A Madagascar, la 3e session extraordinaire touche bientôt à sa fin. Mercredi 28 mars, c’était le dernier jour des travaux en commission avant les 5 jours de pause occasionnés par les célébrations de Mars-47 suivies du week-end pascal. Pour la 4e fois, l’étude des projets de lois sur le recouvrement des avoirs illicites et sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme était à l’ordre du jour. Deux textes éminemment importants dans un pays qui se dit engagé dans la lutte contre la corruption et la criminalité organisée. Mais pour la 4e fois hier, les députés n’ont pas honoré l’agenda. L’Assemblée nationale était vide. De quoi attiser un peu plus l’inimitié de la population envers ses soi-disant représentants. Et laisser perplexe la seule personne qui avait fait le déplacement.
« Je constate un déni. Un déni de la part des membres de cette commission juridique. Quand c’est la 4e fois, c’est à croire qu’on ne veut pas participer à ces travaux. » Frustré, désabusé, Boto Lamina, le directeur général du SAMIFIN, le Service de renseignements financiers à l’initiative de la réforme des lois anti-blanchiment, devait éclairer les députés sur certains points des projets de loi. Il a attendu plus de deux heures, en vain.
« C’est un projet anti-délinquants économiques. Maintenant, est-ce qu’il y a parmi les décideurs certains qui se sentent visés par ce genre d’initiative ? En tout cas, là, ils ne sont pas en train de montrer de bonnes dispositions à avancer dans cette lutte contre le blanchiment de capitaux, le crime organisé et contre la corruption. »
Loi sur le recouvrement des avoirs illicites, loi sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, pour Boto Lamina, l’adoption de ces deux textes est un passage obligé pour être conforme aux standards internationaux et gagner en efficacité. « Je prends l’exemple d’un détournement de deniers publics. Il ne s’agit pas simplement de mettre en détention les personnes impliquées dans ce genre d’infraction. L’Etat doit avoir les moyens de récupérer cet argent-là et de mettre une amende également. Ça c’est prévu dans les projets de loi. Mais ça aujourd’hui, avec les lois actuelles, ce n’est pas faisable. »
L’an dernier, le service de renseignement financier a à lui seul chiffré à 223 milliards d’ariary (57 millions d’euros) le montant de la fraude fiscale et du détournement d’argent public. Un montant bien plus élevé si l’on ajoute les montants comptabilisés par le BIANCO, le Bureau indépendant de lutte anti-corruption, et l’inspection des impôts). Pour son directeur, si la moitié de ces montants étaient recouvrés par l’Etat, celui-ci n’aurait plus besoin d’emprunter d’argent aux bailleurs internationaux.
RFI