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Le Général Sanogo, lors de la rencontre avec les mutins : «J’ai avec moi, l’opération SERVAL, la MINUSMA, la DGSE, la police, la gendarmerie… »

Les faits ici rapportés remontent dans la soirée du 30 septembre au 1er Octobre dernier, quelques heures après la mutinerie des éléments du camp «Soundjata Keïta» de Kati. Après plusieurs tentatives, le Général Sanogo parvint enfin à obtenir un entretien avec les mutins dans sa résidence sise à Kati. La tension est montée plusieurs fois d’un cran entre les visiteurs et leur hôte du jour.

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Capitaine Amadou Haya Sanogo

Rappelons que le pourparler en question précède la rencontre avec le ministre Soumeylou Boubèye Maïga. Nous avions pu obtenir une partie des différents enregistrements sonores, à savoir, la rencontre d’avec le Général Haya et celle avec le ministre de la défense Soumeylou Boubeye Maïga.

 

Un intervenant s’adressant au Général : je souhaite, dans nos débats,  que l’on mette de côté toutes les fraternités (les considérations de grand-frère et de parenté…) Que l’on parle franchement !

 

 

Le Général Sanogo : … Eh Caporal ! Si c’est comme cela que tu parles, tu sors de chez moi ! On ne m’a pas appelé pour négocier ! Je ne suis pas là pour négocier… Si c’est comme çà, tu sors ! Je vous ai appelé, c’est vrai…

 

Un intervenant s’adressant au Général : C’est vrai, mon Général… Ca va ! C’est bon c’est bon…

Le Général Sanogo : Ecoutez-là ! Je vous connais tous ! Arrêtons les « mana-mana –kan » [des élucubrations]… Je vous ai prévenus pendant la journée…  A vous dire vrai, moi j’en ai fini (je n’ai pas de souci)… Avec un seul coup de fil et vous allez-vous rendre compte et…  Almamouye, tais-toi et écoute ! Tu en sais bien  quelque chose !!! On ne m’intimide pas moi ! Je suis là et j’y reste ! Arrêtons donc ces élucubrations «mana-mana –kan ». Est-ce qu’on s’est bien compris ? Moi, on ne m’intimide pas ! Est-ce qu’on s’est bien compris ?

 

[A  l’unisson] : Oui, oui… !

Le Général Sanogo : On ne m’intimide pas et je ne pense pas que vous soyez venus pour ce faire! Caporal, est-ce que tu m’as compris !

 

Le Caporal : bien !

Le Général Sanogo : Non, il faut que l’on se dise la vérité… J’ai déjà pris toutes les dispositions…

 

Depuis ce matin, je suis en train de dire ceci  à mes hommes : que  personne ne réagisse… Mais ne pensez-vous étrange qu’il n’y ait  aucune réaction suite à votre attitude de ce matin ?  Ne pensez surtout pas que je n’ai personne avec moi ; que je suis seul ! Détrompez-vous ! J’ai SERVAL qui est prêt ! J’ai la MINUSMA qui est prête ! La DGSE arrive ! La police arrive ! La gendarmerie arrive !… Mais j’ai dit non : pas d’intervention avant mon appel ! Ne rendez donc pas les choses difficiles ! Maintenant je vous écoute et…

 

(Des murmures) :

 

Le Général Sanogo : Youssouf, je suis déçu Mais… (…)

 

[Murmures  et cacophonie]

 

Le Général Sanogo : Tu ne veux pas te lever ? Si tu ne te lèves pas, tu sors !

 

[Murmures et cacophonie]

 

Le Général Sanogo : Maintenant, tout le monde m’écoute ! Je suis Gé…

[Murmures et cacophonie]

 

Un intervenant: Au fait, il s’agit de mon élément et…

 

Le Général Sanogo : Il ne s’agit pas d’une question d’élément. Autrement, vous allez sortir d’ici et  consulter vos éléments  dehors! Tout de suite !

 

Un participant s’adresse à l’intervenant : Caporal, on n’est pas venu pour çà !

 

Le Général Sanogo  : Laissez-nous respirer à la fin ! C’est moi qui vous ai appelé afin qu’on se comprenne !

 

[Murmures et cacophonie]

 

Un participant s’adresse à  intervenant : Mets-toi au gardez-vous !

Le Général Sanogo : Maintenant parle ! Mais tu te mets au gardez-vous avant de prendre la parole… Je suis Général de ce pays !

 

L’ intervenant se présente : Caporal Chacka Traoré !

 

Le Général Sanogo : Repos ! Maintenant, parlez ! De quoi s’agit-il ?

 

Caporal Chacka Traoré : Nos conditions ne sont guère meilleures…

 

Le Général Sanogo : Quelles conditions ?

 

Caporal Chaka Traoré : Je veux parler du peloton. Il n’y en a pas eu depuis le coup d’Etat. Primo ! Et deuxièmement, ceux qui ont fait le coup d’Etat et j’en fais partie… Tout le monde le sait ici. Et si on doit le refaire, je m’engagerai… Mais depuis le coup d’Etat, toi et moi, on ne s’est vu si ce n’est aujourd’hui ! Nous, nous n’avions rien bénéficié de ce coup d’Etat… Rien, absolument rien ! Nous sommes là aujourd’hui au nom de nos camarades… Nos positions ne sont pas du tout satisfaisantes ; pas du tout !

 

Le Général Sanogo : Quelles positions ! Parle, parle !

 

Caporal Chacka Traoré : Je l’ai dit : il y a le problème de peloton, de salaires, des conditions de vie militaire… Rien n’est réglé, pour nous, en tout cas!

 

Le Général Sanogo : Ca c’est pour toi !

 

Caporal Chacka Traoré : Non, pas pour moi, mais pour tout le monde (djama) !

 

Le Général Sanogo : D’accord ! Tu peux  te rasseoir ! Quelqu’un d’autre a-t-il quelque chose à dire au nom de tout le monde [Djama]?

 

Un intervenant se présente : Caporal Fané !

 

Caporal Chacka Traoré : Moi, je suis son adjoint [au caporal Fané]… Euh… Toujours par rapport à nos points, nous avons un petit du nom de Lynx (?)… Il sera acquitté d’emblée et…

 

Le Général Sanogo : Qui va l’acquitter?

 

Caporal Chacka : En tout cas, ici, il ne sera pas poursuivi!  Il ne sera poursuivi pour quoi que ce soit ! Et Tertio ; nous souhaitons  que quelqu’un d’autre soit à la tête du comité de reforme et de suivi… Que toi, tu le quittes définitivement !  Telles sont  nos doléances !

 

Le Général Sanogo : J’ai compris !

 Un intervenant se présente  : Lassine Keïta…  : Tout va bien, il n’y a rien de grave ! Nous sommes tous les mêmes !    Il n’y a pas de petites causes [allusion faite à cause-effet]… Si  vous, aujourd’hui êtes ce jour, à ce niveau, c’est grâce à nous. Quand je dis «nous», ce n’est nullement par mépris. Que Dieu fasse que vous en tirez du bonheur.  Quant à nous, gens d’en bas (hommes de rangs), ne nous oublie pas, jette un regard rétrospectif sur  nous autres … Il se passe beaucoup de choses aujourd’hui ! Mais, bien évidemment, en ce qui concerne les militaires, il est bien plus facile de parler… L’on sait cependant que sont également concernés,  policiers, Gendarmes,  gardes … Mais il s’agit toujours de militaires à proprement parler ! L’on ne se considère pas comme seuls, mais nul ne sait comment tout cela va se terminer !

 

(…) Notre intention n’est nullement orientée vers le mal ! Nous sommes tous les mêmes ! Personnellement, tout le monde me connaît ici. Il n’y pas un seul homme ici qui a pu transporter les victimes du palais… C’est moi Lassine Keïta qui l’a fait ! (…). La seule chose que l’on vous demande, , c’est de jeter un regard rétrospectif sur nous ! La fatigue revient toujours aux danseurs et non aux joueurs de tam-tam  [proverbe bambara]§  Notre seul souhait est que tous ceux-là qui sont au dessus et en dessous de nous y trouvent leurs comptes. Les choses sont vraiment difficiles…

 

Le Général Sanogo : J’ai compris !… Si je comprends bien, tous  les problèmes se résument en quelque sorte [en français]. Est-ce qu’on s’est compris ?…

 

Un intervenant : Ma femme a été blessée lors des événements (un bras fracturé) et elle n’a absolument rien obtenu… (…).

Le Général Sanogo : S’il s’agit de la question de peloton, on ne trompe pas le soldat parce qu’on avait fini avec…

 

[Interrompu par un intervenant] (…)

Le Général Sanogo : Je crois que je vous avais déjà donné la parole… N’est-ce pas Rougeaud ? Ne vous avais-je pas donné la parole ? Toi tu dois être fier. Va donc demander ton frère ! C’est moi qui essaie, en ce moment, de le réhabiliter,  de le nommer au grade supérieur, de lui accorder une pension afin qu’il ne reste pas dans cet état. Je ne dois pas te dire cela. Il s’agit de ton frère Bordeaux ! C’est moi qui suis en train de le réhabiliter ;  de le faire grader et de lui accorder des pensions  d’ancienneté et d’invalidité ! C’est moi qui suis en train de faire tout cela ! « Bordeaux » t’en voudra s’il t’entendait parler de la sorte !

 

(…) J’ai dit au SEGAL et il devrait tirer les documents ce matin (il m’a quitté ici hier  à 22 heures)… Il devrait donc m’amener les papiers ce matin et alors, je les transmettrai à Boubèye. A mon humble avis, tout ce qui se passe là manque quelque peu de sérieux.   Hormis cela, laissez-moi vous dire une chose, et ce n’est pas une tentative d’intimidation… L’on est cependant obligé, à un certain moment, de procéder à un nettoyage…

 

J’ai appelé le président [de la République]  et je lui ai dit que ce n’est pas le Général, mais des  militaires qui se rebellent. J’ai toutes les forces et toutes les dispositions réunies tout de suite… Je n’attendais que votre entretien que j’ai sollicité de midi jusqu’à 14H ! Vrai ou faux ? Jusqu’à 14 H !

 

Mon frère ! On attend très longtemps avant d’entendre la narration de faits graves survenus dans une  cité, mais celui à qui la longévité a été accordée le fera un jour [proverbe bambara]. Ceci est une autre histoire…

 

(…)  Je sais que vous avez amené des BRDM et des chars ! Tant mieux, il n’y a pas de problème ! Mais moi, j’ai l’opération SERVAL qui est prête à sévir et elle n’attend que mon appel. Cette histoire aussi, on la racontera un jour [à la postérité]. Mais j’ai estimé que l’on ne doit pas en arriver là puisqu’il s’agit de jeunes qu’il faille écouter. Et je vous ai appelé trois fois de suite pour ce faire !

 

Maintenant, je m’en vais vous laisser partir. Mais par rapport au peloton, je vous demanderai de ne pas vous mêler de cette affaire. On a déjà fait le travail ! Quant aux grades, nous prendrons en compte l’avis de tous ceux qui se sentiront lésés. Par rapport aux salaires, vous n’en percevrez pas plus que les autres parce que vous n’êtes pas plus militaires que les autres ! C’est une honte qu’au  moment où nous, nous sommes en train d’ouvrir le feu ici sur nous mêmes, que nos autres camarades le fassent à Kidal  sur l’ennemi! C’est une honte !… (…)

 

[Le Général s’adressant à un des intervenants] : Toi, tu as passé vingt minutes avec le téléphone à l’oreille… Nous avions écouté toutes tes communications…

 

L’intervenant : Il n’y a pas de problème et…

 

Le Général Sanogo : Ce n’est pas une question de problème ! Ecoute Ganda-Koy, toi tu me connais, et je te connais ! Mais nous n’en sommes pas là ! Moi, je suis en train de vous donner une chance… Vous êtes encore jeunes …

 

Maintenant, quant à l’élément qui a tiré sur le colonel… Je vais vous dire une chose : Il peut y avoir une solution.  Et c’est celle-ci : le SEGAL va à l’hôpital tout de suite, c’est-à-dire, dès que vous auriez quitté cet endroit. Dieu fasse qu’il ne lui arrive pire. Et si les choses se passaient ainsi, je vous donne ma parole que rien n’arrivera à votre élément… (…).

 

En deuxième lieu, vous devrez faire rentrer les engins que vous aviez fait sortir. Je laisse la commande et tu vas appeler Ouedrago pour lui dire que les engins ont rejoint leurs positions ! Cette question est close !

Par rapport au SEGAL, j’insiste : S’il ne lui arrive rien du tout, le garçon sera alors épargné…

Propos traduits et transcrits par B.S. Diarra

SOURCE: Maliba Info

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