Paris. En mars 1998, une information judiciaire était ouverte, confiée au juge Jean-Louis Bruguière, du pôle anti-terroriste.

Fin 2006, se basant sur des témoignages formulés par d’anciens militaires se présentant comme parties prenantes à l’attentat, ce magistrat concluait à la responsabilité du Front patriotique rwandais (FPR) – l’ancienne rébellion majoritairement tutsi aujourd’hui au pouvoir à Kigali.

Avec l’aval du Parquet, il lançait alors des mandats d’arrêt contre neuf dignitaires de l’armée ou du régime rwandais. En réaction, Kigali avait alors rompu ses relations diplomatiques avec Paris.

Selon Kigali, l’enquête du magistrat aurait été exclusivement orientée à charge du FPR, ce dernier ne s’étant jamais intéressé à la thèse faisant des Hutu extrémistes les possibles auteurs de l’attentat.

De plus, dénonçait l’entourage de Paul Kagame, Jean-Louis Bruguière n’a jamais cherché à se rendre au Rwanda pour y mener des investigations.

Reprise de l’enquête par Marc Trevidic et Nathalie Poux

Apres leur reprise de l’enquête, en 2007, les juges Marc Trevidic et Nathalie Poux vont auditionner sept des neufs Rwandais mis en cause, permettant leur mise en examen, la levée des mandats d’arrêt les concernant et, bientôt, une timide reprise des relations entre la France et le Rwanda.

En 2011, ils se rendent au Rwanda, accompagnés d’un panel d’experts pluridisciplinaire, pour y conduire une expertise balistique sur les lieux de l’attentat.

SI LES RÉQUISITIONS DU PARQUET ÉTAIENT SUIVIES PAR LES JUGES D’INSTRUCTION, CELA ABOUTIRAIT À LA CLÔTURE DE CE DOSSIER SENSIBLE

Leur conclusion aboutit à remettre en cause la théorie de leur prédécesseur : les deux missiles ont  été tirés depuis l’enceinte – ou à proximité immédiate du camp militaire de Kanombe, alors contrôlé par les Forces armées rwandaises (FAR).

Une expertise qui contredit la piste suivie jusque-là, sur la base des témoignages des transfuges du FPR qui assuraient avoir tiré les missiles depuis le lieu-dit Masaka, à plusieurs kilomètres de là.

À travers ces réquisitions de non-lieu, le Parquet de Paris estime que les investigations menées depuis vingt ans ne permettent pas, en l’état, de renvoyer les Rwandais mis en examen devant une cour d’assises antiterroriste. Si elles étaient suivies par les juges d’instruction aujourd’hui en charge du dossier, cela aboutirait à la clôture de ce dossier sensible.

CE RÉQUISITOIRE TOMBE EN MÊME TEMPS QUE L’ÉLECTION D’UNE AUTRE DIGNITAIRE RWANDAISE À LA TÊTE DE LA FRANCOPHONIE

« C’est une étape supplémentaire vers la reconnaissance de ce que nous clamons depuis l’ordonnance du juge Bruguière en 2006 », se réjouit Me Bernard Maingain. « Ce réquisitoire va dans le sens du mémoire que nous nous apprêtons a déposer entre les mains des juges d’instruction : il déconstruit toutes les tentatives d’intoxication intervenues dans ce dossier. Cela fait 20 ans que nos clients souffrent de ces accusations. »

Une version contredite par Philippe Meilhac, l’avocat de la famille Habyarimana. « C’est un non-événement. Il ne s’agit que de l’avis du ministère public, qui a lâché les parties civiles depuis 10 ans pour des raisons politiques. J’en veux pour preuve le fait que ce réquisitoire tombe en même temps que l’élection d’une autre dignitaire rwandaise à la tête de la Francophonie [Louise Mushikiwabo, ndlr]. Nous ferons bientôt connaître nos positions, qui sont totalement opposées à celles du Parquet. »

Jeune Afrique

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