Un malade du sida de 51 ans, accusé d’avoir contaminé son ex-compagne, s’est retranché lundi derrière la “pudeur” qui l’aurait empêché d’en informer sa partenaire, à l’ouverture de son procès devant les assises de Seine-Saint-Denis à Bobigny.
“J’avais pas envie d’en parler, je voulais garder ça pour moi”, a déclaré l’accusé, prénommé Patrick, qui habite à Bondy. “C’est une question de pudeur, qu’on a pas envie d’étaler sur la place publique”.
“Je suis loin d’être un monstre. J’osais pas lui dire, je voulais pas l’admettre”, s’est-il défendu plus tard dans l’après-midi, avant d’exprimer des regrets et de reconnaître qu’il était conscient des risques.
Après huit ans de vie commune, son ex-compagne, prénommée Christine, avait mis fin à leur relation et porté plainte contre lui en mars 2005, après avoir appris qu’elle portait le virus lors d’un examen médical. Son médecin lui a ensuite confié que son compagnon avait le sida depuis 1994.
L’accusé, chauffeur routier, encourt 15 ans de réclusion pour “administration de substance nuisible ayant entraîné une infirmité ou une mutilation permanente”.
Présenté comme plutôt “secret” par sa mère, il avait longtemps caché sa maladie à la plupart de ses proches, dont sa compagne, sa mère et son frère. Le couple avait des rapports sexuels sans préservatif. L’accusé reconnaît pourtant qu’il se savait malade depuis “le début de sa relation”.
Patrick souhaite “faire face à ses responsabilités”, a dit à l’AFP son avocat Me Jonathan Ben Ayoun, en précisant que son client en raison de sa “simplicité et de son côté un peu brut de décoffrage” ressentait “un sentiment de honte, mêlé d’une incompréhension de la procédure”.
L’accusé, ancien toxicomane tombé dans la cocaïne puis l’héroïne “à la mort de (son) père en 1984″, pense avoir été contaminé “en utilisant des seringues en groupe”. “A l’époque, tout le monde se faisait confiance, on croyait qu’on passerait toujours entre les mailles du filet”, a-t-il dit, reconnaissant aussi avoir eu “des rapports non protégés” avec des “prostituées d’Europe de l’est”, avant sa relation avec la victime, pendant ses trajets en tant que routier international.
Pendant fréquentation de Christine, l’accusé “sait très bien qu’il est malade, mais il est dans le déni”, “le déni névrotique”, a estimé l’expert psychiatre Frantz Prosper, l’ayant examiné.
Selon lui, même s’il est responsable de ses actes, ce déni peut s’expliquer par l’attitude de “la société de l’époque qui n’était pas prête à accueillir les sidéens avec sérénité” et il n’est “pas détaché” du fort sentiment amoureux que ressentait l’accusé pour la victime.