À peine les interrogations sur les négociations, ayant conduit à la levée du blocus sur Farabougou (dans la région de Ségou), éteintes, les autorités maliennes se retrouvent au cœur d’une nouvelle polémique au sujet du thé Achoura. Cette affaire constitue un tournant décisif pour les autorités de la transition qui risquent de perdre davantage leur crédibilité aux yeux des Maliens.
« Traces de deux pesticides » dans un lot du thé Achoura
Dans sa lettre du 9 février 2021, le directeur général de l’Institut national de santé publique (INSP) du Mali, Pr Akory Ag Iknane alertait sur le danger de consommation du thé vert de Chine expédié au Mali (Achoura). Le directeur national de l’Agriculture précisait dans sa correspondance du 3 mars 2021 que « les investigations et analyses de laboratoire ont montré les traces de deux pesticides à des quantités dépassant le seuil tolérable » dans le seul lot N° JX 403120046 du thé Achoura.
Le retrait du marché de ce lot du produit avait ainsi été instruit. Une décision qui semble avoir manqué de prudence. Pourtant, ne dit-on pas que la prudence fait partie des vertus des hommes d’État.
Certes, il est du devoir de l’État de se soucier de la santé des consommateurs, mais il est aussi de son devoir d’être prudent afin d’éviter certaines erreurs aux conséquences peu enviables. La décision des autorités publiques maliennes dans l’affaire de thé Achoura peut, malgré la correction du tir, entraîner non seulement une discrimination du produit sur le marché, mais aussi la faillite de la société et par ricochet la mise en chômage de plusieurs travailleurs. Elle crée également la confusion dans le cœur des citoyens.
« Tous les résultats sont nets »
La révélation des autorités maliennes a défrayé la chronique. Les uns s’empennant à la société Houma Ag Hamdaga et les autres la défendant « contre une cabale montée de toute pièce ».
Une « contre-analyse réalisée sur ce thé Achoura par plusieurs laboratoires du continent et de la France » aurait en effet donné raison aux défenseurs de la société contre ses détracteurs et les autorités maliennes. Aucune « substance nuisible à la santé humaine » ne figure dans le lot « incriminé ».
Me Cheick Oumar Konaré, avocat de la société, précise que« tous les résultats sont nets : il n’y a aucune espèce de résidu de pesticide dans l’échantillon incriminé ». S’agissait-il donc d’une erreur de la part des autorités maliennes ? Une volonté manifeste d’incriminer cette société au profit d’une entreprise d’État ?
Où se situe la vérité ?
Au stade actuel des choses, on ne saurait rien affirmer. Mais l’on se demanderait finalement à quel saint les consommateurs doivent finalement se vouer. De quel côté se situe la vérité ? Les autorités qui ont affirmé le produit impropre à la consommation sont les mêmes qui se dédisent en réaffirmant que « le thé Achoura actuellement sur le marché est tout à fait sans aucun danger pour la consommation humaine ». Les autorités ont-elles finalement cédé au tollé autour de cette affaire ? Achoura contiendrait-il réellement des résidus de pesticide ?
En attendant, souvenons-nous de cette citation de cet écrivain allemand : « L’État, c’est le plus froid de tous les monstres froids : il ment froidement [ndlr] ».
Fousseni Togola