La 10è édition du festival sur le Niger s’est ouverte hier, mercredi, par un colloque sur la renaissance africaine et ses enjeux et perspectives, en prélude à cette grande manifestation culturelle.
La cérémonie d’ouverture s’est déroulée au Centre culturel Kôrè de Sébougou, nouvellement rebaptisé du nom du célèbre anthropologue, ethnologue et traditionnaliste malien, Youssouf Tata Cissé, sous la présidence de Thierno Boubacar Cissé, le gouverneur de la Région de Ségou. C’était en présence notamment de Mamou Daffé, le directeur du festival, Siaka Dembélé, le président de l’Assemblée régionale, Ousmane Simaga le maire de Ségou. Certains intervenants comme Ousmane Sy, ancien ministre et ancien directeur de cabinet de la présidence, Abdoulaye Diop, le directeur du Bureau Afrique du Programme alimentaire mondial (PAM), Célestin Tangou de l’Université de Yaoundé et Yacouba Konaté, professeur de l’Université d’Abidjan et directeur du Marché africain des arts du spectacle d’Abidjan (MASA), étaient aussi présents.
Youssouf Tata Cissé qui donne son nom au centre culturel est né en 1935 à San et s’est éteint le 10 décembre 2013 à Paris. Il a consacré sa vie à la valorisation des traditions africaines, notamment celles du Mali. Eminent chercheur au Centre national de recherche scientifique (CNRS) de France, il faisait régulièrement des communications lors des éditions successives de ce colloque de Ségou.
Depuis sa création en 2005, ce colloque, initialement appelé Forum scientifique, rassemble des historiens, chercheurs, ethnologues, sociologues, philosophes, romanciers. Des intellectuels venus de nombre de pays d’Afrique et du reste du monde afin de débattre et faire des propositions concrètes et pratiques sur les problèmes abordés. Après neuf éditions prolifiques et pleines d’enseignements, le colloque de Ségou célèbre cette année sa 10è édition avec le thème : « Renaissance Africaine : enjeux et perspectives », dans une ambiance post-crise, entre le doute et l’espoir avec une forte volonté de réconciliation et de reconstruction du Mali, a souligné Mamou Daffé.
Après la série noire de crises que vient de connaître notre continent, notamment en Côte d’Ivoire, en Guinée, en Lybie et tout récemment au Mali et en République Centrafricaine, il y a lieu de se remettre en cause, d’engager une réflexion profonde sur notre devenir, de repartir sur de nouvelles bases plus solides et plus saines, a-t-il préconisé.
Le concept de Renaissance africaine apparait pour la première fois dans les slogans de l’Association universelle pour le progrès des noirs (UNIA), fondé par l’Africain-jamaïcain Marcus Garvey.
UNIA était un mouvement pour le retour à la terre-mère des descendants d’esclaves déportés aux Amériques qui après l’abolition de l’esclavage étaient confrontés aux Etats-Unis, à des violences perpétrées par le Ku-Klux-Klan. 50 ans après les indépendances des pays africains, ce besoin de renaissance demeure toujours car l’affranchissement du joug colonial n’a pas permis un réel décollage économique et social. Même l’Union africaine (UA) a choisi le thème « Panafricanisme et de Renaissance africaine » pour la célébration de son 50è anniversaire en 2013.
Pour le directeur du Festival sur le Niger, ce concept est d’actualité pour le Mali qui se relève difficilement de sa chute. Après 50 ans d’indépendance révolus, malgré leurs ressources, de nombreux pays d’Afrique peinent à trouver le chemin du progrès. Ils manquent de repères pour s’être détournés de leurs valeurs culturelles au profit de modèles exogènes de développement.
Cette Renaissance africaine, si nous la voulons totale, définitive, doit tenir compte de toutes les erreurs du passé pour se tourner résolument vers un développement endogène, en s’inspirant certes des modèles de développement existants, mais surtout en y intégrant des valeurs propres à nous. En somme, en opérant une rupture mentale avec les complexes du passé.
Envoyé spécial
Y. DOUMBIA