Le parti au pouvoir en Afrique du Sud, le Congrès national africain (ANC), se réunit d’urgence lundi à Pretoria pour « finaliser », selon son chef Cyril Ramaphosa, la délicate question du départ anticipé du président de la République, le très controversé Jacob Zuma.
Les deux hommes ont engagé le 6 février des tractations directes pour régler cet épineux problème, mais les discussions s’éternisent.
Lundi, la plus haute instance de décision de l’ANC, le Conseil national exécutif (NEC), qui avait donné mandat à Cyril Ramaphosa pour négocier avec le chef de l’Etat, se réunira à huis clos, une nouvelle fois d’urgence.
« Parce que notre peuple veut que ce sujet soit finalisé, c’est précisément ce que le Conseil national exécutif (NEC) fera » lundi à Pretoria, a assuré dimanche Cyril Ramaphosa, sans donner de précisions.
« Nous savons que vous voulez passer à autre chose », a lancé dimanche le vice-président devant des milliers de partisans de l’ANC réunis au Cap (sud-ouest) à l’occasion du centenaire de la naissance de Nelson Mandela, le père de la nation « arc-en-ciel ».
Cyril Ramaphosa, qui succéderait à Jacob Zuma en cas de démission du président, se heurte cependant à deux obstacles de taille pour mettre un point final à cette crise: l’obstination du chef de l’Etat, qui s’accroche au pouvoir, fidèle à sa réputation de battant infatigable, et les divisions de l’ANC.
Le 4 février, Jacob Zuma a exclu de démissionner, malgré l’appel pressant de la direction de son parti.
Dans les négociations en cours, il tenterait d’obtenir l’immunité, alors que son nom figure au coeur de plusieurs affaires de corruption. Il chercherait aussi à obtenir la prise en charge de ses frais de justice, selon les médias nationaux.
Dimanche, Cyril Ramaphosa a toutefois exclu un passe-droit pour le président, rappelant avec fermeté que « ceux qui sont corrompus et ont volé l’argent des pauvres seront jugés ».
– ‘Désunion’ –
Le patron de l’ANC a cependant reconnu que son parti émergeait d’une période de « désunion et de discorde ». Des divisions qui justifient qu’il manoeuvre avec énormément de précaution s’il veut sortir vainqueur de cette crise.
Lors de sa réunion lundi, le NEC devrait être informé des conclusions des négociations, en tout cas de leur état d’avancement, a estimé Mcebisi Ndletyana, professeur de sciences politiques à l’université de Johannesburg.
Le NEC peut notamment décider de rappeler le chef de l’Etat, ce qu’il avait fait en 2008 avec le président Thabo Mbeki. Mais le président Zuma n’a aucune obligation constitutionnelle de se plier à cette injonction.
Parmi les autres options, le NEC pourrait aussi décider de saisir le Parlement en déposant une motion de défiance contre le président ou en engageant une procédure de destitution du chef de l’Etat.
L’autorité du président Zuma a commencé à vaciller depuis l’élection en décembre de Cyril Ramaphosa qui lui a succédé à la tête de l’ANC, le parti au pouvoir en Afrique du Sud depuis l’avènement de la démocratie en 1994.
Sous la direction de Cyril Ramaphosa, le parti de feu Nelson Mandela multiplie les réunions pour tenter de sceller l’avenir de Jacob Zuma. Il s’agit pour le pro-Ramaphosa d’éviter la déroute aux élections générales prévues en 2019.
Les événements se sont accélérés la semaine dernière à l’approche du très attendu discours annuel du président devant le parlement.
Ce temps fort de la politique sud-africaine a finalement été reporté, officiellement pour éviter des débordements dans l’hémicycle. Officieusement sans doute pour permettre aux négociations d’aboutir.
Aucune nouvelle date n’a été avancée, mais l’ANC a assuré que la présentation du budget prévue pour le 21 février serait maintenue, laissant penser que la question du président serait réglée d’ici là.
Dans les rangs de l’opposition, on s’impatiente. Elle a déposé une motion de défiance pour le 22 février, la neuvième depuis l’arrivée au pouvoir de Jacob Zuma en 2009.
Une journée villes mortes a été annoncée, mais il n’était pas clair dimanche si elle serait organisée.
En dépit de l’impasse politique actuelle en Afrique du Sud, le risque d’un éventuel coup d’Etat militaire semble totalement écarté, estiment les analystes, qui relèvent que l’armée sud-africaine n’est pas politisée.