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Après 100 jours de grève illimitée: les magistrats cèdent, mais ne renoncent pas

25 juillet- 1er novembre 2018, cela faisait 100 jours que des magistrats du Syndicat autonome de la magistrature (SAM) et du Syndicat libre de la magistrature (SYLIMA) observaient une grève illimitée qui a été suspendue, hier jeudi, à l’issue d’une Assemblée générale qui donne une bouffée d’air frais à la justice du pays. La reprise du travail est annoncée pour ce lundi 5 septembre, avec le maintien des revendications et en sus la démission du Président de la Cour suprême, M. TAPILY.

Les revendications qui sous-tendent cette grève des robes noires sont entre autres relatives à : la sécurisation des juridictions et des personnels judiciaires ; la relecture du Statut de la magistrature et la revalorisation de la grille salariale.
Pour ce qui est du premier point, le Gouvernement a soumis aux syndicats de magistrats un plan de sécurisation des personnels juridiques et des juridictions. Un plan auquel aucune suite n’a été donnée, selon les sources gouvernementales.
Mieux, le Gouvernement est passé à la vitesse en commençant à déployer par endroit le déploiement du dispositif de sécurisation des personnels judiciaires et des juridictions.
Au regard de l’accueil réservé à cette avancée par les magistrats grévistes, l’on est tenté de croire que ce point n’était qu’un épiphénomène, un dilatoire des grévistes qui surfent allègrement sur un sujet qui est dans l’ère du temps.
La principale revendication était (est) donc ailleurs : la revalorisation de la grille salariale, la relecture du Statut n’étant que rarement abordée par les magistrats grévistes eux-mêmes.
Ainsi, pour la satisfaction de ce point, c’est un véritable bras de fer qui a été engagé entre le Gouvernement et les magistrats grévistes, au grand dam des usagers de la justice privés de la jouissance de certains de leurs droits.
La tension était à son paroxysme quand le Premier ministre a décrété la réquisition de certains personnels judiciaires. Il n’en fallait pas plus pour que les magistrats grévistes qui n’étaient pas particulièrement dans de bonnes dispositions rendent la pièce. Une Assemblée générale extraordinaire est convoquée dès le lendemain 10 octobre 2018. L’ordre du jour a porté sur la réponse à apporter par la Magistrature, au décret en date du 09 octobre 2018 du Gouvernement de la République du Mali tendant à réquisitionner les magistrats grévistes. Elle a adopté une résolution en 7 points qui suivent :
‘’1-L’Assemblée Générale Extraordinaire invite les magistrats requis à refuser de se soumettre au décret illégal du Gouvernement de la République du Mali tendant à cette fin ;
2-Elle engage les Syndicats de Magistrats à saisir l’Organisation Internationale du Travail (OIT), face aux atteintes graves et intolérables par le Gouvernement de la République du Mali, à l’exercice de la liberté syndicale et au droit de grève (…)’’.
Face à l’exacerbation de la crise, le Gouvernement a pris l’initiative d’une désescalade. Dans cette optique, il y a eu la convocation du Conseil supérieur de la Magistrature au cours duquel le Président IBK s’est engagé à améliorer les conditions de vie et de travail des magistrats, tout en les invitant à la reprise du travail.
Ce Conseil a été suivi d’une rencontre entre le Garde des Sceaux et les deux syndicats de magistrats. À l’occasion, le ministre de la Justice leur a fait d’abord la restitution de la rencontre entre le Président de la République et les membres élus du Conseil Supérieur de la Magistrature. Il leur a fait comprendre que le Chef de l’État s’est engagé à améliorer les conditions de vie et de travail des magistrats.
En réponse, les syndicats ont exprimé au Garde des sceaux leur gratitude pour l’initiative de cette rencontre. Ils lui ont, d’entrée de jeu, fait comprendre que, comme le gouvernement, la magistrature tient à une sortie de crise et à l’apaisement du climat social.
Aussi, ‘’dans un souci d’écoute, de décrispation et d’apaisement du climat social, le Gouvernement du Mali a décidé de procéder au paiement des salaires du mois de septembre aux magistrats qui observent une grève illimitée depuis le 03 août 2018. Le paiement desdits salaires est une initiative de bonne volonté que le gouvernement a prise d’autorité, non sans fléchir sur le droit des citoyens d’avoir accès aux services publics, dont l’accès à la justice’’.
Outre ces initiatives unilatérales, il y a une intense activité de médiation de coulisse qui n’a pas été sans faire bouger les lignes au niveau des syndicats grévistes. La preuve de cette évolution positive des positions, c’est le recours de plus en plus fréquent à la notion de responsabilité des magistrats grévistes dans leurs différents discours.
La conjugaison des efforts a fini par porter fruit avec la suspension du mot d’ordre de grève, en tout cas partiellement. Et pour cause, les magistrats grévistes, qui s’engagent à reprendre le travail dès ce lundi 5 novembre, posent une exigence non négociable : la démission du Président de la Cour suprême du Mali, Nouhoun TAPILY, d’ici à la prochaine rentrée judiciaire. Faute de quoi, ils annoncent le boycott desdites assises.
Faut-il crier victoire ? Non, parce qu’il ne s’agit que d’une suspension de la grève et non d’une extinction de la revendication. En sus, il y a cette exigence dont la satisfaction ne sera pas sans créer un précédent fâcheux. Autant dire qu’il ne s’agit que d’un répit pour le Gouvernement et pour les usagers de la justice.

Par Bertin DAKOUO

Info-matin

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