Dans un rapport de 28 pages, intitulé «l’Afrique de l’Ouest, El Dorado: cartographie du commerce illicite de l’or en Côte d’Ivoire, au Mali et au Burkina Faso », Partenariat Afrique Canada, cartographie les défis, tant sur le plan de la mise en application que de la gouvernance et les vulnérabilités engendrées par le commerce illicite de l’or en Afrique de l’Ouest, de même que ses répercussions sur la paix et la stabilité régionales. Il se concentre essentiellement sur le secteur de l’or artisanal en Côte d’Ivoire, au Mali et au Burkina Faso. Parlant du cas malien, l’ONG explique que «les pratiques fiscales du Mali applicables aux exportations d’or font de ce pays la plaque tournante du commerce illicite de l’or en Afrique de l’Ouest» et l’invite à entreprendre un examen exhaustif de son régime fiscal afin de corriger les échappatoires qui font du pays un aimant pour l’or produit en Afrique de l’Ouest.
Selon ce rapport, le Mali aurait fiscalement encouragé le commerce illicite d’or en Afrique de l’ouest. En clair, les pratiques fiscales du Mali applicables aux exportations d’or font de ce pays la plaque tournante du commerce illicite de l’or en Afrique de l’Ouest. Toute chose qui aurait encouragé de manière active le transit illicite du métal jaune, en offrant une attractive réduction fiscale.
Les pratiques fiscales de certains pays de l’Afrique de l’ouest sont propices au commerce illicite de l’or. L’enquête révèle que la principale cause qui a poussé le Mali à devenir la plaque tournante du trafic illicite de l’or n’est autre que les mesures des Etats eux-même. Selon l’ONG, tous les pays auraient pris des mesures afin d’encourager, inconsciemment, le commerce légal de l’or artisanal qui touche trois millions de mineurs en Côte d’Ivoire, au Mali et au Burkina Faso. La principale parmi ces mesures, est l’harmonisation des taxes à l’exportation à un taux de 3 %. L’enquête qu’a menée l’ONG spécialisée des questions liées à la gouvernance des ressources naturelles a découvert que le Mali n’applique les taxes à l’exportation que sur les 50 premiers kg d’or par mois. Un argument suffisamment convainquant pour les négociants afin qu’ils fassent traverser par le Mali le fruit de leurs exploitations artisanales, de manière à bénéficier de l’important allègement fiscal.
« L’application nuisible des lois fiscales par le Mali est une cause de préoccupations dans la région parce qu’elle favorise activement le commerce illicite de l’or. Les voisins du Mali sont privés d’importants revenus fiscaux puisque les négociants font traverser l’or en contrebande au-delà de la frontière pour tirer profit de l’allègement fiscal », analyse ce rapport de l’ONG Partenariat Afrique Canada.
Toujours, selon les termes de ce rapport, ce ne sont pas uniquement les pays de la région qui doivent harmoniser leurs fiscalités, mais aussi des pays acheteurs, en partie les Emirats Arabes Unis. Une analyse de la production d’or et des statistiques sur le commerce de l’or au Mali, de même que des importations d’or malien déclarées par les Émirats arabes unis, a permis de mettre en évidence des écarts majeurs dans les données rapportées. Sur une période de quatre ans, les importations d’or malien par les Emirats Arabes Unis (EAU) ont à chaque fois dépassée la totalité de la production du Mali. Le Mali a déclaré une production de 40 tonnes d’or en 2013, tandis que les EAU déclaraient en avoir importé 49,6 tonnes. En 2014, les chiffres ont augmenté, le Mali déclarant une production de 45,8 tonnes et les EAU, des importations d’or du Mali s’élevant à 59,9 tonnes. Puisqu’une grande part de la production industrielle du Mali est exportée vers les affineurs suisses et sud-africains, Partenariat Afrique Canada n’a pu trouver d’explication à ces écarts. L’ampleur du commerce illicite de l’or au Mali soulève des préoccupations quant à la paix et à la stabilité régionales et illustre la nécessité pour les centres d’affinage d’exercer une diligence raisonnable accrue à l’égard des importations.
En conclusion, Partenariat Afrique Canada demande au Mali d’entreprendre un examen exhaustif de son régime fiscal afin de corriger les échappatoires qui font de ce pays un aimant pour l’or produit en Afrique de l’Ouest. De plus, le rapport demande au Dubaï Multi-Commodités Centre, aux EAU, d’interdire les importations d’or transporté à la main et de démontrer qu’il contrôle davantage les importations d’or.
Notons enfin que Partenariat Afrique Canada (PAC), ONG auteur du rapport, est un chef de file mondial en matière d’élaboration d’approches novatrices pour renforcer la gouvernance des ressources naturelles dans les zones de conflit ou à haut risque. Depuis 30 ans, PAC collabore avec ses partenaires des stratégies pour favoriser le dialogue sur les politiques et le renforcement des capacités, notamment par l’entremise de la création du Processus de Kimberley, qui a valu au PAC une nomination pour le prix Nobel de la paix en 2003.
Dieudonné Tembely
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Source: Inf@sept