Il est difficile d’entrevoir le bout du tunnel quand ceux qui sont censés aider les gouvernants à se ressaisir donnent leur langue au chat.
Lors du conseil des ministres de mercredi dernier, le régime d’Ibrahim Boubacar Keita s’est rétracté en reportant le referendum constitutionnel du 9 juillet 2017. Il entend ainsi faire baisser la très forte pression sociale qui ne cessait de polluer la vie de la nation depuis l’annonce de l’organisation du scrutin référendaire. Cependant, « on ne peut pas cacher le soleil avec une main ». Le pays va mal et le projet de révision constitutionnelle était considéré par certains comme un détail dérisoire dans la multitude des maux ayant plongé le Mali dans l’impasse. La parenthèse de la reforme constitutionnelle s’étant fermée, nos compatriotes ont renoué avec leurs difficultés quotidiennes, sans savoir à quel saint se vouer.
Les dirigeants actuels sont dépassés par la situation du Mali. Et il est difficile d’entrevoir le bout du tunnel quand ceux qui sont supposés aider les gouvernants à se ressaisir donnent leur langue au chat. Dans ces conditions, le Mali aura un long chemin à parcourir.
L’instabilité gouvernementale cache mal la très mauvaise inspiration du président de la République dans sa gestion du pouvoir. Moins de quatre ans après son accession à la magistrature suprême, Ibrahim Boubacar Keita a collaboré avec quatre chefs de gouvernement: Oumar Tatam Ly, Moussa Mara, Modibo Keita et Abdoulaye Idrissa Maïga.
Toutes ces personnalités ont pris les commandes de l’Exécutif avec des préjugés favorables. Toutefois, la ferveur populaire qui les a accueillis a vite laissé la place au désenchantement. Les « hommes providentiels » du président qui étaient appelés à sauver tout un peuple sont soudainement devenus méconnaissables.
Les supputations sur leurs contre-performances se sont multipliées. De leur expérience politique à leur compétence en passant souvent par leur moralité, les citoyens n’ont pas manqué de trouver des explications à leur court séjour à la tête de l’Exécutif malien. Cependant, le temps a prouvé aux Maliens que le problème de leur chère patrie n’est pas le Premier ministre, encore moins les ministres, mais plutôt le chef de l’Etat, qui pilote tout depuis le palais présidentiel. Combien de ministres, qui, une fois acculés dans des affaires de détournements de fonds de l’Etat, ont fait référence au président de la République en personne? Pour endormir la conscience du peuple, IBK a, temporairement, viré certains ministres avant de leur confier de plus grandes responsabilités. Une attitude, qui, ajoutée aux révélations de certains anciens Premiers ministres d’IBK, a fait dire à beaucoup d’observateurs que la remise du Mali sur les rails passera inéluctablement par un changement de méthodes d’IBK.
Avec un président dont la gestion est des plus contestées, les Maliens avaient cru pouvoir compter sur leurs institutions républicaines afin de barrer la route à certaines initiatives inopportunes d’IBK. Que d’illusions! Au nombre de ces institutions qui sont sous la coupe d’IBK et qui ne sont que l’ombre d’elles-mêmes figure l’Assemblée nationale.
L’Hémicycle a perdu tout éclat. Supposés défendre les intérêts de leurs mandants, nombre de ces députés sont présents à l’A.N juste pour soutenir aveuglement les propositions du pouvoir même si ces dernières peuvent porter un coup fatal à la démocratie et au bien-être social.
Les députés ont adopté le projet de reforme constitutionnelle en dépit de son inopportunité et de ses imperfections. Comme l’A.N, la Cour constitutionnelle a également trahi le peuple. Les Maliens comptaient sur les 9 sages de l’Institution pour barrer la route au projet de reforme constitutionnelle d’IBK. Mais, la présidente Manassa Danioko et ses collègues, comme pour renvoyer l’ascenseur à IBK, ont donné leur avis favorable à la révision de la constitution en dépit de l’inconstitutionnalité du projet présidentiel. Heureusement, la pression du peuple a fait reculer le président IBK.
Ogopémo Ouologuem
(correspondant aux USA)
Source: lesechos