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La guerre de la France au Mali a désormais ses images

Un soldat français se tient prêt à tirer près de Gao. Le 21 février 2013. (STR/AP/Sipa)

Un soldat français se tient prêt à tirer près de Gao. Le 21 février 2013. (STR/AP/Sipa)

Mais elles proviennent de l’armée française, ou de journalistes embarqués avec des unités de celle-ci.

Guerre sans journalistes»«guerre sans images»… Depuis le début de l’intervention française au Mali le 11 janvier 2013, de nombreux journalistes et médias critiquent le manque d’accès qui leur est donné aux zones de combats et le peu d’informations que le ministère de la Défense laisse filtrer sur les opérations en cours.

Tandis que les journalistes se voyaient refuser l’accès aux zones de combat au début de l’intervention, l’armée diffusait surtout des images de convois, de missions de reconnaissance ou encore de frappes aériennes au cours du premier mois et demi du conflit. Bien sûr, il faut garder à l’esprit que les djihadistes ont bien souvent choisi l’évitement face aux avancées de l’armée française, et que la prise de Tombouctou par exemple, annoncée comme difficile, s’est effectuée sans résistance, expliquant alors l’absence d’images d’affrontements à cet endroit.

Il a fallu attendre le début du mois de mars pour que le ministère de l’Intérieur se décide à montrer des soldats français en action. Le 1er mars, l’armée française publie ainsi cette vidéo montrant la force de réaction rapide (QRF) du groupement tactique interarmes (GTIA) 2 intervenir «en appui des forces armées maliennes au contact avec des groupes terroristes infiltrés dans la ville de Gao» le 21 février:

Ces premières images de combats violents dépeignent une phase de la guerre qui est depuis terminée, celle de la reprise et de la sécurisation des principales villes de la région.

Le lendemain, le 2 mars, l’armée publie une autre vidéo assez impressionnante d’une «phase de reconnaissance offensive en véhicule blindés et à pieds du GTIA 3» (groupement tactique interarmes 3) et surtout d’une «prise à parti dans la région de l’Adrar des Ifhôgas et riposte avec appui mortier, canon Caesar et aviation»datant du 26 février:

Ces premières images de l’armée française «dans le feu de l’action»près de Tessalit dans l’Adrar des Ifoghas (le sanctuaire des islamistes du Mali) ont été décortiquées par Michel Goya, auteur du blog La Voie de l’Epée, sur le site Alliance Géostratégique dans un billet très instructif et détaillé intitulé «Mali: arrêt sur deux minutes de guerre», et par le service de communication du ministère lui-même lors de son point presse hebdomadaire jeudi 7 mars.

Le 5 mars, c’est la section d’appui du 1er régiment de chasseurs parachutistes (RCP) que le ministère de la Défense nous propose de suivre alors qu’elle est «au contact» des combattants islamistes, toujours dans les Ifoghas:

Toutes ces images donnent au grand public une idée concrète du type de combats qui se déroulent dans le nord du Mali, mais elles restent des images prises par les équipes de communication de l’armée française. Il a en effet fallu attendre le premier week-end de mars pour que les premiers journalistes soient invités à accompagner les militaires français dans la région des Ifoghas où se déroulent les combats décisifs. Dans Le Point, le journaliste spécialiste de la défense Jean Guisnel écrivait que cette bonne nouvelle pour l’information de la population arrivait bien tard, les combats ayant commencé dans la région le 18 février.

Le premier reportage de journaliste en provenance de la région des Ifoghas est diffusé le 7 mars par France 24. Son envoyé spécial Matthieu Mabin, un des rares journalistes à avoir été «embeddé» avec l’armée française sur cette zone, y suit les légionnaires parachutistes dans leurs patrouilles:

Jean-Philippe Rémy, autre journaliste embarqué avec les légionnaires français dans la vallée d’Amettetaï, a publié un reportage accompagné d’un diaporama photo dans Le Monde le 8 mars. Côté radio, et afin de satisfaire tous les supports médias traditionnels (pas de trace de journalistes Web), l’heureux élu est Didier François d’Europe 1.

Si l’armée française a donc adopté la pratique des «journalistes embarqués» («embedded»), institutionnalisée par les Etats-Unis lors de la guerre d’Irak, l’ampleur de son programme d’accueil des médias au sein de ses unités est encore bien restreinte. En comparaison, 755 journalistes étaient embarqués auprès de l’armée américaine en Irak en mars 2003 au début de la guerre, qui était certes d’une ampleur incomparable à l’opération Serval (près de 100.000 soldats américains au moment de l’invasion en Irak contre moins de 5.000 Français au Mali).

Quel que soit leur nombre, ces journalistes restent soumis au contrôle strict de l’armée qui les accueille, et donnent eux aussi une vision du conflit à travers le prisme de celle-ci.

Des images aussi venus des djihadistes

N’y a-t-il que des images contrôlées de près ou de loin par l’armée française nous parvenant du Mali? Le site mauritanien Alakhbar, un site aux informations généralement fiables avec un accès privilégié aux groupes islamistes qui opèrent dans le Sahara, a publié jeudi 14 mars une vidéo et des photos des «derniers bastions d’Aqmi» dans un environnement qui ressemble à celui des Ifoghas avec le commentaire suivant:

«Des photos et vidéos exclusives obtenues par Alakhbar aident à mieux comprendre la scène des opérations. Il en ressort que les combattants peuvent avoir accès à plusieurs sources d’eau. Ils peuvent également compter, dans leur nourriture, sur le potentiel animal dans la zone.»

Philippe Chapleau, qui tient le blog Lignes de Défense sur le site de Ouest France, précise que les images «ne sont ni datées ni localisées et elles montrent par exemple Abou Zeid dont la mort, dans les Ifoghas, n’a toujours pas été confirmée». Il date «les images de tirs au début de la vidéo de mars 2012, lors de la capture de Kidal».

On y voit également deux otages espagnols, identifiés par Philippe Chapleau comme «Albert Vilalta et Roque Pascual enlevés fin 2009 en Mauritanie». Interrogé sur l’authenticité et le contenu de cette vidéo, le ministère de la Défense n’a pas souhaité faire de commentaire.

Grégoire Fleurot slate.fr/

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