Alors que la Constitution burkinabè en son article 37 l’interdit de briguer un nouveau mandat après 27 ans de règne sur le Faso, monsieur Compaoré s’est lancé dans la voie du forcing pour s’éterniser au pouvoir en cherchant à le modifier par voie référendaire. Lui qui avait jadis déconseillé une rallonge de mandat à Mamadou Tandja du Niger en son temps, réussira-t-il son coup au moment où les Burkinabé sont assoiffés du changement ?
Modifier l’article 37 de la Constitution du Burkina Faso afin d’octroyer l’éternité au pouvoir de monsieur Compaoré, c’était l’objet du conseil de ministres extraordinaire du mardi 21 octobre 2014. Le gouvernement burkinabè a donc décidé ce jour-là de soumettre à l’Assemblée nationale un projet de loi visant à modifier la Constitution, une démarche qui doit entraîner la convocation d’un référendum. Objectif : permettre à Blaise Compaoré de briguer un nouveau mandat en 2015.
On le voyait tourner autour du pot depuis longtemps, maintenant il s’est décidé. Il veut conserver son pouvoir. Ce pouvoir qu’il a acquis sur les flaques de sang de son «frère et ami» Thomas Sankara, il n’est pas prêt de lâcher. Il est prêt à user de tous les subterfuges pour se scotcher à son fauteuil sous prétexte qu’à part lui, plus personne ne peut construire le Burkina.
Est-ce que c’était en prévision de ça qu’il avait osé apporter la contradiction à l’homme le plus puissant de la planète, le président américain, Barack Obama ? Alors qu’Obama enseigne que l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais d’institutions fortes, monsieur Compaoré trouve qu’il n’y a pas d’institutions fortes sans hommes forts. Comme pour dire qu’il n’y aura pas d’institutions fortes au Faso sans lui. Décidément, on est prêt à tout quand il s’agit de conserver son fauteuil présidentiel.
Ironie du sort, c’est le «pompier en chef de l’Afrique» qui veut imposer à son peuple, ce pourquoi il va éteindre le feu chez les autres. Où est donc passé la lucidité de ce Blaise Compaoré qui disait de l’ex-président nigérien, Mamadou Tandja, «qu’il fonçait droit dans le mur» lorsque celui-ci voulait une rallonge de son mandat pour dit-il «terminer ses chantiers» ?
Aujourd’hui, c’est le maitre qui se fait prendre à son propre piège. Mais à analyser les deux situations, Tandja vaut même mieux que Compaoré.
Tandja voulait juste une rallonge de mandat pour terminer ses chantiers. Ha, qu’ils étaient énormes ces chantiers ! Mais Compaoré cherche les moyens de mourir au pouvoir, comme pour dire « sans moi, il n’y a pas de Burkina ». Il oublie certainement que le jour où il quittera ce monde, les Burkinabè vivront.
Un référendum autour de l’article 37, ce ne sera ni plus ni moins qu’un autre forcing du régime et de ses partisans visiblement insatiables après 27 ans de pouvoir, d’impunité et de non-redevabilité.
N’est-ce pas plus périlleux de permettre à Blaise de poursuivre son règne que de lui demander simplement de respecter, pour une fois, la Constitution ? Qui a intérêt aujourd’hui à la prolongation si ce n’est une minorité qui profite du pouvoir actuel et qui fait tout pour éviter, à tout prix, l’alternance ?
Ce qui est sûr, c’est que la balle est dans le camp de Blaise Compaoré. C’est à lui de décider s’il veut sortir par la petite ou par la grande porte de l’histoire politique de son pays. Car, si après toutes ces années, il n’a pas pu faire ce qu’il devait faire, ce n’est pas par un référendum qu’il peut faire émerger le Burkina. Bien au contraire, il risque de noyer tous les espoirs auxquels tous les Burkinabè ont le droit de tenir.
N’a-t-il pas en tête ce qui est arrivé à Mamadou Tandja lequel voulait juste une rallonge de mandat ? Echappera-t-il au sort de l’histoire ? Ha, si l’Afrique pouvait imiter les autres !
Abdoulaye Diakité