La fameuse phrase, selon laquelle ‘’les femmes rurales sont le maillon essentiel dans le renforcement de la résilience au sein de leur communauté’’ fait l’unanimité au Mali. Et pour cause, en cette période de récoltes, elles sont les bras valides de cette activité ponctuelle et très importante pour la production agricole. En plus de leur activité quotidienne, les femmes rurales s’activent pour acheminer les récoltes sur l’aire de battage.
Dans la mouvance de la journée internationale de la femme rurale, nous avons fait un tour dans la région de Ségou pour assister à la récolte du maïs et du mil de certains champs. A l’occasion, les femmes y accomplissent des opérations extraordinaires, pour pouvoir subvenir aux dépenses de leur famille.
A Falo, Tiénabougou, Kaana, Sinéni, King et dans les 24 autres villages dans le cercle de Bla, les femmes sont actuellement actives dans les champs des grands producteurs pour la récolte.
Ravir la vedette aux hommes
Cette activité lucrative est dans l’agenda annuel des groupements et coopératives des femmes de cette zone, qui ravissent la vedette aux manœuvres dans la zone.
Ce qui fait que ces derniers se replient à d’autres tâches comme la production des briques en banco et des pailles pour les hangars.
Nous sommes à King, à quelque 300 kilomètres de Bamako. Il est 6 h du matin, Kadiatou BOUARE, est présidente de la coopérative Danaya de la commune rurale de Falo qui regroupe à son sein plus de 200 femmes de son village et environnants.
A peine réveillée, Kadiatou s’accroupie auprès de son mari, Daouda SANOGO, un sexagénaire chef d’un grand ménage, puisqu’il a deux autres femmes et plusieurs enfants.
La salutation et les bénédictions du vieux Daouda se mêlent dans le son de la petite radio, accrochée au hangar dont le bruit empeste la quiétude matinale de la famille SANOGO.
Ce matin, c’est au tour de Kadiatou de faire le petit déjeuner. En un laps de temps, elle fait remplir une petite bassine en caoutchouc de bouillie de mil, qu’elle partagera entre une dizaine de tasses.
C’est dans la précipitation que Kadiatou sert les tasses de bouilles et se met dans son accoutrement de récoltes de maïs d’un grand opérateur économique qui évolue dans la transformation.
Habillée d’une camisole en soie de couleur verte et coiffée d’un mouchoir traditionnel en cotonnade, Kadiatou est munie d’un seau, d’une machette et d’un bidon d’eau de deux litres soigneusement truffé dans une pochette de sac en fibre.
Pour elle et les autres membres de sa coopérative, vient de commencer une rude journée de récolte d’un champ de maïs de 10 hectares.
Il est 8h00, Kadiatou et les autres femmes se regroupent d’abord au jardin maraîcher du village et profitent de cueillir quelques échalotes.
Après quelques minutes, une trentaine de femmes affluent les lieux et changent du coup le climat du verger. Après les salutations d’usage, Awa Diarra, Mariam BOUARE, Assetou COULIBALY, Nana DEMBELE et autres sont presque dans les mêmes accoutrements que Kadiatou, la présidente de leur coopérative. C’est-à-dire elles étaient toutes habillées en haillons de la tête au pied. Avec des machettes et bassines, elles se dirigent en file indienne vers le champ de maïs dont le coordinateur Issa TOURE, leur porte toute sa confiance.
Un travail de pro
Dans le champ, les plants de maïs s’inclinent sous le poids des épis qui attendent d’être récoltés. Issa TOURÉ, le responsable du champ reconnaît facilement le visage de chacune d’entre elles, puisqu’il les emploie depuis longtemps.
Les récoltes de ce champ sont destinées à une usine de transformation de farine de maïs et de Sheeps pour enfants.
Selon lui, depuis l’implantation de ce champ, il y a trois ans, la société fait confiance à ces dames qu’il qualifie de très braves pour les travaux.
«De la semi, en passant par le sarclage et les récoltes, ce sont les femmes de la coopérative de Kadiatou qui assurent. Elles sont vraiment efficaces. Naturellement, j’aime travailler avec les femmes. Elles n’ont pas de problèmes. Elles respectent les clauses des contrats. Je suis vraiment satisfait de leur boulot. », a-t-il dit avec un air satisfaisant.
C’est dans un bruit assourdissant des chants d’oiseaux et celles du folklore qui accompagnent des dizaines de femmes dont l’engouement est au top, s’activent pour débarrasser M. TOURE de ces milliers de pieds de maïs. Pour les accompagner, le coordinateur réquisitionne des jeunes pour faire du thé pour les amatrices, avant l’arrivée du copieux plat de riz gras spécialement fait pour la cause.
«La récolte est une fête chez nous ici. En plus, c’est une occasion pour nous les femmes du village et environnants de nous retrouver. En plus du climat festif, nous en tirons profit », a dit Assetou, la trésorière de la coopérative. Selon elle, ce champ de 10 hectares leur prendra une journée pour une somme de 600.000 CFA.
Elle rassure qu’une partie de l’agent sera mise dans la caisse de la coopérative et que le reste sera distribué entre les femmes.
« Cette activité nous permet de résoudre beaucoup de nos problèmes financiers, sans faire recours à nos maris. L’argent dans la caisse est un fonds d’autonomisation des membres de la coopérative. Une partie sert aussi à payer les pagnes des différentes fêtes de femmes, comme le 8 mars et la journée panafricaine des femmes », a-t-elle dit. Après la pause-déjeuner, à 14 heures, les travaux repris ont pris fin au petit soir.
Les femmes, apparemment moins fatiguées, quittent le champ d’Issa TOURÉ en gaieté.
Selon la trésorière, c’est le mardi, jour de la réunion hebdomadaire que l’argent sera partagé. En attardant, un autre champ de 6 hectares les attendait le jour suivant.
Selon Kadiatou BOUARE, cette période de récolte est une occasion pour les femmes de leur zone de gagner dignement leur vie, tout en assurant les moyens de subsistance de leur famille.
« Dans la zone rurale, la femme est le pilier de la famille, puisqu’après les saison de pluies, les hommes n’ont pas beaucoup d’activités. Il n’y a pas de travail ici », a-t-elle martelé
PAR CHRISTELLE KONE
Source : Info-Matin