Au commencement, il y eut l’agression contre la Libye de Maamar El Gueddhafi. Le pays durablement déstabilisé, l’aventure terroriste dans l’ensemble de la région sahélienne a pu commencer. Partie du Mali voisin, elle a tour à tour envahi le Niger, le Burkina Faso, le Tchad, le Cameroun et le Nigeria.
Mais elle n’allait pas s’arrêter là. Confortée dans sa dynamique explosive, la vague flirte avec des appétits surdimensionnés et des ambitions de croissance en Afrique de l’Ouest, depuis que les groupes terroristes ont mis le pied en Côte d’Ivoire, et plus largement dans le golfe de Guinée, frappant sporadiquement des pays comme le Bénin, le Togo et, dans une moindre mesure, le Ghana. Une fulgurante multiplication des attaques est observée, au cours des deux derniers mois, dans la région des Trois-frontières, où les soldats nigériens, maliens et burkinabè payent un prix ultime face à des bandes armées, promptes à disparaître avec la même aisance que celle dont elles disposent pour attaquer des camps militaires démunis des moyens nécessaires à une riposte adéquate.
Les Etats qui font face à ces exactions cherchent, malgré tout, à adapter leur réponse sécuritaire tout en rectifiant la démarche politique. Aux «erreurs» supposées des États sahéliens, longtemps dépendants des forces étrangères présentes pour «conduire» leur lutte contre les assauts terroristes, les pays limitrophes tentent de tirer la leçon. Au Bénin, pays le plus visé, avec une vingtaine d’attaques contre son armée en quelques mois à peine, on s’interroge sur la meilleure méthode à suivre, d’autant que le président français Emmanuel Macron a déclaré, fin juillet à Cotonou, la disposition de la France à intervenir dans «la lutte contre le terrorisme».
L’exemple du Mali où la force Barkhane a été contrainte de plier bagage a déteint sur les pays voisins, notamment le Burkina, le Niger et même le Tchad où les populations n’hésitent plus à dénoncer une présence néocoloniale. L’écho des manifestations de Bamako, Ougadougou et Niamey s’est propagé comme une traînée de poudre et, du coup, une hésitation semblable est apparue dans la réponse des États membres de la Cédéao dont la France garde, malgré tout, les clés et pose les conditions. De là à déduire qu’une certaine satisfaction accompagne la récente flambée d’attaques terroristes contre le Mali où la situation sécuritaire s’est quelque peu dégradée tandis que les soldats de Barkhane achèvent les ultimes préparatifs de leur retrait, il n’y a qu’un pas, vite franchi par ceux qui y voient un mécanisme de cause à effet. Paris n’a, en fait, aucune intention de quitter le Sahel et, encore moins, le golfe de Guinée. Au Bénin, Macron a proposé une relance de «l’Initiative d’Accra», de 2017, rassemblant, dans un élan antiterroriste commun, les pays côtiers et le Burkina sous sa houlette. À l’heure actuelle, la dégradation du contexte sécuritaire au Sahel impose aux pays côtiers, devenus la nouvelle ligne de front, un choix cornélien face à un enjeu qui met en péril leur stabilité, fortement ébranlée par les crises régionales et internationales.
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