Dans son livre La fabrique sociale : regard sur l’école malienne, Moussa Sissoko appelle les parents d’élèves à s’impliquer davantage dans l’éducation de leurs enfants.
A qui appartient l’école ? C’est à cette question et à quelques autres qu’essaie de répondre Moussa Sissoko dans son livre La fabrique sociale : regard sur l’école malienne publié dans la nouvelle maison d’édition Gafe.
« Du point de vue de la formation à donner aux enfants, les parents d’élèves sont plus propriétaires que tout autre acteur », écrit Moussa Sissoko. Par ce point de vue plus ou moins surprenant, l’auteur n’essaie pas de dédouaner de leurs responsabilités les autres acteurs clés de l’école que sont, par exemple l’État, les directeurs et les enseignants. Il essaie plutôt d’encourager les parents d’élèves à s’impliquer davantage dans l’éducation de leurs enfants, en exigeant de meilleures conditions d’études, des enseignants qualifiés, de meilleurs directeurs, etc.
Car, observe Moussa Sissoko, beaucoup d’acteurs qui interviennent à l’école sont plus motivés par l’argent que par le bien-être des élèves. « On cherche plus à se servir de l’école que de la servir véritablement », écrit-il. Seule la pression des parents, qui ont à cœur l’intérêt de leurs enfants, peut pousser le gouvernement, les directeurs, les enseignants et d’autres acteurs à adopter les réformes nécessaires pour faire de l’école malienne une école de qualité.
Les parents ont substitué les « sentiments » aux « devoirs »
Mais est-ce à dire que les parents maliens ne s’impliquent pas déjà dans l’éducation de leurs enfants ? Non, ils s’impliquent mais le font mal. Certains de leurs comportements contribuent même à détériorer la qualité de l’éducation de leurs enfants. « L’attitude la plus répandue chez les parents d’élèves de notre pays, écrit Moussa Sissoko, c’est celle qui les conduit à substituer les « sentiments » aux « devoirs ». Autant, dans un passé récent, l’État a remplacé « le droit à l’éducation » par « le droit à l’école », autant le parent d’élève malien s’est substitué à son enfant qui, même médiocre ou intellectuellement invalide comme un tacot, peut compter sur l’influence ou la « compétence parentale » pour passer en classe supérieure. (…) C’est ce qui tue l’école dans son âme ». Et il ajoute : « Il faut avoir le courage de le dire, nous mentons grossièrement à nos enfants en leur donnant l’impression qu’ils peuvent réussir à l’école même s’ils ne fournissent pas le moindre effort ».
Un débat nécessaire sur l’école
Je ne suis pas d’accord avec toutes les analyses du livre, surtout quand, dans la conclusion, l’auteur invoque l’astrologie chinoise pour expliquer « la raison fondamentale de la gestion chaotique des ressources humaines » par le président IBK. Les spéculations astrologiques sont très amusantes mais peu convaincantes.
Mais ce petit livre de 175 pages reflète un point de vue et une réflexion « de l’intérieur » de la part d’un acteur et observateur privilégié de l’école, Moussa Sissoko, qui travaille dans l’enseignement depuis plusieurs années, et qui est aujourd’hui le proviseur du Lycée public de Djenné, dans la région de Mopti. Il sera d’une grande utilité surtout aux parents d’élèves, mais aussi aux chercheurs et à tous ceux qui cherchent les solutions aux difficultés de l’école malienne.
Et puisque l’ambition affichée de l’auteur est de susciter le débat, d’autres acteurs de l’école devraient s’en inspirer pour témoigner, écrire, proposer des solutions. Plus il y aura des gens qui se donneront la peine de réfléchir sur l’école malienne en crise, plus cette école aura peut-être la chance d’être sauvée.
Source : benbere