Les personnes déplacées internes font preuve de créativité au quotidien pour subvenir aux besoins de leur famille. La plupart mène diverses activités génératrices de revenus. Bien que les charges familiales reposent essentiellement sur les hommes, elles sont aussi l’affaire des femmes. Ces dernières contribuent aux dépenses, notamment à travers le recyclage.
Elles collectent les déchets dans les dépôts de transit, procèdent au tri, puis vendent les objets recyclés à des usines locales.
Nous sommes sur le site des déplacés de Faladiè. Farima et Kadia y vivent, elles ont fui l’insécurité à Bandiagara et, depuis leur arrivée à Bamako en 2018, elles exercent diverses activités, dont le recyclage.
« Nous nous réveillons à l’appel de la mosquée et partons fouiller dans les dépôts d’ordures », explique Farima.
Sa voisine Kadia témoigne « Depuis mon arrivée, j’exerce cette activité. Après le ramassage, nous faisons le tri. Nous vendons les déchets par kilogramme. » Et cette mère de famille de poursuivre: « Le fer est vendu entre 50 et 75 F CFA le kilogramme. Les sachets d’eau, c’est moins de 1000 F CFA le sac de 50 kg. Les autres plastiques se vendent aussi à 75 F le kilo », explique-t-elle, avant d’affirmer que cette activité leur permet d’épauler leurs époux.
Un effort salué par les hommes
Mamadou Tembely, époux de Farima, reconnaît que ce soutien est précieux, surtout dans un contexte de précarité généralisée. « Je suis vraiment reconnaissant. Je suis ramasseur d’ordures et je mène d’autres activités également. Mon souci majeur, c’est le bien-être de ma famille, malgré les difficultés. »
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Des ONG et le service social unissent leurs forces
Le service du développement social encadre cette activité à Bamako et dans d’autres régions du pays. Selon Tiémoko Traoré, coordinateur des sites de déplacés de Bamako, des ONG ont soutenu les femmes du site ds déplacés de Faladiè dans cette initiative. Les fonds générés par le recyclage ont permis la réalisation de plusieurs projets, révèle M. Traoré.
« Notre rôle a été d’identifier les bénéficiaires avec l’ONG qui est intervenue. Ensuite, nous avons participé à leur formation », ajoute-t-il. Des initiatives, dont la création d’une caisse de solidarité, ont été mises en place. Selon le coordinateur, les fonds sont déposés dans une caisse d’épargne locale.
Autres localités, même réalité
Au nord du pays, plus précisément à Tombouctou, d’autres femmes déplacées mènent la même activité, avec le soutien du bureau régional du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), à travers des financements.
Mbarakou Maïga du travaille au bureau du Haut vommissariat pour les réfugiés HCR à Tombouctou. Il explique qu’un groupement nommé GOUNATHIERE a bénéficié d’un appui du siège du HCR à hauteur de 5 à 6 millions de francs CFA. Ce financement a permis au groupement de s’organiser dans les quartiers de la ville.
M. Maïga affirme que les déchets collectés sont rassemblés dans leur usine. Ces déchets plastiques sont ensuite transformés grâce à des machines acquises avec l’aide du HCR et d’autres partenaires.
Hawa Touré, présidente de l’association Gounathière, indique que l’appui du HCR a été d’un apport inestimable. Le financement obtenu a permis l’acquisition d’équipements. « En 2022, nous avons été retenues pour le Fonds d’innovation pour les réfugiés. Cela nous a permis de motiver plus de 200 femmes dans la collecte et la transformation des déchets, et de renforcer notre site de valorisation des déchets avec des équipements comme des moto-taxis, tricycles, matériels de protection, etc. », confie-t-elle.
De l’aide à l’impact
Au-delà de l’autonomie financière, le recyclage contribue également à la préservation de l’environnement. Dr Sambou Sissoko, environnementaliste, estime que l’État devrait intensifier son soutien à ce type d’initiatives.
« Le recyclage effectué par ces personnes a déjà des impacts positifs, avérés et démontrés », soutient Dr Sissoko. Selonlui, sans ce recyclage, Bamako produirait plus de 3000 mètres cubes de déchets par jour. Ce travail contribue donc à réduire certaines maladies, à limiter la prolifération des moustiques, et diminue les émissions de méthane, au bénéfice du Mali et du monde entier ajoute t-il.
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Les matériaux recyclés sont revendus à des usines locales. Ces dernières les transforment et les utilisent pour fabriquer des planches à laver, des bassines, des seaux et autres articles en plastique. Une dynamique qui participe au développement de l’économie locale.
À travers ces initiatives, les déplacés internes démontrent leur résilience et leur capacité d’adaptation face à un quotidien difficile.