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Le mot « Grin » viendrait du nom d’un journal

Le saviez-vous ?

Le mot « Grin » viendrait du nom d’un journal

Mode de rencontre spécifique aux habitudes de la société malienne, Le Grin est un cadre de regroupement, d’échanges et de convivialité. Il se forme au coin des rues surtout, et rassemble le plus souvent, les personnes d’une même génération autour d’un thé ou d’un jeu de société. On y papote, on y rit, on s’y distrait, on y traite des affaires, on y noue des relations fructueuses. Ce mot, qui n’existe pas dans le dictionnaire français, a une origine très peu connue. Pour avoir plus de précisions sur la chose, nous avons approché quelques traditionalistes et hommes de culture maliens.  

 

Du thé, des jeux et du fou de rire, des discussions sur la vie ou autour de l’actualité nationale et internationale : voilà les ingrédients constitutifs des grins bamakois. C’est un lieu habituel de rencontre et de causerie. L’on peut l’apercevoir dans tous les quartiers de la ville, aux devantures des concessions, des boutiques etc. L’habitude du grin existe au Mali depuis fort longtemps. Antérieurement, dans la société traditionnelle, les gens (surtout les aînés) se retrouvaient sous l’arbre à palabres sur le « gwélé » pour parler de tout et de rien. Cet us survit encore dans nos terroirs.

Quant au grin format actuel, il aurait fait son apparition chez nous depuis les années 1900. Il représente, en quelque sorte, l’originalité de la vie sociale et culturelle malienne. De nos jours, le fait d’aller ou de former un grin a perdu une partie de sa singularité. Cela, à cause de la jeune génération qui n’en fait pas toujours bon usage.

Mais, d’où nous vient ce vocable atypique de « Grin » qui s’est généralisé et s’est ancré de manière indélébile dans le parler malien ?

D’après Magma Gabrièl Konaté, éminent homme de culture, l’origine du mot « Grin » remonte jusqu’au temps du président Modibo Keïta.  Grin, explique-t-il, vient du nom d’un journal « La gazette du Gringoire », un hebdomadaire politique et littéraire français fondé en 1928. Auparavant, les Maliens instruits se regroupaient en un lieu pour lire ce journal et décortiquer l’actualité. C’est de là que vient le terme « Je vais au grin ».  La même explication est fournie par Ali Ben Boubacar Koïta, spécialiste de la communication et grand connaisseur des us et coutumes du Mali. Selon lui, le grin est un véritablement lieu de rencontre à caractère informel. Tous types de débats y sont abordés : faits divers, chômage, mauvaise gouvernance etc.

Former un grin est une pratique qui se trouve ancrée dans les habitudes de la plupart des Maliens. Ce faisant, à Bamako, on peut voir des grins de jeunes, de vieux, de femmes, des grins mixtes etc. Appartenir à un grin est devenu un fait qui s’est incrusté dans les mœurs de notre société. Beaucoup y consacrent un moment de leur temps. Il permet aux uns et aux autres de se divertir ou s’informer des actualités de l’heure. Facteur de solidarité et de cohésion sociale, le grin crée des liens qui deviennent très souvent indissolubles. L’on peut voir les membres d’un même grin se cotiser régulièrement pour faire face à certains événements sociaux comme le mariage, le décès et les fêtes. Le grin a une dimension intégratrice : il n’exige aucune distinction de race ou de classe sociale.

En revanche, les groupes de causerie formés par les jeunes, sont de moins en moins bien perçus par les seniors. La nouvelle génération a changé les codes et le sens du grin, au point de lui donner mauvaise presse. Grin de jeunes est à présent synonyme de délinquance ou de mauvaise éducation. Cela, parce que les jeunes garçons et filles ont fait des grins un lieu de débauche, un espace dédié à la fainéantise et aux actions scabreuses, un lieu de conflit, parfois même de repaires d’assassins. Prendre la chaise et faire du thé dans les rues est devenu le quotidien de beaucoup de jeunes maliens. Cette situation est un autre phénomène social existant au Mali, dont la gestion se doit d’être prise en compte.

Fatoumata Boba Doumbia

Source: Les Échos Mali

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