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Sommet de Sotchi : Un nouveau chapitre dans les relations russo-africaines

La Russie entend conquérir sa part dans le marché prometteur africain. Moscou ne manque pas d’atouts dans la compétition que se livrent les puissances pour profiter des opportunités de notre continent. Le président Ibrahim Boubacar Keïta participera au grand rendez-vous qui s’ouvre demain dans la Station balnéaire située sur la mer Noire

C’est à Sotchi, une ville située au bord de la mer Noire en Russie que les dirigeants russes et africains, les experts, le monde des affaires se sont donnés rendez-vous du 23 au 24 octobre pour le forum économique Russie-Afrique et le sommet Russie–Afrique. Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta prendra part à ces importantes rencontres qui permettront d’esquisser les grands chantiers que la Russie et l’Afrique comptent mener ensemble à bon port.
Première du genre, cette grande messe est une réelle opportunité d’ouvrir un nouveau chapitre dans les relations russo-africaines. Elle a été initiée par le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine à Johannesburg, en juillet 2018, en marge du sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Ces cinq pays émergents ont créé cette organisation pour faire contrepoids à la domination des Occidentaux sur la scène internationale.
La rencontre de Sotchi se tient alors que s’efface le souvenir des relations privilégiées, qui dans les années 1970, liaient un continent en pleine décolonisation à une ex-Union des Républiques socialistes soviétiques (URSS) en pleine campagne tiers-mondiste. L’effondrement de l’URSS au début des années 90 a marqué un changement radical dans cette politique. Contrainte de faire face à l’éclatement de son empire, la Russie s’était plus ou moins désintéressée de l’Afrique, au point de disparaître du continent en termes de présence géopolitique.
Le sommet de Sotchi est donc l’expression de l’ambition de la Russie de raviver ses liens historiques avec l’Afrique et de s’y positionner comme un acteur de premier plan. Dans la Station balnéaire, les organisateurs attendent plus de 10.000 participants dont une quarantaine de chefs d’état et de gouvernement et des représentants d’associations et d’organisations non gouvernementales.
Le point d’orgue de la rencontre sera le renforcement des liens de coopération entre le continent africain et la Russie dans les domaines politique, économique et culturel. La rencontre constituera un espace d’échanges sur les défis actuels du monde et la recherche de moyens de renforcer la stabilité régionale. D’où le thème du sommet : « Paix, sécurité et développement ».

VOTES UTILES- L’enjeu de ce sommet demeure important tant sur les plans politique, sécuritaire, qu’économique. Dans le domaine politique, les 54 pays d’Afrique, qui représentent près d’un tiers des voix à l’Assemblée générale des Nations unies, constituent un réservoir de votes utiles pour la Russie. Rappelons qu’en 2014, s’étaient abstenus 58 pays lors du vote de la résolution condamnant l’annexion de la Crimée. Les sanctions économiques infligées par les Occidentaux à la suite de cette annexion et du conflit larvé avec l’Ukraine poussent Moscou à s’intéresser davantage à l’Afrique qui n’est pas insensible à ses arguments.
Sur le plan sécuritaire, la Russie dispose de moyens pour aider le continent dans la lutte contre le terrorisme. Elle entend séduire par son expertise. Depuis quelques années, les sociétés militaires privées russes se sont implantées dans certains pays du continent (Centrafrique, Soudan). En plus, des accords de coopération militaire ont été signés avec plusieurs pays dont le Mali. Le succès du pays de Vladimir Poutine en Syrie semble plaider en sa faveur et lui donner l’image d’une puissance militaire crédible. Le soutien de la Russie a permis au président syrien Bachar El Assad de freiner la pression occidentale et de se maintenir au pouvoir.
Sur le plan économique, tout comme la Chine et l’Inde, la Russie ambitionne de décrocher sa part du marché africain, avec le renforcement des échanges économiques. C’est pourquoi, il est prévu en marge des travaux du sommet, un forum économique qui sera sanctionné par la signature d’un nombre important d’accords dans les domaines du commerce, de l’économie et de l’investissement.

PAS SANS LENDEMAIN- En 2018, les échanges entre les pays africains et la Russie ont franchi la barre des 20 milliards de dollars (environ 10 000 milliards de Fcfa) et ce montant pourrait encore augmenter. Les Petites et moyennes entreprises (PME) sont peu présentes en Afrique et la Russie compte sur les bonnes vieilles recettes dans la conquête de nouveaux marchés.
L’enjeu de la participation de notre pays au forum économique reste important. Cette rencontre devrait susciter un vif intérêt pour le secteur privé malien en quête de partenariat structurant. Il s’agira pour les opérateurs économiques de présenter les opportunités d’investissement au Mali et de nouer des partenariats économiques dynamiques et stratégiques avec les hommes d’affaires russes dans les secteurs de l’énergie, de l’agro-industrie, des mines et des transports.

L’économiste principal de la banque d’investissements Renaissance Capital, Charles Robertson a précisé que la Russie a un avantage compétitif, grâce à ses compétences dans l’armement et les hydrocarbures. Pour cet économiste, Moscou n’arrive pas trop tard dans la compétition que se livrent les puissances pour prendre pied sur le continent. « L’Afrique va continuer à croître, la croissance y sera la plus rapide du monde d’ici à 2030. Le gâteau grandit », analyse l’économiste Charles Robertson.
Quant à Mikhail Bogdanov, vice-ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie et Représentant spécial du président russe pour le Proche-Orient et l’Afrique, il assure que le sommet de Sotchi ne sera pas sans lendemain. Des rencontres similaires auront lieu à l’avenir tous les deux ou trois ans, alternativement en Russie et en Afrique, souligne le dirigeant russe.
à l’issue du sommet de Sotchi, une déclaration politique sur l’état et les perspectives de coopération entre la Russie et les pays africains sera signée. En plus de cela, le rapport «Russie-Afrique : une vision commune à l’horizon 2030» devrait être présenté à Sotchi et servir de base aux discussions futures. Ainsi, l’Afrique qui ne figurait dans le document «Conception de politique étrangère» 2016, qu’à l’article 99, est-elle devenue une priorité pour Moscou ? L’avenir nous le dira.
Notons qu’après la chute de l’Union des Républiques socialistes soviétiques (URSS), Sotchi devient la seule station balnéaire de toute la Russie. Cette ville de 368.011 habitants a abrité la 22è édition des Jeux olympiques d’hiver en 2014 et elle fut l’un des sites de la Coupe du monde de football de 2018.

Envoyée spéciale
Christiane DIALLO

Source: L’Essor-Mali

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