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Atteintes graves aux droits constitutionnels de manifester pacifiquement : Le pouvoir IBK se fascise

Qui l’aurait cru, le peuple malien d’après mars 1991, privé de ses droits fondamentaux, de ses libertés constitutionnelles, dont celle de manifester par une marche pacifique. C’est ce qui arrive à notre peuple du Mali, ce 2 juin 2018, avec une répression sauvage par une horde de policiers mal formés au maintien d’ordre, qui ont gazé et maté à sang les marcheurs sortis nombreux à l’appel de la Coalition pour l’Alternance et le Changement. Des chefs de partis, des honorables élus du peuple, des leaders d’associations et d’organisations de la société civile, ont été violentés par des policiers, qui ne suivent que les instructions qu’ils ont reçues de la hiérarchie et donc des hautes autorités du Mali.

Le gouverneur du district de Bamako qui s’était permis d’interdire la marche de ce 2 juin, prétextant de l’état d’urgence. Malgré les éclairages de la Commission nationale des droits de l’homme(CNDH), qui a rappelé que « la liberté de manifester pacifiquement sans troubler l’ordre public, y compris la marche, participe de l’exercice démocratique et constitue un droit fondamental des Droits de l’Homme ».

La CNDH a, en effet appelé le Gouvernement à l’observance de ce droit constitutionnel. Mais, visiblement, le gouvernement du Mali a fait la sourde oreille, en piétinant ces droits au moment même où la CNDH attire son attention sur leur importance. Quelle ironie du sort pour notre peuple, d’avoir à être gouverné par un pouvoir qui lui dénie ses droits fondamentaux de manifester, de protester, de s’exprimer par une marche pacifique, sans troubler l’ordre public ! Ce pouvoir, le régime du Président IBK se fascise sous nos yeux.

Le marathon de notre équipe

Pour notre équipe de reportage, il fallait arriver assez tôt sur la place de la liberté, le lieu de regroupement indiqué pour le départ de la marche. Ce lieu est un espace emblématique compris entre la mairie du district, le siège de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali, le Commissariat du premier arrondissement et le ministère de l’Education nationale. Il fallait vite y arriver, car pour nous, ce 2 juin sortait de l’ordinaire, avec l’interdiction de cette marche de la Coalition pour l’Alternance et le Changement, par le gouverneur du district de Bamako, et la décision de ce mouvement constitué de partis politiques et de la société civile, de la maintenir.

Une conversation s’animait au sein de notre équipe de journalistes du Républicain ; pour certains, c’est fou, le pouvoir va mater, sachant que c’est Soumeylou Boubeye Maïga, qui est aux commandes. Pour d’autres, ce n’est pas la première fois qu’une marche est interdite, c’est désormais une expérience au Mali, que les manifestants peuvent battre le pavé sans rien casser, comme on l’a vu avec la Plateforme Antè Abanna, qui a mobilisé des dizaines de milliers de personnes dans les rues de Bamako, passant par la même itinéraire, sans toucher à une seule ampoule. « Je sais que les manifestants ne détruiront rien, mais si les forces de sécurité en font dans la violence, je peux parier aussi qu’ils vont tout casser », fait remarquer un d’entre nous, qui ajoute qu’il en a été ainsi en 1991 sous le Général Moussa Traoré.

Les manifestants au début pacifiques, on fini par tout détruire lorsqu’ils ont été chargés à coups de gaz lacrymogène et de matraque par les forces de l’ordre, qu’ils ont fini par qualifier de « force de désordre ». Parmi les acteurs de la lutte démocratique en 1991, il y avait un certain Soumeylou Boubeye Maïga, qui n’avait pas froid aux yeux devant un certain Président Moussa Traoré. C’est Soumeylou qui se trouve aujourd’hui Premier ministre d’un certain Ibrahim Boubacar Kéita. De ce dernier, notre collègue ne connait aucune lutte pour l’accession du Mali à la démocratie en 1991. Mais, on sait que Premier ministre d’Alpha Oumar Konaré, il a fait mater, matraquer, gazer et emprisonner des leaders du Collectif des partis politiques de l’opposition (Coppo), entre 1994 et 1997.

Liberté confisquée

Sans être devins, nous savions que ce 2 juin accoucherait de quelque chose. Du siège du Républicain, nous mettons cap pour la place de la liberté. Nous passons devant la place CAN, puis la bibliothèque nationale à Hamdallaye ACI, avant de passer devant l’imprimerie Tomota, l’ancienne Imacy et le deuxième arrondissement à Bolibana, avant de traverser l’autoroute pour nous retrouver en face de la Bourse du Travail à Bamako-Coura, ce lieu était devenu noir de troupes, un déploiement impressionnant des forces de l’ordre était constatable en ce lieu symbolique et emblématique de la Bourse du Travail prévu pour accueillir les marcheurs. Notre équipe tente d’y entrer pour faire un état des lieux avant la partie.

Mais niet ! « Nous sommes des journalistes », cela ne suffit plus pour y accéder. Nous ne pouvons pas non plus emprunter l’autoroute pour aller vers la place de l’Indépendance, encore moins dans l’autre sens pour aller au centre Awa Kéita. La seule option pour nous, c’est d’avancer vers le Bar Mali. Ce que nous fîmes avant de tourner à gauche au niveau du feu pour aller vers le ministère de l’éducation et la place de la liberté. Nous nous rendons à l’évidence entre le ministère de l’éducation et le carrefour des jeunes. Pas de marcheurs, il n’y a que des policiers armés de boucliers et de lance gaz lacrymogène. Où sont les marcheurs ? On s’est souvenu d’un message aux marcheurs, qui donnait les lieux de regroupement par commune avant de se retrouver, contournant ainsi le dispositif sécuritaire. Mais toutes ces voies étaient devenues sans issues, interdites.

La place de la liberté était interdite d’accès pour toute personne qui ressemblait à un manifestant. Nous sommes nez à nez face à une horde de policiers de maintien d’ordre le long du trottoir de la mairie du district, faisant face à la CCIM. On est aux environs de 8h30 mn. Nous avons mis quelques bonnes secondes à reprendre nos esprits, avant de constater que les voies d’accès à la place de la liberté étaient bien surveillées et bouclées aux marcheurs, aussi bien du côté du PMU Mali que de la CCIM. Nous avons pris la direction de Malitelda. Interdit d’entrer au carrefour des jeunes, nous insistons, les forces déployées à la porte persistent, « ne restez pas ici, circulez et vite ! ».

Nous prenons en direction de Babemba et nous voici au carrefour de l’hippopotame, mais il nous est interdit de prendre la direction de la Bourse du Travail et de la place de l’Indépendance. Nous reprenons la route de Lafiabougou pour virer à gauche devant la poudrière (deuxième arrondissement), traversons Bolibana pour nous retrouver devant l’autoroute au niveau de la BIM ! Cette voie est également barrée. L’énervement commence à nous gagner, pourquoi nous empêche t-on de faire notre travail ? Pourquoi le pouvoir empêche-t-il les citoyens de manifester librement ? Qu’est-ce que le pouvoir se reproche-t-il ? C’est comme ça que les autorités créent les conditions pour grossir les rangs de l’opposition disons nous. Il nous confisque notre liberté.

Appel au dialogue du DRP Chaka Bran Sidibé

Nous passons par l’échangeur multiple et celui du CICB pour atteindre la BCEAO, parce que nous avons l’information que les leaders de la Coalition pour l’Alternance et le Changement vont se réunir au siège de l’ADP Maliba. Mais au niveau du Carrefour Moussa Trawélé, nous croisons des militants pris en chasse et gazés par les policiers. Nous trouvons refuge quelque part avant de tenter de regagner le siège de l’ADP Maliba, qui se trouve en face de l’ancienne primature, juste avant d’arriver à l’hôpital odontostomatologique. Nous sommes à 150 m quand une autre vague de boite de gaz lacrymogène nous contraint à rebrousser chemin, impossible de nous y rendre.

A la fin de la journée, le Directeur régional de la police de Bamako, Chaka Bran Sidibé fait état de 15 blessés transportés aux urgences, côté manifestants et 3 blessés parmi les éléments de la police, 10 personnes arrêtées qui ont été libérées par la suite. Siaka Bran Sidibé a appelé les parties à s’inscrire dans le cadre du dialogue.

Dans un communiqué de presse, le Cabinet du chef de file de l’opposition politique, indique que « Les services de sécurité du Premier ministre ont tiré à balles réelles sur des manifestants regroupés devant le siège de l’ADP-MALIBA. Une trentaine de manifestants blessés ont été admis au CHU Gabriel Touré ». Trois responsables de l’opposition ont été violemment frappés sur la tête avec des gourdins et des matraques, à la Bourse du travail dès les premières heures de la matinée. L’opposition condamne avec la dernière énergie la répression violente de la manifestation pacifique du 2 juin et exige la démission du Premier ministre, poursuit le communiqué. L’opposition appelle toutes les forces démocratiques à une nouvelle marche pour l’égal accès à l’ORTM, pour des élections transparentes et contre les violences policières le Vendredi 8 juin 2018.

Aguibou Sogodogo

Daou

Source: Le Républicain

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