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Non reconnaissance des institutions: la voie sans issue

L’Hôtel Salam de Bamako a servi le jeudi 23 aout aout, dans l’après midi, de cadre à la déclaration du candidat Soumaila Cissé suite à la proclamation par la Cour constitutionnelle des résultats définitifs du second tour de la présidentielle. Constant dans son déni, et déterminé dans sa bravade de la légitimité et sa défiance envers la légalité, Soumaila Cissé a fait deux annonces majeures. Il réaffirme son rejet des résultats qu’il estime frauduleux et issus de bourrages d’urnes, d’une part. Tirant, les conséquences de ce rejet, il dit ne pas reconnaitre l’élection du président IBK.

Dans son mépris envers le vote souverain du peuple malien et les lois de la République, Soumaïla Cissé, qui refuse sa défaite, appelle ses partisans à prendre la rue pour marcher, pour imposer sa victoire et pour l’investir lui comme président légitime. Il déclare que la Cour constitutionnelle s’est disqualifiée et qu’il ne reconnait pas le président proclamé vainqueur par la juridiction.
Qu’est-ce que cela peut-il impliquer en terme de stabilité et d’apaisement politique ? Et quelles pourraient être les conséquences de cette position singulière ?
La non reconnaissance des institutions est beaucoup plus une fanfaronnade politique qu’une préoccupation juridique. Parce que la loi est faite pour tous. Nul n’est et ne peut être au-dessus de la loi : « Tous les Maliens naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs. » (article 2 de la Constitution) ; « La défense de la patrie est un devoir pour tout citoyen » (article 22 de la Constitution) ; « Tout citoyen, toute personne habitant le territoire malien a le devoir de respecter en toutes circonstances la Constitution. » (article 24 de la Constitution).

UNE VOIE SANS ISSUE
Le respect de la Constitution (pour le maintien de laquelle Soumaila Cissé a battu le pavé) implique le respect de la République et des institutions que celle-ci proclame. Dès lors, on ne peut pas se proclamer républicain et refuser de reconnaitre les institutions de la République. A moins de sortir de la République, de s’auto-exclure… Comme le Collectif des partis politiques de l’Opposition (COPPO) en 1997. Avec les conséquences DÉSASTREUSES qu’on sait.
Soumaila Cissé, plus que tout autre devrait savoir qu’il est dans une voie sans issue. A moins que l’objectif de sa hargne est de crier fort en mettant suffisamment de pression sur « son grand frère » pour être remboursé de ses dépenses de campagne. Sinon, la grande crise électorale et politique de 1997 née de la non reconnaissance des institutions par le Collectif des partis politiques de l’Opposition (COPPO) devrait l’inspirer.
Comment, en effet, Soumaila Cissé peut-il aujourd’hui, espérer, qu’il est libre de refuser de reconnaitre les décisions d’une Cour constitutionnelle, et s’attendre que les autres institutions à travers la Cour suprême lui déballent le tapis rouge pour son investiture ?
Au-delà de la solidarité institutionnelle dès lors que Soumaïla dit que la Cour constitutionnelle s’est discréditée et qu’il ne reconnait pas sa décision, on peut se demander sur quelle base la Cour suprême du Mali va-t-elle accepter d’investir un président sans aucune base légale et sans aucune légitimité.
A l’appui de sa contestation, Soumaila Cissé et ses partisans font une lecture sélective de la Constitution et des lois tout comme ils l’ont fait pour les résultats. C’est à dire ils prennent ce qui les arrangent et laissent le reste.
Pour motiver son refus de reconnaitre le président réélu, le camp Soumaïla Cissé fait recours à l’article 121 de la Constitution.
Cet article dit en gros que:
Le peuple a le droit à la désobéissance civile pour la préservation de la forme républicaine de l’Etat. Tout coup d’Etat ou putsch est un crime imprescriptible contre le peuple malien.
Assimilant ce qu’ils appellent fraudes et bourrages d’urnes à un coup d’Etat électoral, Soumaila Cissé appelle ses partisans à aller au-delà de « la désobéissance civile » à la résistance pacifique, « même violente, s’il y a lieu » selon les propos de Me Demba Traoré.
En optant pour la non reconnaissance du président réélu et pour la rue, non seulement Soumaila Cissé veut ouvrir une crise politique artificielle mais se met en dehors des lois et de la Constitution de la République qu’il brandit comme alibi.
Parce que c’est cette même Constitution de la 3ème République qui :
-dit dans son article 85 que : « La Cour Constitutionnelle est juge de la constitutionnalité des lois et elle garantit les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques. Elle est l’organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l’activité des Pouvoirs Publics ».
-qui ajoute dans son article 94 que « Les décisions de la Cour Constitutionnelle … s’imposent aux pouvoirs publics, à toutes les autorités administratives et juridictionnelles et à toutes les personnes physiques et morales. » (A noter que : les personnes morales, ce sont les autorités publiques et privées et les personnes physiques : ce sont les citoyens comme vous et moi.)
Pour les citoyens que nous sommes tous autant que tout autre habitant (même non Malien qui habite au Mali) la Constitution impose à son article 24 : « respecter en toutes circonstances la constitution ».
Or, rejetant la décision de la Cour Constitutionnelle qui déclare IBK vainqueur de la présidentielle, Soumaïla Cissé se soustrait de cette obligation constitutionnelle, viole la Constitution et se met hors-la-loi et la République.

QUELLE PERSPECTIVE
Comme en 1997, ceux qui vont suivre aveuglement Soumaila Cissé (dont l’avenir politique doit être désormais conjugué au passé) et se mettre en dehors de la République en refusant de reconnaitre les institutions issues du scrutin, vont être les plus grands perdants.
PARCE QU’ILS S’AUTO-EXCLURONT DE LA RÉPUBLIQUE COMME LE COPPO EN 1997.
Qu’est-ce qui va se passer ?
La République est et reste. La démocratie malienne acquise de haute lutte se poursuivra. Des élections se tiendront, la paix reviendra, la cohésion nationale sera….Ceux qui refuseront d’y être, vont suivre Soumaïla Cissé qui aura 73 ans en 2023 (encore jeune pour être président ?), il s’agiteront, marcheront, « AGeront » , SIT-INeront », ils vont crier, insulter… Après, ils vont se fatiguer…comme le COPPO. Après, ils chercheront à revenir dans le système par la fenêtre. Mais, il sera trop tard.
TROP TARD POUR DE JEUNES CARRIÈRES SACRIFIÉS SUR L’AUTEL DE LÉGO ET DE LA DÉMESURE.
Parce que si on dit : on reconnait pas le président de la République (comme l’a fait le COPPO après le crise politique de 1997), on ne peut reconnaitre le gouvernement qui procède de ce président. Et si on ne reconnait pas ce gouvernement qui organise les élections législatives et communales, on ne participera pas aux prochaines élections. Conséquence : on s’auto-exclut du système politique, électoral et institutionnel pendant les 5 prochaines années au moins. Or, 5 ans d’hibernation politique pour de jeunes leaders, c’est deux générations sacrifiées ! Pourquoi ? Pour un homme qui aura 73 ans en 2023 ?
Entre la fidélité à un homme et le renoncement à une carrière politique brillante, sans trahison et sans opportunisme, le débat va vite se poser au sein du camp de Soumaïla Cissé.

Par Mohamed D. DIAWARA

Info-matin

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