La violence, il faut le craindre, s’annonce comme le seul moyen de résoudre la crise burkinabe devenue depuis hier un conflit ouvert. Des centaines de milliers de marcheurs, pour reprendre les estimations de la presse, c’est du lourd. Le succès parle pour l’opposition. Celle-ci n’a pas encore gagné la bataille cependant, car cette bataille relève plus de la course de fond que du sprint. Et c’est sans doute au marathon que se prépare Compaoré dont le pouvoir est beaucoup plus âgé que les manifestants d’hier.
Il sait ce qu’il met en jeu : sa légende qui ne contient pas que des placards à cadavres et qui est celle du chef sollicité d’un îlot de stabilité dans une sous région qui sait être houleuse. Sa vie peut-être car personne ne sait où s’arrête le tsunami que peut devenir un peuple blasé et déterminé à se faire entendre. La possibilité ensuite de vivre une retraite paisible dans son pays.
Et plus que tout la stabilité du Burkina Faso, l’’argument qu’avancent ses partisans et auquel la communauté internationale n’est pas indifférente, même si de Paris à Washington, c’est le discours sur la démocratie qui est affiché, par ricochet celui du respect de la clause de l’alternance. Compaoré sait qu’il n’y a pas beaucoup de peuples qui comme celui de la Syrie offre sa poitrine chaque vendredi aux balles de sa propre armée.
Il a lui aussi des gens qui le poussent à rester au pouvoir et il sait que ce sont plusieurs millions de Burkinabe qui sont restés à la maison, le jour de la marche, parce que ce qui les préoccupe, c’est le contenu de la marmite plutôt que les tiraillements pour le pouvoir. Face à la détermination de Compaoré à s’accrocher, il y a cependant celle de l’opposition à le dégager. La violence semble être le seul moyen de décantation hélas.
Ce ne sont donc pas les pages les plus glorieuses du Burkina qui s’écrivent en ce moment. Pas plus que celle d’une Afrique où plus d’un président en embuscade s’apprête à mettre du blanco sur la clause de l’alternance. Deux décennies après les vents de l’Est, et au milieu de tant d’aléas, une seule certitude émerge : ou l’Afrique s’est trompée de présidents, ou elle s’est trompée de constitutions.
Adam Thiam
Source: Lerepublicainmali