Depuis quelques semaines, l’ancien Président de la République, Alpha Oumar Konaré est confronté à de faux problèmes. Après l’attaque armée de son domicile, le va et vient des délégations envoyées par le régime soi-disant pour la réconciliation nationale en est un autre fait qui ne dit pas son nom.
Amener les anciens présidents la République du Mali à se prendre main dans la main est perçu dans certains milieux associatifs comme une initiative qui donnerait corps et vie à un départ vers la réconciliation nationale.
Il faut dire que l’initiative a toute sa place dans un monde où les déchirures ont amené les fils du pays à ne plus s’écouter ou se faire secourir.
Les anciennes blessures d’un passé marqué par les divergences de points de vue, sont si brûlantes que certains ne prononcent plus le simple nom de leur précédent ou ancien allié d’une certaine époque. Pire, l’élection d’IBK à la tête du Mali n’avait donné espoir à l’épisode pour enfin, connaître son épilogue. Tel un lion fâché, IBK qui s’est vu président grâce à Dieu, selon sa propre expression, n’avait au départ, eu de cadeaux à faire à ses prédécesseurs qu’à leur prouver que contre leur gré, ses prières et aspirations ont été exaucées. Pour annoncer son retour pour une véritable revanche, il flatte l’un des plus grands dictateurs de l’Afrique au sud du Sahara en « grand républicain». Cette éloge qui ne tient pas débout est loin de frustrer le président Konaré, directement visé. Car ce dernier qui sait combien son ancien élève politique sait entretenir les rancunes, n’ignore pas ce qu’il ressent pour lui après leur séparation en 2000. Quoiqu’il fût son homme de confiance, en président de son parti(ADEMA), ambassadeur, ministre et premier ministre, Alpha n’avait approuvé de le préparer à sa succession. Les raisons furent selon certaines indiscrétions, du simple fait qu’il ne correspondait pas au profil adéquat d’un homme d’Etat pour diriger un Etat des diversités. Durant leur combat commun, Alpha a connu un homme « hautain, rancunier, budgétivore et héritant de cette dilettante qui se couche tôt et se réveille tard.»
C’est ainsi qu’IBK quitta le parti avec fracas pour s’en créer le RPM en juin 2001. Le verset de « Allah ka tignè dèmè=Que Dieu aide la vérité » connaissait le jour. Depuis, rien ne va plus entre les deux hommes.
Une fois investi, IBK aurait pu profiter de la lettre de félicitation à lui envoyée par ATT afin d’apaiser les tensions, se rapprocher d’Alpha et faire ensemble face à l’essentiel. Mais que non ! L’homme avait cru diriger le grand ensemble malien si facile pour faire recours ou donner du temps à ses illustres prédécesseurs. Il faut dire qu’Alpha le connaît mieux que quiconque pour l’éviter et continuer à vivre sa retraite en toute sagesse.
Sur la même lignée, et contrairement à ce qui se trame à nos jours, IBK , dès le début du deuxième trimestre de son régime, étale qu’en plus d’Alpha qui n’a pu l’empêcher d’atteindre son sommet, le Président ATT également doit payer, et très cher. De « haute trahison » l’accuse-t-on et menace de le traduire devant la haute Cour de Justice. Avec des arguments dévêtus de tout sérieux dans le fond. « Si Dieu facilitait tout pour IBK, Alpha et ATT seraient actuellement écroués », commente un ancien député.
Mais comme son excellence Ibrahim Boubacar Keïta semble descendre de son piédestal de revanchard, il tente d’aller à la conquête des cœurs de ses prédécesseurs. Le hic en est qu’il ignore encore comment y procéder.
Et selon de bonnes sources, des délégations d’émissaires du régime se succèdent depuis peu, au domicile de l’ancien Président Alpha afin de le réconcilier avec ses autres frères. Quant à ATT, « c’est aussi en vue », estime-t-on dans certains cercles du pouvoir. « Aller demander pardon à ATT » fut dernièrement une idée pour la réconciliation nationale qu’un député de la mouvance présidentielle fit entendre à ses homologues du même bord.
Curieusement, du côté de la famille d’Alpha, « venir demander à l’ancien Président démocratiquement élu de se réconcilier avec les maliens » est perçu comme une façon de le mettre à dos avec les maliens.
En effet, l’ancien Président à la fin de son deuxième mandat, a constitutionnellement laissé le pouvoir à ATT démocratiquement élu. A parler de bilan, Alpha a plus quoi s’en flatter qu’à se reprocher.
En outre, s’il y a un Président qui a quelque chose à se reprocher au Mali, c’est bien le forcément repenti Général Moussa Traoré. Ce militaire autocrate qui est venu mettre fin à l’option socialiste adoptée pour un équitable partage des richesses par le feu Modibo, fût classé parmi les plus grands dictateurs de l’Afrique au sud du Sahara, tant son long séjour de 23 années au pouvoir s’est illustré en cauchemar pour les générations maliennes du lendemain des indépendances à la veille du multipartisme intégral.
Les affres du régime de Moussa Traoré ont tant fait de victimes que l’ancien général, deux fois condamné à la peine capitale(pour crime de sang et crime économique), apparaît comme le plus grand sanguinaire de l’histoire du Mali. Et s’il a dû laisser le pouvoir, c’est bien par la force. Et pourtant, à la différence du sort qu’il avait réservé à Modibo, ses successeurs ATT et Alpha lui ont réservé des conditions de vie très favorables en prison.
Qu’il soit malchance ou simple coïncidence, l’ancien Président résidant depuis 12 ans à Titibougou, n’a connu d’attaque sur son domicile que sous le régime IBK. Et de la réconciliation ? C’est maintenant qu’on lui en parle. Avant, « en marge d’avoir été ministre du sinistre dictateur, il a deux fois accordé la grâce présidentielle à Moussa Traoré alors en prison. Il conseilla résolument son successeur Amadou Toumani Touré au cours de ses deux mandats. Avec Dioncounda, les relations sont très bonnes », a commenté un homme politique. Alors doit-il se réconcilier avec des gens qu’il n’a jamais quittés?
C’est sûr qu’il va encore falloir, au régime, changer de cap et rendre à César ce qui est à César. Au lieu de passer par quatre chemins, au risque de créer d’autres problèmes à son ancien mentor, IBK doit tout simplement aller en personne demander des excuses à Alpha. Sinon, à entendre ses amis, l’ancien Président n’a absolument rien à se reprocher au point de se sentir le premier concerné de ce qu’on appelle « Réconciliation nationale ». Mieux, « IBK doit aller demander des excuses à ATT d’abord, car c’est lui qu’il a menacé de traduire devant la Haute Cour de Justice. Après, tout est possible », aurait proposé l’ancien président Konaré, aux sept émissaires de la Présidence dépêchés à son domicile.
I M T