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Agriculture et orpaillage : À la rencontre des amazones de salamalé

Ces femmes excellent dans la culture de l’arachide et du riz pendant l’hivernage. Mais une fois la saison des pluies passée, elles se reconvertissent en orpailleuses

«Les amazones de Samalé». Ne vous méprenez point. Ce n’est pas le titre d’un long métrage africain mais bien une épithète qui sied comme un gant aux braves femmes de ce village, situé dans la Commune rurale de Kanioko (Cercle de Kangaba). Il faut environ une heure voire un peu moins sur un bitume carrossable pour rallier cette bourgade à 122 kilomètres de la capitale. Les 2.179 âmes qui y vivent, majoritairement des femmes (51%), pratiquent l’agriculture comme activité principale. Les femmes qui se battent quotidiennement dans ce village pour s’extraire de l’étau de la précarité excellent dans la culture de l’arachide et du riz pendant l’hivernage.

Mais une fois la saison des pluies passée, ces amazones, pour ne pas se tourner les pouces, s’essaient à l’orpaillage artisanal. Elles semblent de plus en plus tirer un meilleur profit de cette activité secondaire pour elles. Elles sillonnent les sites d’orpaillage de Salamalé et ses environs, notamment Kokognon et Dékédame à la recherche de ce métal précieux. Cette période d’activité d’orpaillage est appelée en malinké «traiti».

L’argent généré pendant cette activité permet de couvrir d’énormes dépenses, notamment l’achat d’engrais mais aussi d’autres produits de traitement des champs et à assurer la cotisation de la tontine. Ainsi, ces femmes qui sont déterminées à avoir une autonomie financière, ont mis en place des groupements dont «Sabougnouma djikisèbè» qui reste un modèle de réussite.

Cette tontine de 45 membres vise à consolider les liens sociaux dans le village mais aussi le développement socio-économique de ses adhérentes qui apportent chacune 1.000 Fcfa par semaine, pendant une année. à l’approche de l’hivernage qui coïncide généralement avec la fin de la tontine, la somme cotisée est équitablement partagée entre les adhérentes de l’association. Ce qui apporte à ces femmes une réelle bouffée d’oxygène, en termes de capacité de prise en charge de certaines dépenses de la famille.

Mme Traoré Nasia Traoré, «Doukou-mousokoutiki» ou patronne des femmes de Samalé reconnaît que la saison sèche est une période propice pour les différentes couches du village (hommes, femmes et jeunes) de s’essayer à l’orpaillage. Même si elle apprécie bien le fait que les profits de l’exploitation artisanale de l’or permettent d’améliorer les conditions de vie en général, elle explique clairement que son village n’est pas du tout prêt à échanger l’agriculture même contre tout l’or du monde parce que c’est dans les travaux champêtres que Samalé se reconnaît le mieux.

«Une fois que l’hivernage s’annonce, nous cessons l’orpaillage tout simplement parce que l’agriculture demeure notre activité principale», précise-t-elle. La responsable des femmes de Samalé a aussi relevé que les bénéfices tirés de l’orpaillage sont utilisés pour acquérir de l’engrais, préparer la future campagne agricole et couvrir des charges familiales. Elle explique aussi que ces gains permettent très souvent aux femmes de soutenir financièrement leurs époux qui n’assurent plus la popote. En tout cas, les femmes de ce village vivent cette situation depuis plus d’une dizaine d’années.

Mme Traoré apprécie l’autonomisation des femmes qui, selon elle, a permis de circonscrire de nombreuses disputes conjugales et par conséquent d’atténuer la violence conjugale dans leur localité. Elle affirme aussi que dans le village, le mariage précoce a tendance à disparaître. Et les femmes de la localité s’épanouissent bien présentement.

L’autonomisation des femmes se ressent dans plusieurs secteurs. Par exemple sur le plan de la santé, les accouchements se font à près de 99% dans le Centre de santé communautaire (Cscom) du village. Et dans le cadre des initiatives de lutte contre le paludisme qui reste une endémie majeure dans notre pays, il est prévu d’offrir des moustiquaires imprégnées d’insecticide aux femmes enceintes (une à la première consultation prénatale, une après l’accouchement et une autre quand l’enfant atteint 9 neufs mois).

La patronne des femmes de Samalé fulmine contre la limitation à deux moustiquaires et s’interroge sur les réelles motivations qui sous-tendent cette restriction. La matrone du centre, Mariama Traoré, n’apprécie guère aussi la situation. Elle explique que son centre enregistre 17 à 33 accouchements par mois et se réjouit des gros efforts accomplis dans le cadre de la lutte contre la mortalité maternelle et néonatale au niveau village.

Les traditions ont la vie dure. Certaines entravent l’épanouissement des femmes du village, voire leur autonomisation. Dans le village de Samalé, globalement la gent féminine ne s’intéresse pas à la politique et ne milite pas. Tout ce qu’elles entreprennent requiert l’autorisation des hommes, autrement dit de leurs époux. «Nous ne faisons rien sans leur approbation. Et nous ne sommes intéressées que par l’agriculture et l’orpaillage», indique une ménagère qui a requis l’anonymat.

Siné S. TRAORÉ

Source: Essor
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