L’historien camerounais Achille Mbembe affirme que le président français Emmanuel Macron le préfère libre de penser.
Très critiqué pour sa proximité avec le président de France Emmanuel Macron, l’écrivain Achille Mbembe s’est exprimé à ce sujet au cours d’une interview accordée à notre confrère Jeune Afrique. Celui qui porte aussi la casquette d’historien affirme qu’il est possible d’une certaine proximité avec le pouvoir sans se compromettre. Et pour ce qui est spécifiquement de ses rapports avec Macron, il dit n’avoir jamais perdu sa liberté.
«Emmanuel Macron n’a jamais proposé de me lier les mains. En vérité, ce qui l’intéresse, ce qui l’a toujours intéressé, c’est qu’elles soient le plus libres possible. Je parle des mains, mais il s’agit en réalité du cerveau. Si connivence il y a – et elle enrage beaucoup d’ignorants –, c’est précisément sur cette base. Il est en effet possible d’entretenir avec le pouvoir, tout pouvoir, un rapport de totale liberté. Les faibles d’esprit n’étant pas habitués à ce type de relation, je comprends qu’ils laissent fleurir maints fantasmes à mon sujet et au sujet de mon rapport à Emmanuel Macron», a-t-il déclaré à Jeune Afrique.
Rappelons qu’Achille Mbembe fait partie des camerounais de la diaspora qui faisaient partie de la délégation du président Macron qui a eu une visite officielle au Cameroun au mois de juillet dernier. Il aura été qualifié de traitre par certains intellectuels, présenté comme faisant partie de ceux qui roulent pour les intérêts de la France. Mbembe affirme contrairement à ce que peuvent penser certains, qu’il croit que la France ne peut plus rien apporter d’extra à l’Afrique.
«Je l’ai dit à plusieurs reprises, il n’y a strictement rien que la France puisse donner à l’Afrique que l’Afrique ne puisse s’offrir à elle-même. Il n’y a pas meilleur pari historique et déclaration plus radicale de liberté. Encore faut-il en mesurer les conséquences et être prêt à les assumer. Je crois, avec plusieurs autres, qu’il faut sortir d’un face-à-face stérile avec la France, dans la perspective de réinvention d’un monde en commun. Parce que nous n’avons pas le choix. Les grands défis sont communs, l’avenir ne pourra être que commun. Je suis, comme vous l’imaginez, de celles et ceux qui plaident pour un engagement critique avec le reste du monde, avec la France, mais aussi avec les États-Unis, la Chine, la Russie, l’Inde, l’Allemagne et les autres puissances du monde. De toute façon, ce ne sont pas des choses qui se décrètent. Une rupture ne s’improvise pas. Elle se construit, loin des incantations», a-t-il déclaré à Jeune Afrique.