Après la proclamation des résultats provisoires par le ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation, le jeudi 17 aout, la Cour Constitutionnelle a rendu son verdict. Par décision en date du lundi 20 août 2018, elle a proclamé les résultats définitifs du deuxième tour de l’élection du Président de la République, scrutin du 12 août 2018.
Avec 1.791.926 voix (67,16%), le candidat du Rassemblement pour le Mali (RPM) et de l’Alliance « Ensemble pour le Mali, EPM », Ibrahim Boubacar Keïta dit IBK ou BOUA est déclaré vainqueur devant le candidat de l’Union pour la République et la Démocratie, l’honorable Soumaïla Cissé, qui obtient 876.124 voix soit 32,84%.
Pour le président réélu, Ibrahim Boubacar Keita, dans une déclaration rendue publique ce lundi après midi, « Cette réélection l’oblige. Elle l’oblige envers vous, qui avez voté pour lui, militants et sympathisants de l’Alliance Ensemble pour le Mali, et aussi tous les Maliens qui n’ont pas d’appartenance politique ». À ceux-ci, IBK a adressé ses chaleureux remerciements et félicitations pour cette belle victoire, qui est la leur !
TRIOMPHE MODESTE
Malgré l’ampleur de sa victoire (67,16% des voix), le président Ibrahim Boubacar Keïta en appelle à l’humilité.
Très lucide, le président IBK dit avoir pris la juste mesure « des espoirs et des attentes » de ses compatriotes auxquels, il assure que « cette confiance renouvelée appelle à redoubler d’efforts ».
Réélu pour cinq ans, Ibrahim Boubacar Keïta a adressé un message le lundi 20 août « à tous ceux qui ont porté leurs suffrages sur d’autres candidats » : diversité et pluralisme resteront le ciment de l’unité nationale et le Mali « continuera de reconnaître toutes les sensibilités ».
Le président Ibrahim Boubacar Keïta, qui s’était adressé directement à la jeunesse du Mali à la veille du 2e tour, rappelle son « engagement de faire de (son) prochain mandat le mandat de la jeunesse (…), un mandat de préparation des entrepreneurs, leaders et bâtisseurs du Mali de demain ».
Dans le même message, IBK promet d’être le Président de toutes les Maliennes et de tous les Maliens !
Au nom de tous les Maliens, il a promis de servir le pays selon les principes républicains. Passionnément. Avec dévouement et intégrité. Pour assurer à notre pays la paix, le développement économique et social, et un rayonnement mondial qui lui sied conforme à son attente et digne de son grand destin.
Le président IBK assure avoir pris la juste mesure des espoirs et des attentes des Maliens. Beaucoup reste encore à faire. Pour le Mali, aucun effort ne sera de trop, aucun sacrifice ne sera assez grand. IBK prend l’engagement.
En homme d’État, pétri d’humilité, le président IBK s’adresse ce lundi même 20 aout à la Nation, à l’ensemble des Maliens, mais aussi à son cadet Soumaïla Cissé.
Pour le président réélu, le temps de l’amertume électorale doit être de courte durée. Notre pays, a-t-il dit, a besoin qu’on aille rapidement à l’essentiel. Aussi, appelle-t-il à chacun : l’élection est un temps d’une parenthèse qui doit être la plus courte possible. Le Mali attend, les chantiers sont là et ceux-là qui ont la compétence à aider à faire avancer le Mali y sont attendus donc. Il ne s’agit pas de venir aider IBK, IBK passe. Mais le Mali reste.
Pour le président IBK, « Chacun de nous est appelé au chevet du Mali. Seul, on ne peut pas bâtir le Mali, ce n’est pas entre nos seules mains. Ayons tous pitié de ce pays et donnons-nous la main pour le bâtir ensemble ».
Convaincu que le Mali a besoin de l’apport de tous ses fils, celui qui a toujours prôné la tolérance et l’inclusivité, a dans son adresse solennelle, a tendu une main fraternelle et patriotique à l’Opposition et singulièrement à Soumaïla Cissé :
«A mon jeune frère, Soumaïla Cissé, chef de file de l’opposition républicaine, dit-il dans sa première déclaration prononcée le 20 août dernier, je voudrais tendre la main. Après la bataille électorale, il y a les retrouvailles. Car pour bâtir un avenir de tous les possibles, le Mali doit pouvoir compter sur toutes ses filles et tous ses fils. Chacun aura sa place. La République n’exclura personne. J’en serai le garant»
LA CONTESTATION
Le camp de Soumaïla Cissé, qui a rejeté les résultats provisoires proclamés par le ministère de l’Administration territoriale, rejette l’offre de main tendue et annonce une adresse à la Nation du « président Soumaila Cissé le mercredi, lendemain de la fête ». Objectif : Faire connaitre à l’opinion nationale et internationale sa position sur les résultats du deuxième tour de l’élection présidentielle proclamés par la Cour Constitutionnelle.
L’Opposant, qui se veut républicain, va-t-il réussir à prendre ses distances avec les faucons de son camp ? Rien n’est moins sûr.
Annoncée pour le lendemain de la fête (mercredi) à grand bruit sur les réseaux sociaux par ses partisans, « l’adresse à la nation » de Soumaila a eu lieu finalement ce jeudi 23 août dans l’après-midi, à l’Hôtel Salam.
Qu’est-ce que Soumaïla a dit concrètement ?
Pas grande chose lors de son adresse à la Nation ce jeudi en fin d’après-midi à l’Hôtel Salam. En tout cas, rien de nouveau qu’il n’ait déjà dit ou laissé entendre. La journée supplémentaire de réflexion qu’il s’était donné pour s’adresser aux Maliens n’a pas changé sa prétention, son ambition et sa détermination.
Le vaincu, à l’issue du second tour de la présidentielle tenu le 12 août, campe sur sa position. Pour lui :
1 -C’est lui Soumaïla Cissé qui a gagné ;
2-il y eu la fraude par bourrage des urnes et la manipulation des résultats ;
3-que ces fraudes massives ont été révélées et décriées par les 3/4 des candidats (18/24) ;
4-le fait que la Cour constitutionnelle n’a pas reconnu ces fraudes veut dire qu’elle a pris position pour le régime du président IBK ;
5-que la Cour Constitutionnelle s’est discréditée en se constituant prisonnière volontaire du régime de IBK ;
6- qu’il rejette catégoriquement et sans équivoque les résultats proclamés par la Cour Constitutionnelle ;
7-qu’il ne reconnait pas le Président déclaré élu par la Cour Constitutionnelle ;
8-qu’il ne cédera pas ;
9-qu’il rétablira sa victoire par tous les moyens légaux politiques et pacifiques ;
10- il appelle à la mobilisation générale pour la constitution d’un large front pour la sauvegarde de la démocratie et à une grande marche pacifique « pour imposer sa victoire et s’auto-investir.
L’ENTÊTEMENT
Sur quoi se fonde Soumaila Cissé pour revendiquer la victoire ?
Pour Soumaila Cissé, qui s’est laissé convaincre et abuser par les apprentis sorciers électoraux et des politiciens sans vergogne, les résultats officiels « ne reflètent pas la réalité des urnes, ils ne reflètent pas le vote des Maliens. Ces résultats proclamés par le camp du président sortant résultent d’un trucage monstrueux, d’une manipulation des suffrages des Maliens, d’un bourrage d’urnes d’une autre époque ».
Plus prosaïquement, on a fait croire à Soumaïla Cissé qu’il est le meilleur, que tout le monde l’aime et que tout le monde l’adore, que partout au Mali, c’est pour lui qu’on a voté.
Au résultat : ce n’est pas le cas.
Alors, on lui a dit : président Soumaïla, vous savez si on ne tient pas compte du vote des Maliens du nord, du centre, de Sikasso, Bougouni, Koutiala, Bla, de Ségou, Niono, Macina, Kita (bref toutes les zones CMDT et Office du Niger), c’est toi le vainqueur.
Et puisque, lui, Soumaïla Cissé, ne veut rien savoir et entendre d’autres que : « gagné » et « président ».
Alors, c’est la cocasse histoire des simulations effectuées par la fameuse cellule de centralisation qui n’en pouvait plus… On soustrait ces votes, Soumaïla Cissé brandit ces chiffres tronqués et manipulés, pour dire que c’est lui le vainqueur légitime… avec 51%.
Mais, 51%, c’est au premier tour qu’on doit la brandir, pas au second tour.
Quoiqu’un peu satirique, voilà la seule explication crédible au délire d’un candidat qui n’avait rien et n’a rien réussi pour rallier autour de sa candidature afin de l’emporter.
Dans sa déclaration de ce samedi Soumaila Cissé dit qu’il appelle ses partisans à prendre la rue (avec tous les risques)
-pour la sauvegarde de la démocratie,
-pour le respect du vote des Maliens,
-pour l’éradication de la fraude, de la corruption et de l’achat de conscience dans notre système électoral.
-pour restaurer et renforcer notre démocratie.
Mais à la vérité, ce que veut Soumaila Cissé, c’est le pouvoir. Il veut être président à n’importe quel prix. Ce qu’il n’a pas obtenu par les urnes, il veut l’avoir par la rue.
Par Sidi Dao
Info-matin