Le ministre de l’Economique numérique et de la Communication, Arouna Modibo Touré, est très déterminé à mettre les hommes de médias dans de meilleures conditions afin qu’ils puissent exercer leur métier en toute sécurité. Cela passe obligatoirement par un secteur bien assaini. Puisque beaucoup de journalistes se plaignaient de la délivrance de la Carte de la presse à n’importe quelle personne qui n’est pas journaliste.
Il faut préciser que la Carte de presse est un “laisser-passer” au profit du journaliste. Pour moraliser sa détention, le Décret N°92-191 du 5 octobre 1992 a institué auprès du ministre en charge de la Communication une Commission de délivrance de la Carte de presse. Et l’application a révélé des insuffisances en ce qui concerne son format non conforme aux meilleures pratiques internationales en la matière, le manque de précision sur la qualité de journaliste et la composition peu représentative de la Commission de délivrance.
C’est en vue de corriger ces insuffisances que le Conseil des ministres a adopté, le 7 juin 2017, le projet instituant la Carte de presse au Mali. Ce dossier a été proposé par le ministre Arouna Modibo Touré en sa qualité de ministre de l’Economie numérique et de la communication.
L’adoption de ce projet a été accueillie par la presse malienne comme une avancée significative. Et beaucoup de patrons de presse ne cessent de remercier le jeune ministre Touré pour cette belle initiative.
Ainsi, la Carte de presse est considérée comme un document professionnel qui permettra aux hommes de médias d’avoir accès aux informations. En d’autres termes, elle permettra d’assurer une plus grande accessibilité du personnel des médias aux sources d’information, notamment publiques.
Le format de la Carte de Presse sera désormais amélioré conformément aux standards internationaux en la matière. Il sera déterminé par décision du ministre chargé de l’Economie numérique et de la Communication. “La Carte de presse porte la photographie du titulaire, l’indication de ses noms et prénoms, sa nationalité, l’adresse de l’organe auquel il est affilié et la date de délivrance. La validité est de 3 ans. Elle est revêtue de la signature du président de la Commission et de celle du titulaire. La possession de la Carte de presse est un acte d’adhésion à la déclaration des droits et devoirs du journaliste”.
Le journaliste qui désire avoir ce document professionnel doit fournir certaines pièces, notamment un extrait d’acte de naissance ou la photocopie légalisée de la pièce d’identité ; un extrait de casier judiciaire datant de moins de trois mois : un CV, une déclaration sur l’honneur que le journalisme est sa profession ; une attestation dûment établie et signée par le directeur de publication ou de l’éditeur ; un engagement de tenir la Commission informée de tout changement intervenu dans sa situation, avec obligation de rendre la Carte de presse à la Commission au cas où le titulaire perdrait la qualité de journaliste.
La composition de la Commission de délivrance de la Carte de presse a été aussi réaménagée pour plus de représentativité des différents acteurs du secteur des médias. Ainsi, en plus de deux représentants du département de la Communication, il y aura un représentant de la Maison de la presse, des organisations professionnelles de la radio, de la télévision, de la presse écrite, de la presse en ligne ainsi des organisations syndicales de la presse. Ce qui fait un total de 8 membres. Sans oublier 8 membres suppléants désignés dans les mêmes conditions que les membres titulaires.
La Carte de presse peut être retirée à tout journaliste ; lorsqu’il subit une condamnation afflictive ou infamante non amnistiée ou en cas de viol de manière flagrante des règles d’éthique et de déontologie.
A.B. HAÏDARA
Abdoul Majid Thiam, journaliste :
“Avec la Carte de presse, le journaliste sera strictement journaliste”
Je n’ai pas encore tout le contenu du projet de loi instituant la Carte de presse, adopté par le conseil des ministres le mercredi 7 juin courant, mais, si je m’en tiens au communiqué publié à l’issue de cette réunion hebdomadaire du gouvernement, je note tout d’abord une amélioration dans la présentation du document. On pourrait très rapidement se retrouver avec une Carte de presse relookée, dans la lignée de la carte Nina ou de la carte nationale d’identité biométrique. Ça va être effectivement dans l’air du temps.
Le deuxième côté positif, me semble-t-il, sera le distinguo qui va se faire à travers une précision sur la qualité du détenteur de la carte de presse. A mon entendement, les journalistes, tout comme les autres métiers de la presse, accéderont au document à condition que chacun soit confiné dans sa fonction réelle. Autrement dit, le journaliste sera strictement journaliste, l’animateur sera strictement animateur, le cameraman, cameraman ; le preneur de son, preneur de son ; le réalisateur, réalisateur, etc.. Naturellement, comme toute profession, il y a des règles (l’éthique et la déontologie du métier) à respecter pour mériter la Carte de presse, faute de quoi des sanctions, allant de la suspension au retrait du document, sont envisagées. Rien à redire sur cela aussi. Mais là où le bât blesse, c’est quand on lie la possession de la Carte de presse à la production d’un diplôme d’études supérieures ou en journalisme, il y a manifestement une simple volonté politique de verrouiller un corps à beaucoup de talents.
Heureusement que la loi n’est pas rétroactive, sinon déjà beaucoup de journalistes, autodidactes ou à la force du poignet, allaient dire adieu à la profession, retourner dans la galère. C’est presqu’une trahison de l’idéal du 26-Mars, de la liberté d’entreprendre.
Par Aujourd’hui-Mali