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Algérie – Nouvelle constitution : l’après-Bouteflika sur les rails ?

CHRONIQUE. Alors que la presse est partagée à son endroit et que la diaspora et l’opposition la critiquent, cette révision constitutionnelle marque un tournant important des institutions algériennes.

Abdelaziz Bouteflika president algerie candidature

Abdelaziz Bouteflika a plus de chance que François Hollande. C’est à main levée, sans débat et par 499 voix contre 2 et 16 abstentions, qu’il a fait voter, le 7 février, par le Congrès algérien (Assemblée nationale et Sénat) la révision constitutionnelle promise depuis six ans. Députés et sénateurs sont majoritairement acquis au pouvoir. L’opposition, en particulier le Front des forces socialistes (FFS) de feu Aït Ahmed, décédé en décembre dernier, a boycotté le scrutin.

Cette révision ne manque pas de saveur. Non seulement parce qu’elle avait été promise dès avril 2011, dans la foulée des Printemps arabes en Tunisie et en Égypte, lorsque l’Algérie avait connu, elle aussi, ses premières manifestations. Celles-ci avaient tourné court. La guerre civile des années 90 et ses 120 000 morts étaient dans toutes les têtes et faisaient refuser de nouvelles violences à la grande majorité des Algériens. Depuis, Bouteflika tergiversait et avait remisé le changement constitutionnel au placard.

Un pas en avant, un pas en arrière

Mais le plus ironique est que cette nouvelle Constitution (article 51) ramène à 2008 : le chef de l’État ne pourra se représenter qu’une fois à la présidence. C’est le même Bouteflika, au pouvoir depuis 1999, qui avait décidé de modifier la loi constitutionnelle pour bénéficier d’un troisième puis d’un quatrième mandat en 2009 et 2014 ! Mais le chef de l’État aura 79 ans en mars prochain. Il est diminué physiquement depuis un AVC au printemps 2013. S’il ne peut plus se déplacer, il est toujours celui qui prend les grandes décisions du pays, ayant apparemment gardé ses facultés intellectuelles.

Tout n’est pas à jeter dans cette nouvelle Constitution. Côté positif : outre, les deux mandats présidentiels consécutifs, la nouvelle loi fondamentale consacre le statut de langue officielle au tamazight (le berbère). Reste à voir quelles en seront les conséquences concrètes, car l’arabe demeure LA langue officielle, un cran au-dessus. Cette revendication des Berbères (Kabyles et Chaouis des Aurès) avait été théoriquement acceptée en 2002, après les 120 morts des sanglantes manifestations de Kabylie.

De plus, dorénavant, le Premier ministre sera choisi parmi la majorité au Parlement. Ce n’était plus le cas depuis 2008. L’actuel Premier ministre Abdelmalek Sellal était un diplomate non affilié à un parti. Il s’est rallié au FLN, redevenu le parti présidentiel avec Bouteflika.

Son point noir : les binationaux (ils sont des dizaines de milliers) ne pourront plus postuler aux plus hauts postes de la fonction publique (ni à la présidence de la République, comme dans beaucoup de pays). La mesure fait grincer des dents en Algérie où l’on compte plusieurs députés franco-algériens, entre autres. Elle est vue, à tort ou à raison, comme le souci d’écarter les personnes les mieux formées.

Bouteflika partisan d’un pouvoir fortement présidentiel…

Cette Constitution est supposée donner plus de poids à l’opposition et consacrer l’alternance au pouvoir. C’est la raison qui a tant fait retarder sa modification de la part du chef de l’État. Comme Houari Boumediene, un de ses modèles en politique, Abdelaziz Bouteflika est partisan d’une grande présidentialisation du pouvoir. En 2008, lors de la modification constitutionnelle précédente, il avait voulu que le chef du gouvernement ne soit plus que Premier ministre. En clair, qu’il applique le programme présidentiel en tant que coordinateur des ministres. « Qu’est-ce que c’est que cette Constitution dont l’exécutif a deux têtes ? » protestait-il auprès de ses proches. À la présidence algérienne, certains conseillers de Bouteflika avouent qu’ils ont dû batailler dur pour obtenir qu’il accepte cette ouverture démocratique. Il lui fallait accepter de lâcher les rênes du pays qu’il tient à brides courtes.

… mais les temps ont changé depuis 2011

Bouteflika a vieilli. Il n’est pas en bonne santé. La chute des cours du pétrole et du gaz oblige à puiser dans des réserves financières auparavant confortables : de 179 milliards de dollars en décembre 2014 à 160 en mars 2015, et la dégringolade continue. Aussi de grands projets ont-ils été reportés, les importations (58 milliards de dollars en 2014) ont diminué, des subventions sont réduites (essence, électricité, eau, etc.). On envisage même de tailler dans les avantages sociaux, voire de recourir aux emprunts extérieurs. Une solution repoussée par Bouteflika qui ne veut pas renouer avec la situation du début de la décennie 90 lorsque l’Algérie, très endettée, avait dû passer sous les fourches caudines du FMI.

Reste la dernière bataille : celle de la succession d’Abdelaziz Bouteflika. Son mandat se termine au printemps 2019. Cette échéance semble bien lointaine et les différents clans se préparent à choisir un successeur (officiellement élu au suffrage universel) alors qu’aucun homme politique ne semble encore émerger. Est-ce possible que ce soit, cette fois, le temps de l’opposition ? Que de temps perdu pour l’Algérie et les Algériens qui rêvent d’un pays moderne et démocratique.

Source: le Point Afrique

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