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Les griefs de Tiébilé Dramé contre le regime d’IBK

Le Président du Parti pour la Renaissance Nationale (Parena), l’ancien ministre Tiébilé Dramé, directeur de campagne du candidat Soumaïla Cissé à la présidentielle de 2018 était l’invité du débat de BBC-Afrique, le samedi 13 octobre 2018. Durant plus de 50 minutes de débat, l’opposant Tiébilé Dramé a brossé la situation qui prévaut aujourd’hui au Mali. De la création du Front pour la Sauvegarde de la Démocratie (FSD), le 6 octobre 2018 à la violation des droits de l’homme en passant par l’insécurité, la grogne sociale et les irrégularités qui ont émaillé le scrutin présidentiel du 29 juillet et du 12 août 2018, Tiébilé Dramé a mis l’accent sur les défis auxquels le Mali est confronté. Au cours de ce débat, il a dénoncé les « tares » du régime d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK).

« les signes distinctifs du régime d’IBK, c’est l’autisme, c’est le manque de dialogue, c’est le manque d’écoute sinon les agents de santé n’auraient pas fait plus de deux mois de grève l’année dernière occasionnant de nombreux morts dans les hôpitaux et dans les centres de santé, sinon les magistrats ne seraient pas à plus de 80 jours de grève », a-t-il dit.
« Quant les conditions sont réunies pour que ces possibilités n’existent plus, que le peuple ne peut pas choisir librement ses dirigeants, je crois que l’essentiel est en cause. L’élection présidentielle 2018 n’a absolument rien résolu au Mali parce que l’immense aspiration du peuple malien à l’alternance et au changement a été bloquée, sabotée et confisquée par les tenants d’un pouvoir. Les vrais détenteurs du pouvoir à Bamako avaient envisagé de faire gagner le candidat Ibrahim Boubacar Keïta dès le premier tour avec 53% des voix. Ce projet a été mis en échec sous la forte pression des représentants des puissances étrangères et de la communauté internationale qui ont dit au président et aux vrais détenteurs qu’il est impossible qu’il gagne au premier tour. Finalement, ils ont renoncé à leur projet. Dès lors, tous les chiffres sont factices.

Ce qui s’est passé au Mali le 29 juillet et le 12 août ne ressemble pas à une élection. Il y a eu travestissement de la volonté populaire dans ce pays où la démocratie a été conquise de haute lutte et dans le sang, malheureusement plus d’un ¼ de siècle, elle est foulée au pied, c’est la raison pour laquelle nous disons que l’essentiel est en cause. C’est rare, unique, sans précédent dans l’histoire politique du Mali, du Soudan à nos jours, il y a eu, semaine après semaine, des manifestations à Bamako, à l’intérieur et à l’extérieur du pays, comme un seul homme, dans un sursaut collectif, les Maliens se sont levés pour défendre la démocratie, se sont dressés contre le hold up électoral. A Paris, à Barcelone, à New-York, à Washington, à Abidjan, à Dakar, dans une trentaine de localité à l’intérieur du pays, même dans les villages, dans un mouvement d’ensemble unique, je crois qu’il y a une nouvelle conscience démocratique qui est en train d’émerger aujourd’hui, il est important que ceux qui ont triché l’élection présidentielle et nos amis de la communauté internationale y prêtent attention parce que les Maliens ne sont prêts à baisser les bras.

Nous sommes retournés à des décennies en arrière dans ce pays. Figurez-vous que des hommes cagoulés procèdent à des enlèvements nocturnes, à des détentions dans des prisons secrètes en violation du droit élémentaire, que certains de ces détenus aient été soumis à des tortures, à des actes cruels inhumains ou dégradants dans ce Mali, que le délai de garde à vue est dépassé de plusieurs semaines, c’est incroyable. Attendons la fin de ce mouvement des magistrats, nous n’allons pas céder un centimètre carré des droits démocratiques du peuple malien. Le président de fait était à New-York pour prendre la parole en marge de l’Assemblée générale participant à une réunion spéciale sur le Mali et le Sahel. Et au cours de cette réunion, les partenaires du Mali, les membres du conseil de sécurité ont insisté pour que soit conclu courant de ce mois d’octobre, un pacte pour la paix dont le principal objectif est de réviser la constitution malienne en vue d’inclure les dispositions de l’accord d’Alger. Vous vous souvenez l’année dernière, ce président, avec toute la légitimité qu’il avait, n’était pas contesté a essayé de réviser la constitution démocratique du Mali, il y a eu toute la résistance populaire à laquelle il a eu à faire face dans le cadre du mouvement Antè Abana. Quand il avait la légitimité, il n’a pas pu réviser la constitution, or, il a annoncé à New-York, que malgré les réticences, il va réviser la constitution. Vous croyez qu’il y avait beaucoup de personnes dans les allées des Nations Unies à croire qu’un président contesté sans légitimité démocratique peut réviser une constitution démocratique à laquelle le peuple malien tient comme la prunelle de ses yeux ?

Il n’y a pas de jour où le sang ne coule pas au Mali
Les magistrats sont en grève depuis plus de 80 jours, les écoles privées n’ont pas encore ouverts l’année scolaire 2018-2019 par ce que ce pays est confronté à un réel malaise social, à une gronde sociale même. C’est justement à cause de tous ces défis que le pays avait besoin d’un pouvoir légitime. Comment un pouvoir qui est contesté, qui n’a pas la légitimité démocratique, comment un tel pouvoir peut gérer les immenses défis auxquels le pays est confronté. « Elle est aujourd’hui plus grave qu’elle n’était au moment de l’accession d’Ibrahim Boubacar Keita au pouvoir. Devant toutes ces réalités, qui pourrait sérieusement croire, qu’un tel président aujourd’hui contesté avec un déficit démocratique, un déficit de légitimité pourrait conduire le Mali hors de ses zones de turbulence? Je crois que beaucoup se font des illusions mais beaucoup reviendront très vite de leurs illusions. Il n’y a pas eu de main tendue, il a fait un discours en français à l’attention de la communauté internationale mais en Bambara, il s’est mis à menacer ses opposants. Franchement c’est triste pour notre pays. De toutes les façons il n’a pas de main à tendre, il n’a pas été élu. Il n’y a pas de dialogue dans ce pays. Vous savez les signes distinctifs du régime d’IBK, c’est l’autisme, c’est le manque de dialogue, c’est le manque d’écoute sinon les agents de santé n’auraient pas fait plus de deux mois de grève l’année dernière occasionnant de nombreux morts dans les hôpitaux et dans les centres de santé, sinon les magistrats ne seraient pas à plus de 80 jours de grève. Même avant-hier des jeunes soldats maliens sont morts. C’est le quotidien des soldats maliens. Le secrétaire général de l’ONU qui, n’étant pas un opposant à ce que je sache, a dit qu’en trois mois il y a eu 300 morts. Vous imaginez combien cela fait ? Et ça continue, ça s’est même aggravé depuis. Un président qui n’a pas eu de bilan pendant cinq ans, croyez-vous qu’il va en avoir dans des conditions où sa légitimité est remise en cause, où il est contesté, où il n’est pas accepté ? Non je crois qu’un jour ou l’autre la raison prévaudra, un jour ou l’autre la raison l’emportera dans ce pays. D’autant plus que la détermination du peuple est grande. Les forces démocratiques ne lâchent pas prise, ils continuent à se mobiliser ».

Source: Le Prétoire

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