“Le Mali et la France constituent un vieux couple, il y a par moments des scènes de ménage”, a-t-il dit, “mais je ne crois pas que ça va aboutir au divorce”. 

Sa diatribe onusienne paraît cependant avoir touché une corde sensible dans un pays en guerre depuis 2012, confronté quotidiennement aux violences et tributaire de l’aide internationale pour échapper à l’abîme.

M. Kokalla Maïga s’est posé en “héros du +Mali is back+ (le Mali est de retour)”, a commenté le site d’informations Benbéré, face à une France jugée “condescendante” par d’autres médias.

“Franchement, aller dire ça à la tribune de l’ONU, ça n’est pas rien”, sourit Amboungo Guindo, un des deux hommes du “grin”.

La présence militaire de la France, ancienne puissance coloniale, fait régulièrement l’objet d’expressions d’animosité, dans la rue ou sur les réseaux sociaux. Elles ont souvent pour corollaires des appels à l’aide à l’adresse de la Russie, appels aux origines pas toujours limpides.

L’idée de la Russie comme recours semble s’être renforcée sous les militaires qui ont pris le pouvoir en 2020.

Les autorités suivent une “stratégie populiste” opposant France et Russie depuis le 24 mai, date à laquelle les militaires ont écarté les autorités civiles transitoires qu’ils avaient mises en place, pour assumer eux-mêmes la présidence et nommer ensuite M. Maïga Premier ministre, rappelle le chercheur Boubacar Haidara.

Les militaires ont alors fait passer le message qu’ils avaient renversé le président de transition parce qu’il “complotait avec la France” et “avait empêché des achats d’armes à la Russie”, ajoute-t-il.

Sans sondage crédible, dans un pays fortement rural, il est difficile de mesurer la réalité de sentiments antifrançais ou prorusse, de même que la popularité ou non des autorités.

– Stratégie payante –

Mais jouer la Russie contre la France “marche très bien” et “a trouvé un écho favorable dans les foyers”, note Boubacar Haidara. D’autant mieux que “l’intervention française n’a pas vraiment permis d’améliorer la situation sécuritaire”, souligne-t-il.

Dans les régions en conflit, le débat semble avoir moins d’écho.

“Ces colonels nous ont promis de se mettre au travail, on voudrait juste qu’ils le fassent”, dit un activiste de Gao, engagé par le passé pour le retour de l’Etat quand les jihadistes tenaient la ville. “Et ce sera forcément avec des partenaires, russes ou français… Seuls, ce sera impossible”, ajoute-t-il.

Les habitants sont “plutôt focalisés sur la sécurité, avoir des revenus et faire vivre sa famille, comme 95% des Maliens”, assure l’ancien Premier ministre Moussa Mara.

“Il y a une poussée de fièvre, elle retombera; elle aura créé des dommages et suscité de la méfiance, c’est dommage”, estime-t-il.

Au “grin”, le débat s’est déplacé sur l’attaque récente à moins de 200 km de Bamako sur un axe essentiel de commerce entre Mali, Sénégal et Mauritanie. Une zone auparavant peu touchée par les violences. “Pendant qu’on parle, les jihadistes, eux, agissent!”, s’inquiète Bilal Ba.

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