Complètement ruinée par la guerre, la Commune rurale de Dioungani dans le cercle de Koro, région de Mopti, vit les moments les plus pénibles de son histoire. Les populations, sans soutien et en manque de tout, se voient abandonnées à leur triste sort.
Située dans le cercle de Koro au nord-ouest de la région de Mopti et près de la frontière avec le Burkina Faso, la commune rurale de Dioungani a vécu cinq ans de conflit multiforme tout comme la plupart d’autres localités de ladite région et de celles du nord du pays. Aujourd’hui encore, la commune Dioungani fait face à des besoins cruciaux des services sociaux de base. Écoles, centres de santé, eau potable, etc., la commune manque absolument de tout.
Hamidou Guindo est un ancien travailleur de la mairie de Dioungani. Il n’avait jamais imaginé que les populations de sa commune pouvaient subir un tel sort un jour. « Ici, les gens ne demandaient jamais grand-chose. Ils travaillaient et gagnaient leur vie. Mais, les services sociaux de base sont de grande utilité pour eux. A mon avis, même une population qui travaille à la volonté, ne peut pas s’octroyer un centre de santé ou une école aussi facilement, surtout pendant des périodes de conflit. Ce sont des choses que l’État doit garantir, parce que c’est aussi un droit pour tous les citoyens partout où ils se trouvent. Mais sincèrement, il n’y a rien de tout cela dans la commune de Dioungani. L’État n’arrive même plus à nous protéger. Donc, nous n’avons pas la protection, et nous n’avons rien venant de l’État. Je n’avais jamais penser qu’un jour le Mali tomberait aussi bas », nous a-t-il expliqué.
Des accouchements sans assistance !
L’autre calvaire des populations, c’est que les femmes enceintes ne bénéficient plus ni de suivi, ni de consultations prénatales de qualité. Ces femmes continuent d’accoucher sans assistance médicale. Car, la seule zone proche est la commune de Madougou, qui manque aussi de premières nécessités en matière de soins médicaux. En plus, une distance de 30 km sépare les deux communes. Ce qui veut dire que les futures mères sont condamnées à se débrouiller autrement.
Habiba Ongoïba, est une bénévole qui a souvent prêté main forte aux femmes en travail. Aujourd’hui encore, elle le fait à cœur ouvert même si cela comporte des risques, reconnaît-elle. « Que faire ? On ne peut pas abandonner les gens comme ça. J’ai de l’expérience, je n’ai pas peur de m’approcher des femmes en travail, parce que j’y suis habituée et on me sollicite beaucoup. De par mon expérience, j’achète des comprimés et des seringues que j’utilise avant et après l’accouchement. C’est informel, mais les gens en ont besoin. Sans quoi, certaines femmes risquent d’être atteintes d’anémie avec les cas de perte de sang. Je m’occupe aussi des bébés pendant des heures après l’accouchement. Depuis ce vendredi (29 janvier 2021), je suis à Koro pour m’approvisionner en médicaments. Je ne peux pas non plus acheter dans les pharmacies parce que c’est trop cher pour la population. Je trouve autrement, mais ce sont des produits utilisables. Rassurez-vous, ce ne sont pas du tout des produits périmés. Aussi, nous utilisons beaucoup les tisanes traditionnelles pour joindre les deux bouts. Vraiment, les gens sont dans le besoin et il faut que l’État prenne ses responsabilités le plus vite possible »,nous a-t-elle confié.
Les populations dans la souffrance
Plus les jours passent, plus la vie devient dure pour ces populations. Composée de quarante-cinq villages pour environ soixante-dix hameaux avant le début de la crise, la commune rurale de Dioungani ne compte plus actuellement que quelques petits villages, dont le quotidien des populations se résume à la peur et à l’angoisse dues à l’insécurité.
Certes, il y a eu de l’accalmie dans les conflits armés, mais les séquelles de la violence sont toujours présentes. La commune, déjà dévastée par cette crise, n’a, pour l’heure, aucun service social pour sa population. Pas d’écoles, pas de dispensaire encore moins de sources en eau potable. Les réseaux téléphoniques attendent toujours d’être remis en marche après avoir été saccagés par les groupes armés terroristes. D’autre part, les foires hebdomadaires sont toujours fermées à cause de l’insécurité.
Il faut également rappeler que Dioungani, le chef lieu de la commune, a été complètement détruit il y a maintenant un an par des assaillants qui avaient fini par faire de la localité leur champ de coordination d’attaques visant à détruire le reste des villages et hameaux qui résistent encore aux différents assauts des terroristes lourdement armés. Cette destruction du chef lieu de la commune est survenue après le retrait des forces armées maliennes desdites localités pour des raisons encore inconnues. C’était sous le gouvernement Boubou Cissé du régime déchu. Actuellement, dans cette zone totalement coupée du reste du Mali, plus de soixante-cinq villages et hameaux ont été détruits par les assaillants, soit les 70 % des villages de la commune de Dioungani.
En attendant le retour de l’administration, c’est le vide total dans cette commune et les populations ne savent plus à quel saint se vouer.
Amadou Kodio
Source : Ziré