Après 72 heures de suspens, les résultats provisoires du premier tour de la présidentielle tchadienne sont tombés hier dans la soirée. L’Agence nationale de gestion des élections (ANGE), au terme des compilations, a proclamé la victoire nette du Président Mahamat Idriss Déby Itno qui a recueilli 61,03 % contre 18,53 % pour son Premier ministre, Succès Masra, leader de l’opposition et président du parti Les Transformateurs.
Albert Pahimi Padacké obtient lui 16,91 % des suffrages et se classe en troisième position. Le taux de participation de ce scrutin présidentiel est de 75,89%. C’était attendu de tous. Ou presque. La défaite cuisante du Sherpa du gouvernement post-Saleh Kebzabo, Succès MASRA, reflète à petit poil blanc la réalité des rapports de force sur le champ politique tchadien, depuis le fameux « deal » sous-marin paraphé entre Mahamat DEBY ITNO Alias Kaka et l’ex-redoutable jeune opposant Succès MASRA. Les tractations entourées d’une grande opacité, sur l’axe Kinshasa-Paris- Washington via d’influents missi dominici avaient scellé leur cordiale cohabitation. Une symphonie qui a tourné en eau de boudin. Ce quitus délivré par ces trois pays s’est soldé par la cooptation de Succès Masra en qualité de premier ministre. Ce dernier qui n’avait pas mesuré les risques politiques a joué et perdu au finish. Une jeunesse brave, acquise à sa cause pourtant, flouée, trahie. Déjà balafré et désarçonné par cet « entrisme » dans l’échafaud du système Mahamat Idriss Déby « Kaka », Succès MASRA savait bien qu’il engageait une bataille perdue d’avance. En atteste sa cote de popularité qui s’est dégarnie comme une peau de chagrin, corroborée par le verdict sans appel des urnes, favorable au président sortant. Après l’épisode du » chaudron politique » marqué par l’ascension quasi-irrésistible de la figure politique la plus populaire du pays chez les jeunes et les blindés de la mort de Mahamat Idriss DEBY KAKA, qui ont ôté la vie à quelque 200 personnes dont des jeunes à la fleur de l’âge, Succès MASRA avait fait son come-back à NDjaména pour diriger le cockpit primatorial. Le deal politique avait précipité donc l’érosion de son ascension portée par la jeunesse tchadienne. A l’opposé du charismatique jeune opposant sénégalais, Ousmane SONKO, Succès Masra n’a pas été résilient. Au gré des épreuves dressées sur son chemin. Il a préféré s’asseoir au banquet onctueux de la République de Deby Fils, ses sbires, ses valets pour le maroquin « empoisonné » de Sherpa du régime. Mais, à quel prix? Urbi orbi, il s’est crucifié en se jetant dans la machine broyeuse et impitoyable des putschistes. Comme on dit, il a « dealé » et perdu.
Le divorce est presque acté entre le Président Kaka et le Premier ministre MASRA avec au cou désormais un serpent politique mortifère. Pour combien de temps ? En atteste le discours violent de Mahamat Idriss Deby à l’endroit de l’opposant en perte de vitesse lors de toute la campagne présidentielle.
Le jeune opposant sort systématiquement du jeu avec un uppercut à la figure. La capitale NDjaména échappe aussi, épicentre névralgique pour toute machine politique aux bons accoudoirs à Succès Masra, alors qu’il y’a quelques mois avant le fameux deal, l’électorat lui était acquis. Succès MASRA a mordu la poussière et c’était prévisible.
La résilience a un prix
L’opposition nécessite des sacrifices. Les erreurs se payent cash. Surtout avec un régime répressif qui a maté plus de 200 jeunes tombés sous les balles des chars du Président Mahamat Idriss Déby.
Ousmane SONKO est un bel exemple de résilience. Sa trajectoire faite de transpiration, de lucidité, de constance et de courage qui l’ont mené au pinacle de l’État doit servir à toute cette jeune génération de leaders africains qui aspirent à conquérir le pouvoir.
Après s’être débarrassé du teigneux et stratège opposant Yaya Dillo, invalidé la candidature du jeune loup aux dents longues, challenger sérieux de cette présidentielle, Nasour Ibrahim KOURSAMI, le Vizir Mahamat Idriss DEBY peut désormais se pavaner dans le » sulfureux » boulevard jusqu’en 2030. Succès MASRA, lui, a signé sa mort avec un avenir politique tchadien, bien incertain et peu reluisant..
Par Ismael AÏDARA (Confidentiel Afrique)