Neuf suspects ont éré arrêtés après l’assassinat des deux journalistes de RFI : Ghislaine Dupont et Claude Verlon (Mali : la vérité assassinée). Ces suspects ont été interpelés par des agents français. Les personnes interpelées par les forces françaises, pays signataire de cette Convention, puis remises aux autorités maliennes, se sont donc retrouvées, à un moment donné, placées sous la surveillance et le contrôle d’une autorité soumise au respect de cette convention. La France ne l’a pas respectée.
Il existe un doute sur la conformité de cette remise de suspects, au regard de l’article 3 de la convention, sachant que ces suspects risquent de subir des traitements inhumains et dégradants :
Article 3 – Interdiction de la torture : ” Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ”
L’actualité témoigne d’une violation notoire de cet article 3 – prohibant la torture – au Mali :
Au Mali, l’armée torture et tue parfois, des soldats français l’ont vu …
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Au Mali, de nouvelles exactions font craindre des violences
Des soldats maliens torturent Arabes et Touareg
La Cour européenne de Strasbourg juge incompatible la remise d’une personne en cas de doute sur le respect des droits de l’Homme et elle a récemment interdit à la France la remise d’un jihadiste au Maroc qui le réclamait :
Risquant la torture, un jihadiste ne sera pas extradé au Maroc
La remise des “suspects” par la France au Mali est dès lors elle-même très suspecte ; d’autant que, selon les deux parties opposées, c’est la France qui contrôle KIDAL, où les deux journalistes de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, ont été assassinés le 3 novembre dernier :
” Selon un de ses représentants contacté par Afrik.com, Kidal n’est « plus contrôlée par le MNLA depuis le mois de juillet dernier. Nous aussi, comme l’armée malienne, sommes cantonnés à un périmètre bien précis que nous ne pouvons pas dépasser » ” (Afrik. com “Mali : pourquoi la France tient à “contrôler seule” Kidal” samedi 9 novembre 2013 / par Abubakr Diallo, Assanatou Baldé).
La remise s’imposait d’autant moins que, selon les articles 113-7 et 113-8 du code pénal, ces ” suspects ” auraient pu faire l’objet d’une demande d’extradition, à l’initiative du Parquet, afin d’être jugés en France. Pourquoi cela n’a-t-il pas été fait ?
Pourquoi, dans ces conditions, la France a-t-elle alors remis les suspects au Mali, en connaissance des risques de tortures voir de mort des suspects ?
Une telle décision obère donc très gravement la possibilité de s’assurer d’une procédure régulière et de connaître la vérité sur l’assassinat des deux journalistes, sous contrôle français, comme l’établit l’arrestation et l’interrogatoire des neufs suspects.
Cela pose d’autant plus question que le MNLA déclare être disposé à faire des gestes en direction du gouvernement malien : Mali: le MNLA annonce qu’il va rendre au gouvernement des lieux stratégiques de KIDAL (RFI) ; malgré de graves tensions : Accrochage meurtrier dans le nord du Mali : les versions divergent (RFI).
Cette remise des personnes au gouvernement malien par la France, en l’état du droit et de l’actualité, tant de la CEDH que factuelle, révèle une mauvaise foi des autorités françaises.
Ce comportement a pour conséquences prévisibles de faire obstacle à la manifestation de la vérité, au respect de la dignité humaine et au droit à un procès équitable.
Selon l’application extraterritoriale de la Convention européenne des droits de l’Homme, les personnes interpelées peuvent désormais saisir la Cour européenne des droits de l’Homme de Strasbourg en cas de traitements indignes et dégradants, à propos desquels existent des soupçons très sérieux.
Source : Mediapart