La conférence de paix de Genève 2 s’est ouverte ce mercredi 22 janvier, avec comme objectif d’enrayer la violence et de trouver une issue politique au conflit syrien qui dure depuis bientôt trois ans. Pour la première fois, dignitaires du régime de Damas et opposants en exil se sont rencontrés, à Montreux précisément, sur les bords du Lac Léman. Cette première journée de discussions s’est achevée en fin d’après-midi, comme elle avait commencé, dans un climat extrêmement tendu.
Avec notre envoyé spécial
Cette journée est un simple lever de rideau, une sorte de premier acte. Mais sa tenue est en soit une avancée considérable. Une avancée marquée, toutefois, par cet incident entre le secrétaire général de l’ONU et le chef de la délégation syrienne. Durant une demi-heure, ce mercredi matin, Walid al-Mouallem déroule un long discours et refuse de se conformer au temps de parole de sept minutes imparti à chaque délégation. Une manière pour le diplomate en chef syrien de montrer qui mène le jeu et qui est en position de force.
A l’issue de cette première journée de discussions, la poignée de main générale a fait exception des deux délégations syriennes – celle du régime et celle de l’opposition. Aucun contact physique, seulement des regards noirs échangés. Mais les avoir réunis dans une seule et même salle relève déjà du miracle.
Mais dans ces discussions, aucune délégation ne perd le nord. L’objectif principal demeure la mise en place d’un gouvernement de transition. Seul moyen pour y parvenir : le consentement mutuel. Problème : les différents protagonistes syriens ne semblent pas sur la même longueur d’ondes.
Pour Ahmed Kamel, porte-parole du Conseil national syrien (qui a décidé de boycotter la conférence), le chef de la diplomatie syrienne Walid al-Mouallem doit cesser la fuite en avant et accepter le départ de son président. « Walid al-Mouallem n’a pas parlé du but final de cette conférence, ce qui nous donne une idée de la façon dont le régime l’aborde : entrer dans des détails hors-sujet, perdre du temps, parler de terrorisme, mais pas de son propre terrorisme ni de celui du Hezbollah, des Iraniens et des Irakiens qui ont envahi la Syrie. »
Quels thèmes en priorité ?
Dans le camp d’en face, Wadhah Abd Rabo, rédacteur en chef d’El Watan, journal syrien pro-Assad, ne s’en cache pas : le régime est en position de force et doit en profiter. « Il est clair que le gouvernement syrien à tout son temps à Genève pour parler de tous les dossiers, alors que la coalition semble pressée d’obtenir quelque chose. On attend de voir sur quel thème on va commencer. S’agira-t-il du contre-terrorisme, évoqué par les Russes et le gouvernement syrien, ou un autre thème, comme l’humanitaire, évoqué par la coalition ? », s’interroge Wadhah Abd Rabo.
Pour Agnès Levallois, spécialiste du Moyen-Orient, il est en tout cas prématuré d’aborder en amont des négociations le sort du dirigeant syrien. « Il me semble que le sort de Bachar el-Assad ne peut pas être évoqué lors de la première réunion. Il est trop tôt pour se focaliser sur ce point. Ce qui va être important, lorsque les vraies négociations vont commencer à Genève, c’est de voir sur quelle base les premiers pas vont-ils pouvoir être faits, d’un côté comme de l’autre, pour trouver un terrain d’entente.
L’opposition va peut-être essayer d’obtenir des points pour améliorer la situation humanitaire, pour permettre que la population syrienne voie éventuellement des avantages à la tenue de cette conférence. Ce sont ces premiers pas qui risquent d’être faits, plutôt que la question du départ ou non de Bachar el-Assad », prédit-elle.
Vendredi, à Genève cette fois, la journée du véritable face à face se tiendra à huis clos. Vu la façon dont a débuté cette première manche, l’opposition a tout intérêt à imposer sa marque, sous peine de se faire écraser par un régime sûr de lui.
rfi