Le Mali et le Niger ont abrité du 17 au 19 mars 2021, le forum sur la construction verte et la création d’emplois au Sahel, organisé par le Bureau-Pays de l’Organisation internationale du travail (OIT) pour le Benin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger et le Togo.
Cette grande rencontre qui s’est déroulée en mode hybride, c’est-à-dire à la fois en ligne et en présentiel, avait pour objectifs d’échanger les expériences et les idées visant à considérer la construction verte comme un instrument de création d’opportunités d’emplois décents au Sahel.
La construction verte est définie comme étant les travaux d’infrastructures publiques et de bâtiments, mis en œuvre selon des solutions écologiques basées sur les ressources locales, intensives en emplois, qui protègent l’environnement et restaurent l’écosystème naturel. Le présent forum s’inscrit dans le cadre des activités du Bureau international du travail (BIT) pour l’appui au programme d’investissements prioritaires du G5 Sahel.
Le Sahel est aujourd’hui confronté à des défis multiformes alimentés par la recrudescence de l’insécurité, les effets négatifs du changement climatique, avec pour corollaires, la pauvreté et le taux de chômage élevé des jeunes. L’économie des pays sahéliens reste fondamentalement dépendante du secteur agro-pastoral. Elle constitue 85% du taux de ruralité au Mali.
Ces pays sont caractérisés par une forte croissance démographique qui amenuise les effets de la croissance économique d’environ 5% par an, selon une étude réalisée en 2019. Cependant, avec une population de plus de 300 millions d’habitants et une tendance croissante à l’urbanisation, la région du Sahel offre d’énormes opportunités à ses populations.
Le marché du travail des pays du Sahel est soumis aux effets combinés du sous-emploi informel, des mauvaises conditions de travail, de faibles systèmes d’éducation et de compétences. En 2019, la population active de plus de 15 ans au Mali était de 62,7%. Au Niger, la population active de cette même tranche d’âge était de 26,5% en 2017 selon une étude de la Banque mondiale.
La question de l’emploi constitue un défi majeur face à l’insécurité et aux effets néfastes du changement climatique, tels que les sècheresses, les inondations, l’insécurité alimentaire qui, entraînent des changements dans les modes de vie des populations et créent des bouleversements, des situations de conflits entre les communautés.
Au regard de ces facteurs, il devient nécessaire de porter la réflexion sur des modes de développement reposant sur l’utilisation optimale des ressources naturelles, dont le Sahel dispose, tout en préservant l’environnement.
La construction de l’habitat, des ouvrages publics, des équipements socio-économiques à base de matériaux locaux ou qui utilisent des communautés locales tout en protégeant l’environnement, préservent l’équilibre de l’écosystème et valorisent les savoirs locaux endogènes. Ceci est d’autant plus justifié dans ce contexte sahélien qui regorge aujourd’hui d’exemples de réussite de cette «approche verte» dans la construction d’édifices publics ou de patrimoine religieux.
La construction verte, c’est-à-dire, celle qui repose sur ces considérations locales et environnementales, continue d’alimenter la réflexion en vue d’une prise en compte durable de la création d’emplois dans le secteur des bâtiments et les travaux publics. Ce secteur est considéré comme étant un bassin potentiel important d’emplois directs et indirects au bénéfice des communautés locales.
Les constructions de bâtiments et des travaux publics qui privilégient l’utilisation des matériaux locaux sont à la fois écologiques et durables et, offrent des opportunités de création d’emplois sur la chaîne de valeur de la construction, si cela est conduit selon une logique intensive en emplois. Cet impact est observé depuis l’exploitation des carrières, la construction elle-même, les travaux de finition. Cette approche inclut l’utilisation des énergies renouvelables et la prise en compte d’activités qui valorisent les ressources naturelles, humaines, technologiques, institutionnelles et impulsent une dynamique de cohésion sociale et de développement locale.
La durabilité environnementale et la transition écologique constituent des sujets abordés dans les stratégies de développement du Sahel. Ce forum est ainsi articulé autour des initiatives du BIT en matière de création d’emplois et en faveur d’une transition écologique réussi au Sahel, tel que promue par les Objectifs de développement durable (ODD).
Ce forum y trouve son ancrage dans le fait que la construction verte sera traitée comme faisant partie des modes de production durable (ODD 12), dont la promotion permettra l’érection des établissements humains résilients et durables (ODD 11). Compte tenu du fait que le Sahel est la zone géographique ciblée par le forum, les questions de la désertification et de biodiversité ont alimenté les échanges et les discussions. Dans cette perspective, le forum est en droite ligne avec les ODD 15 qui visent à préserver et restaurer les écosystèmes et la biodiversité, lutter contre la désertification, enrayer et inverser le processus de dégradation des sols.
Cheick Amadou DIA
Source : L’ESSOR