Autant le parcours atypique de nombre de responsables des groupes armés ; que la soudaine dégradation la situation sécuritaire sur le terrain en fonction de leur humeur prouve à suffisance qu’entre terroristes séparatistes et terroristes jihadistes, il existe un système vases communicants où l’on troque facilement le costume. Et dire que dans cette affaire du Nord ; l’on persiste à présenter les rebelles comme la bonne graine à séparer de l’ivraie que sont les jihadistes.
Il est vrai qu’il existe un dessein manifeste de falsification de l’histoire par les rebelles touareg qui ont réuni l’exploit de créer une entité virtuelle de l’Azawad. D’autres, pour des raisons d’agendas propres se sont empressés de se faire les hérauts d’une version qui n’est que le fruit de l’imagination fertile d’individus en délicatesse prononcée avec le travail qui réécrivent l’histoire dans laquelle ils s’arrogent le beau rôle. Il est de notoriété publique telle histoire, dans date, ni évènements marquants ne rime qu’avec la légende, le mythe. S’il plait à certains de s’en gargariser ; que plus grand plaisir leur fasse.
Insulte à l’intelligence
Par contre, tenter de tronquer une histoire présente, au vu et au su de tout le monde ; cela est une insulte à l’intelligence. Tel est le chantier titanesque en cours pour présenter le MNLA/HCUA/MAA pour un mouvement laïque qui n’a rien à voir avec les jihadistes et dont la laïcité est même un atout majeur dans la traque de ces derniers.
Cette vision suivie d’une politique et d’un plan de destruction massive est prise à défaut par le parcours singulier de la plupart des leaders du Mouvement national de libération de l’Azawad ou du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad. Un seul exemple serait assez illustratif de la capacité de mutation de ces rebelles qui ne sont en réalité que des serpents à deux têtes : tu prends la tête, il te mord ; tu prends la queue, il te mord.
Alghabass AG INTALLAH. Cet homme dont l’histoire est désormais inséparable de celle de l’Azawad s’illustre comme le plus grand nomade politique de ces dernières années. En effet, en 2011, il a rejoint le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) qui ne faisait plus mystère de ses velléités belliqueuses nonobstant les offres de paix faites par le président à l’époque, Amadou Toumani TOURE. À travers le MNLA qui avait le vent en poupe, l’occasion rêvée se présentait pour Algabass de se faire une place au soleil par un ralliement purement opportuniste.
Un serpent, deux têtes
Mais quelques mois plus tard, une autre occasion plus juteuse s’est présentée sous le visage de Iyad Ag GHALY qui semblait disposer d’une réserve intarissable de pétro dollars. (Il faut rappeler que Iyad lui-même a dû quitter le MNLA parce qu’il n’arrivait plus à en prendre l’entier contrôle). Algabass qui sait bien dissimuler son jeu a manœuvré habilement pour devenir en un temps record le vice-président du mouvement islamiste Ansar Eddine dont Iyad Ag GHALY était le président. Là également, l’idylle n’aura été que de courte durée. Et pour cause, après la débâcle de Ansar Eddine, suite à l’opération française Serval, le serval de Kidal, Algabass a pris congé de Ansar Eddine, en débandade pour créer son propre mouvement, à savoir le mouvement islamique de l’Azawad (MIA), d’obédience islamiste.
Mais islamiste, défenseur de la foi, n’est pas la véritable vocation de ce Algabass plutôt sous le charme du gain facile. En prononçant la dissolution du MIA et son intégration au sein du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), autre création de son frère aîné, transfuge du MNLA, la famille INTALLAH se retrouvait autour d’un intérêt commun.
L’on retient de Algabass, primo qu’il est rebelle comme tous ceux de son espèce ; secundo qu’il a été militant du MNLA considéré comme laïque) ; tertio qu’il a été membre de Ansar Eddine (mouvement islamiste qui appliquait la charia dans toute sa rigueur à Kidal et environs) ; quarto qu’il a été le père-fondateur du Mouvement islamique de l’Azawad (également mouvement islamiste) ; quinto qu’il atterrit au sein du Haut conseil pour l’unicité de l’Azawad (plutôt laïque selon les critères de l’extérieur).
Comme il est aisé à constater, il faut être atteint d’une cécité irrémédiable pour ranger un tel individu dans l’une des catégories : laïque ou jihadiste. Cet homme est une chauve-souris ; un hybride de terroriste jihadiste et rebelle. Il est loin d’être seul dans une telle situation dans le rang des rebelles de Kidal.
Les raisons d’un fiasco
L’on comprend dès lors qu’en aucune manière les rebelles ne pouvaient être les meilleurs alliés des Français dans la recherche de leurs otages. Ils ont d’ailleurs représenté plus des obstacles que des solutions pour l’atteinte du double objectif de récupérer les otages et de neutraliser les jihadistes. Ils n’ont pas permis de les libérer et n’ont pas été d’un apport indiscutable dans la traque des jihadistes. Tout simplement parce que les terroristes recherchés ailleurs, dans les grottes, sont aussi les alliés qui sont censés aider à leur traque.
D’autre part, il y a une curieuse corrélation entre l’exacerbation de la situation sécuritaire et la montée de la fièvre chez les terroristes séparatistes. En effet le constat est établi que toutes les fois où ils donnent de la voix, pour l’une ou l’autre raison, ils trouvent leur répondant ailleurs à travers des attentats suicides qui laissent croire à une parfaite coordination des actions. Quand les uns posent des revendications politiques ; les autres posent des actes de guerre. Une complémentarité qui en dit long sur le chemin parcourir pour parvenir à l’éradication de cette calamité à deux visages.
En définitive, c’est deux groupes terroristes sont du pareil au même. Aucune subtilité ne devrait conduire à occulter une telle évidence dans le manifeste de protéger des rebelles aussi démoniaques que leurs frères jihadistes.
Par Bertin DAKOUO
Source: info-matin.info