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Chronique du Mali : Dénonciation publique, on innove la lutte contre la corruption

En quoi le président de la cour suprême du Mali, Nouhoum Tapily est-il un « fonctionnaire des plus corrompus, des plus dangereux, un meurtrier reconnu de tous, un arnaqueur notoire, un raquetteur qui a racketté nos entreprises, un individu infâme qui foule au pied la vertu, l’honneur et la dignité » ? Les accusations du président du Conseil national du Patronat du Mali (CNPM) contre celui de l’institution judiciaire, la cour suprême, sont énormes, et le patron des patrons maliens semble avoir pris la pleine mesure et la gravité de ce qu’il avance comme accusation et dénonciation. En tant que Malien sachant ce que représente la corruption comme gangrène dévastatrice pour le développement du Mali, et comme poison pour les petites et moyennes entreprises, on ne peut que s’en réjouir, après cette sortie fracassante du président du patronat malien, en espérant sur la justesse de sa dénonciation. Celle-ci ne peut être que fondée sur la vérité, car dans le cas échéant, Mamadou Sinsi Coulibaly risquera gros, quand on mesure la portée d’une dénonciation calomnieuse ou celle d’une diffamation, des terrains sur lesquels Nouhoum Tapily essayera de jongler pour laver son honneur. C’est là que l’appel au soutien de Mamdou Sinsi Coulibaly trouve son sens : « vous avez l’obligation de m’aider dans cette tâche, si j’échoue, la corruption va continuer encore et il ne fera pas bon vivre dans ce pays ».


La cour suprême du Mali ou cour de cassation est le dernier degré de juridiction dont on attend qu’il soit le « redresseur des torts ».
Mais lorsque cette attente de tout un peuple, riche ou pauvre, sans distinction de race ou de religion, est sacrifiée sur l’autel de l’argent facile, celui de l’arnaque ou de la corruption, c’est la porte ouverte au troc de la justice contre l’enrichissement illicite et à toutes les aventures. C’est de cette déviation cynique que veut combattre le président du Conseil national du patronat du Mali (CNPM), Mamadou Sinsi Coulibaly. Il avait donné le ton lors d’une précédente sortie où il indiquait la présence de fonctionnaires indésirables du fait de la corruption, dans la fonction publique malienne. La guerre est donc ouverte contre la corruption, mais cela ne date pas d’aujourd’hui. Le Président IBK n’avait-il pas placé l’année 2014 sous le signe de la lutte contre la corruption ? Sans résultat palpable, au contraire, le phénomène a connu un embonpoint jamais égalé. L’office central de lutte contre l’enrichissement illicite (OCLEI) n’a pas fait mieux. Avant, les initiatives des Présidents Amadou Toumani Touré (BVG dont les rapports sont très souvent sans suites judiciaires satisfaisantes) et Alpha Oumar Konaré (CASCA) n’ont pas connu un meilleur sort après la Commission nationale de lutte contre les crimes de détournement de deniers publics et d’enrichissement illicite du président Moussa Traoré. Ces structures entre les mains du pouvoir sont surtout utilisées contre les opposants politiques, et servent à jouer la police des débats politiques, pour dissuader certains, persuader et mettre au pas d’autres, et surtout pour extorquer des fonds bien ou mal acquis qui ne serviront de toutes les façons pas la bonne cause du peuple malien, de l’intérêt général.
Avec l’échec de l’Etat à combattre la corruption, parce que ses tenants eux-mêmes corrompus, place à la dénonciation publique, une autre expérience malienne de lutte, une innovation du président du patronat. On verra bien si ça marche, et il n’y a pas de raison de croire que ça ne le sera pas. Cependant, on ne sait pas la suite de la stratégie de Coulibaly, si cette sortie sera suivie d’une étape judiciaire ou d’un coup de force pour pousser les présumés corrompus à la démission. En tout cas on peut dire qu’au Mali s’ouvre un chantier avec une stratégie innovante. On peut tout dire du Mali sauf qu’il n’a pas suffisamment de ressources pour se développer et devenir un pays émergent. Mais le Mali pêche par la qualité de ses ressources humaines qui trahissent les projets de développement. Il n’y a d’option pour nous que le soutien des faibles contre les forts. Notre situation de misère, l’état désespéré de notre pays est pour une large part imputable à la corruption. Il n’y a d’option de dignité que le soutien à la lutte contre la corruption et les corrompus tapis dans l’ombre.

B. Daou

Source: Le Républicain

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