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25 novembre 1985 : LA “GUERRE DES PAUVRES” MALI-BURKINA

Le 25 décembre 1985, l’armée malienne lance une offensive en territoire burkinabè à cause d’un litige frontalier dans la bande d’Agacher, mais aussi en raison de plusieurs mois de tensions entre les présidents du Mali, Moussa Traoré, et du Burkina, Thomas Sankara.

Bande litigieuse

La bande d’Agacher, vaste  de 30 km de long, est à cheval entre le Mali et le Burkina. Depuis leur indépendance, en 1960, les deux pays se disputent cette zone riche en minerais. En décembre 1974, ils s’opposent pour son contrôle lors d’une première “guerre des pauvres”. Les combats durent deux jours et font quelques morts, avant qu’une médiation des pays voisins y mette fin.

En 1985, les tensions refont surface. En cause : des incursions militaires maliennes de l’autre côté de la frontière, mais aussi un recensement mené par des fonctionnaires burkinabè dans des villages revendiqués par les deux États. Ce litige frontalier surtout fournit un prétexte à Moussa Traoré et à Thomas Sankara pour en découdre. Les deux dirigeants entretiennent des relations exécrables.

Guerre des pauvres

Cette guerre est qualifiée de “guerre des pauvres” par la presse internationale. Au pouvoir depuis 1968, le président malien, Moussa Traoré, voit d’un mauvais œil l’arrivée aux affaires du capitaine Thomas Sankara à Ouagadougou, le 4 août 1983. Comme son voisin ivoirien Houphouët-Boigny, il craint une “contagion” révolutionnaire au-delà des frontières burkinabè. Or, en septembre 1985, lors d’un discours à Ouagadougou, Sankara appelle pour la première fois à la révolution chez les voisins.

«Les autres peuples qui sont à nos frontières ont eux aussi besoin de révolution […] Je veux parler du Mali. […] La révolution du peuple burkinabè est à la disposition du peuple malien qui en a besoin. Parce qu’elle seule lui permettra de lutter contre la faim, la soif, l’ignorance et de lutter contre les forces de domination néocoloniales». Sankara est aussi convaincu que Traoré aide ses opposants à Bamako. Il les soupçonne de fomenter un complot pour le faire chuter, avec la bénédiction des dirigeants ivoiriens et togolais, eux aussi préoccupés par l’influence des théories sankaristes dans leur pays.

Selon Sennen Andriamirado, auteur du livre “Sankara le rebelle”, Sankara croit que ses ennemis ont mis sur pied un plan pour le renverser : profiter d’une nouvelle guerre entre le Burkina et le Mali, occuper la ville burkinabè de Bobo-Dioulasso et, de là, lancer une contre-révolution.  À la fin du mois d’octobre 1985, Sankara lance un avertissement à son homologue malien, par l’intermédiaire du président algérien Chadli Bendjedid. Pas de réponse de Traoré, qui ne reçoit pas les émissaires de Ouagadougou. Il ne suffit plus que d’une étincelle pour mettre le feu aux poudres. Elle intervient quelques semaines plus tard avec la répétition d’incidents frontaliers dans la bande d’Agacher.

5 jours de combats

Le 25 décembre 1985, aux premières lueurs du jour, 150 chars maliens franchissent la frontière et attaquent plusieurs localités. Dans le ciel, des Mig 21 bombardent les deux principales villes du nord du Burkina: Djibo et Ouahigouya. L’armée malienne, dont la puissance de feu est supérieure, s’enfonce en territoire burkinabè. Son objectif est de prendre en tenailles la seconde ville du pays, Bobo-Dioulasso. Ses adversaires peinent à contenir son offensive. Ils sont débordés sur le front nord mais tiennent le front ouest.

Commandées par le capitaine Blaise Compaoré, les forces burkinabè se sont éparpillées et ont adopté la technique de la guérilla. Elles se sont déployées en petits groupes qui pratiquent le harcèlement avec un certain succès. Compaoré dira : “Il est facile à des blindés d’entrer dans un territoire. Il leur est très difficile d’en sortir.”’. Des soldats attaquent les chars maliens à la roquette, à la grenade ou au couteau, après avoir ouvert les écoutilles. Les affrontements sont meurtriers. Une centaine de Burkinabè et une quarantaine de Maliens sont tués, militaires et civils confondus.

Le bombardement aérien du marché de Ouahigouya est particulièrement sanglant. S’ajoutent à cela des exécutions sommaires de prisonniers de guerre. Après 5 jours de combats, un accord de cessez-le-feu est trouvé le 30 décembre par la médiation ouest-africaine menée par l’Ivoirien Félix  Houphouët-Boigny.

Le 17 janvier 1986, à Yamoussoukro, en présence de Traoré et de Sankara (photo), cette mesure est complétée par un retrait des belligérants du champ de bataille. Le conflit frontalier est finalement réglé le 22 décembre 1986, lorsque la Cour internationale de justice de la Haye, à laquelle ce dossier a été confié en 1983, partage la zone litigieuse entre les deux pays.

Source : Jeune Afrique

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