Cette négation survient après la configuration donnée lors de la première journée à ce procès, lorsque les avocats de la défense ont plaidé en faveur de l’incompétence de la Cour d’Appel à juger les anciens ministres, affirmant qu’ils ne devraient être jugés que par une juridiction spéciale
Bien entendu, le rejet de la demande d’annulation de la procédure ne pouvait prospérer pour retarder le déroulement du procès.
À la reprise de la session mercredi, l’audience s’est ouverte avec l’une des responsables impliqués et principaux accusés dans cette affaire, en la personne de Mme Bouaré Fily Sissoko, ancienne ministre de l’économie et des finances de 2013 à 2014. Et les débats dans le fond pouvaient commencer. À la barre, elle a fermement nié les accusations de détournement, escroquerie, faux et favoritisme. Elle a déclaré qu’elle rejette catégoriquement les faits dans leur ensemble et a refusé de verser une caution de 500 millions de FCFA, affirmant que cela reviendrait à admettre sa culpabilité.
L’ancienne ministre de l’Économie s’est défendue contre les accusations de détournement de fonds publics en affirmant qu’elle a toujours voulu que la lumière soit faite sur l’achat de l’avion présidentiel. Elle a insisté sur le fait qu’elle était là pour que la vérité éclate et qu’elle a toujours bien servi son pays. Elle a déclaré que les contrats lui ont été présentés signés par le ministre de la Défense sans son aval, chargeant le Premier ministre de l’époque, Oumar Tatam Ly, au moment des faits. Elle a également mentionné d’autres ministres impliqués dans l’affaire.
En ce qui concerne le coût de l’avion, l’ex-ministre a déclaré qu’il s’élevait à plus de 18 milliards 587 millions de FCFA, expliquant que l’achat était motivé par le coût élevé de la location de l’avion présidentiel pour les déplacements du président. Elle a affirmé que cet achat n’était pas prévu dans le budget, mais qu’il s’agissait d’une décision de principe du Premier ministre. Le nom de l’ex-Premier ministre est revenu fréquemment dans les déclarations de l’accusée tout au long de la journée, malgré la demande de comparution rejetée par la Cour.
Le deuxième jour de l’audience devant la Cour d’assises spéciale de Bamako, le 26 septembre 2024, a été marqué par des interrogations sur une transaction mystérieuse de 15 milliards de FCFA qui a suscité de vives controverses. Le Directeur national du Trésor de l’époque, Boubacar Haïdara n’a pas été en mesure de fournir des réponses claires sur l’origine de cet ordre de paiement, malgré ses explications sur une erreur de paiement et une régularisation ultérieure.
L’ancienne ministre des Finances, Mme Bouaré Fily Sissoko, a également affirmé ne pas être au courant de ce paiement et a souligné l’incohérence entourant le dossier de l’acquisition de l’avion en question. Des accusations de malversations ont été portées contre le Directeur du Trésor pour avoir effectué ce règlement sans autorisation préalable, a-t-elle rappelé. La Cour a demandé au Directeur de fournir des documents cruciaux pour éclaircir la situation, mais leur accessibilité semble douteuse. La question de la légitimité de ces paiements et de l’autorisation de paiement demeure au centre des débats. L’audience a été suspendue en attendant les preuves promises par le Directeur du Trésor, et la comparution de témoins clés a été ordonnée pour la prochaine audience.
Révélations sur les équipements militaires et le protocole controversé avec GUO Star
Lors de cette audition du vendredi 27 septembre 2024, Mme Bouaré Fily Sissoko a mis en lumière des zones d’ombre et des défaillances dans la gestion des équipements militaires sous le gouvernement IBK. L’ancienne ministre des Finances a été interrogée sur un protocole controversé signé avec la société GUO Star pour un montant de 69 milliards de FCFA, suscitant des inquiétudes quant à la transparence des transactions. Le protocole prévoyait un financement initial par le fournisseur, avec un remboursement ultérieur par l’État. Cependant, des lacunes significatives ont été révélées, notamment un premier paiement de 22 milliards de FCFA suivi d’un second effectué par le successeur de Mme Bouaré. En raison de l’incapacité de GUO Star à obtenir une garantie bancaire, l’État a dû fournir une garantie de 100 milliards de FCFA couvrant l’ensemble des protocoles liés au ministère de la Défense.
Des suspicions de surfacturation ont également été soulevées, avec des gilets pare-balles facturés à un prix bien supérieur à leur coût réel en usine. Cette situation a mis en lumière la nécessité de procédures rigoureuses et transparentes dans l’acquisition d’équipements militaires, soulignant l’importance de la vigilance et de la bonne gouvernance des finances publiques.
Témoignages et nouvelles charges
L’audience du lundi 30 septembre 2024 a été un moment crucial dans le procès de l’acquisition controversée de l’avion présidentiel et des équipements militaires. La journée a été marquée par le témoignage de Boubacar Ben Bouillé Haïdara, ancien Directeur général du Trésor, ainsi que par l’introduction de nouvelles charges par le parquet général.
Le témoignage de l’ancien Directeur Général du Trésor a soulevé des doutes, car il n’a pas pu fournir les justificatifs nécessaires pour expliquer un décaissement de 15 milliards de francs CFA. Les conseillers de la Cour ont exprimé leur frustration face à l’absence de documents importants prouvant les échanges financiers entre les institutions impliquées.
Le parquet a demandé l’introduction de nouvelles charges, suscitant la réaction immédiate des avocats de la défense qui ont contesté cette initiative comme étant sans fondement. Malgré des tensions entre les parties, l’audience a repris avec de nouvelles questions posées à l’ancien Directeur Général du Trésor.
Cette session a mis en lumière des problèmes dans la gestion des fonds publics, questionnant les pratiques comptables de l’administration de l’époque. La décision finale de la Cour et les interrogatoires à venir seront cruciaux pour l’avenir du procès, qui est devenu emblématique des dysfonctionnements de l’administration publique.
Mahamadou Camara face à la Cour d’assises spéciale
Les révélations sur les responsabilités éclatent au grand jour lors du procès concernant l’acquisition controversée de l’avion présidentiel et des armements militaires. Mahamadou Camara, ancien ministre et directeur de cabinet à la présidence de la République du Mali au moment des faits, comparaît devant la Cour d’assises spéciale.
Il est accusé d’avoir signé un mandat permettant à M. Sidy Mohamed Kagnassy d’acquérir ces équipements pour le compte de l’État, entraînant des pertes financières pour celui-ci.
L’audience du 1er octobre 2024 a commencé par l’appel de l’accusé à la barre. Mahamadou Camara a été interrogé sur les circonstances entourant la signature du mandat, expliquant agir sur la base d’instructions verbales du président. Le rôle d’Amadou Kouma dans le protocole signé avec M. Kagnassy a également été discuté, Camara précisant n’avoir eu connaissance du document qu’après les faits.
Les débats ont été tendus, avec des accusations de préjudices financiers envers l’État. Le contentieux de l’État souligne que l’État a été lésé, tandis que la défense évoque une possible cabale contre son client. Le président de la Cour assure l’impartialité des débats.
Ce procès est emblématique des défis de la gouvernance, mettant en lumière le manque de transparence dans la gestion des deniers publics. La question du respect des procédures et de la chaîne de commandement reste au cœur du débat judiciaire.
L’affaire de la défense a également révélé des éléments troublants sur la livraison d’équipements militaires. Le Colonel Major Nouhoum Dabitao est interrogé sur son rôle dans cette affaire, mettant en lumière des manquements dans les procédures de conformité et de vérification des livraisons.
Ce procès est loin d’avoir livré tous ses secrets, mais la présence de magistrats expérimentés laisse présager une investigation approfondie des responsabilités en jeu. Mme Bouaré Fily Sissoko et le Général de Brigade Moustapha Drabo ont été appelés à la barre pour fournir des éclaircissements sur la gestion des fonds de l’armée. Lors de l’audience du 2 octobre 2024, le Ministère public a interrogé Mme Sissoko sur un paiement de 3 milliards de FCFA demandé par l’ancien Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga, pour lequel il n’y avait pas de procès-verbal de réception. Mme Sissoko a expliqué avoir refusé ce paiement en raison du manque de documentation et a présenté des preuves des procès-verbaux de réception des fonds. Le Procureur général s’est dit entièrement satisfait de ses explications. Le Général Drabo a également été interrogé sur la réception des véhicules, la formation et la maintenance, ainsi que sur des divergences entre les rapports des différents services. Il a nié toute mauvaise gestion malgré les accusations portées à son encontre. Des témoins seront convoqués lors des prochaines audiences pour apporter des clarifications supplémentaires.
Ce procès sur l’acquisition controversée de l’avion présidentiel et des équipements militaires s’est poursuivi avec intensité le 3 octobre 2024, après une interruption la veille. Devant un public nombreux, la Cour d’Assises spéciale de Bamako a examiné des preuves cruciales et entendu des témoignages sous haute pression, avec la participation du président de la Cour, du ministère public, des conseillers du contentieux et des avocats des co-accusés.
Le Colonel-major Nouhoum Dabitao et le Général Moustapha Drabo, impliqués dans les commandes et la réception des équipements militaires pour le compte de l’État, ont présenté des documents jugés essentiels pour la traçabilité des livraisons. Des interrogations sont nées quant aux montants et à la vérification des comptes, la défense contestant les conclusions du contentieux de l’État.
Les réquisitions du Parquet et les plaidoiries de la Défense ont été au cœur des débats, avec des témoignages contradictoires sur l’avion présidentiel et des questions soulevées concernant la comptabilité matérielle du ministère. L’enquête sur une possible double facturation et les frais de transport a ajouté à la complexité de l’affaire, laissant planer des doutes quant à la responsabilité des hauts fonctionnaires accusés de malversations et de détournements.
La séance a été suspendue pour permettre une reprise sereine des débats, mais les zones d’ombre persistent, préfigurant des audiences à venir tendues et déterminantes.
Témoignages importants de M. Abou Berthé et M. Seydou Dicko sur la gestion des fonds publics
Le vendredi 4 octobre, la Cour d’assises spéciale a continué son dixième jour de procès concernant l’achat controversé de l’avion présidentiel et d’armements militaires. Deux témoignages clés ont été apportés par M. Abou Berthé, ancien contrôleur financier à la Direction des Finances et du Matériel (DFM) du Ministère de la Défense et des Anciens Combattants (MDAC), et M. Seydou Dicko, de la même équipe.
Selon M. Berthé, deux mandats de 22 milliards de FCFA chacun ont été exécutés en 2014 et 2015 au profit du trésorier payeur par décision du ministre de la Défense. Il a assuré que les documents nécessaires, notamment les factures certifiées, avaient été rigoureusement contrôlés. Cependant, il a admis ne pas avoir eu connaissance des accords avec la société Guo Star avant la publication du rapport du Vérificateur Général.
Berthé a également mentionné que le mercurial des prix n’était pas joint aux bordereaux de paiement et n’était pris en compte qu’au moment de la réception des marchandises. Concernant les contrats militaires, il a souligné qu’ils étaient protégés par le secret défense, mais que les procédures de décaissement suivaient les mêmes règles que les contrats civils.
De son côté, M. Dicko a confirmé que tous les équipements mentionnés dans le contrat avaient été reçus, soulignant le rôle de la commission de réception dans le contrôle de la qualité et de la quantité. Il a aussi souligné son rôle de contrôle financier au sein de la DFM du MDAC.
Le ministère public a posé des questions sur la conformité des factures de la société Guo Star, demandant à voir les ajustements demandés par le Bureau du Vérificateur Général. La question de la lettre de confort et de la caution de garantie émises par le ministère des Finances a également été soulevée, remettant en question leur conformité avec le contrat.
La session a été suspendue pour permettre au ministère public d’obtenir les factures manquantes, fixant la reprise de la session pour aujourd’hui lundi à 10h.
Mémé SANOGO