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Yamina Benguigui: «Donner du crédit au nouveau président de Madagascar»

Hery Rajaonarimampianina nouveau président Madagascar

Catherine Samba-Panza, ce jeudi 23 janvier, à Bangui et Hery Rajaonarimampianina, samedi à Antananarivo. Cette semaine, deux nouveaux présidents africains prêtent serment. A Madagascar, c’est Yamina Benguigui qui représentera la France. Avant son départ de Paris, la ministre française déléguée à la Francophonie a répondu aux questions de RFI. Elle lève un coin du voile sur la sourde bataille pour la succession d’Abdou Diouf à la tête de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).

Une femme à la tête de la Centrafrique. Tout le monde salue son élection. Mais Catherine Samba-Panza sera-t-elle de taille pour affronter les immenses défis de la transition ?

Yamina Benguigui : En tout cas, elle en a le coffre. C’est une femme exceptionnelle. Elle était donc déjà maire de Bangui, elle était femme, chef d’entreprise… D’abord, c’est un signe fort qu’elle soit femme. Elle a immédiatement su parler, à la fois aux chrétiens et aux musulmans. Il y a eu une liesse qui s’est levée dans Bangui.

Enfin, on sent tout de même les prémisses de quelque chose de lumineux qui est devant nous, puisque c’était vraiment apocalyptique. Son élection a fait qu’elle a transcendé, d’un seul coup, cette question de religion. Elle est apparue comme une maman, elle a parlé de « ses » enfants, aussi bien les musulmans que les chrétiens. Ça augure peut-être des choses très bonnes pour ce pays qui a beaucoup souffert.

Une bonne nouvelle ne venant jamais seule, pour la Centrafrique, près de 400 millions d’euros sont promis par l’Europe et quelque 500 soldats de l’Union européenne vont être envoyés à Bangui d’ici deux mois. Mais 500 hommes supplémentaires pour un pays grand comme la France et la Belgique réunies, est-ce que ce sera vraiment suffisant ?

Rien ne sera suffisant parce qu’il n’y a plus d’Etat. Il y a une population qui est en déshérence et puis il y a toujours des poches de l’ancienne Seleka. La France est évidemment présente, sous le mandat de l’ONU, et elle a déjà 1 600 hommes. Il y a la force africaine qui est de 4 000 hommes et qui va se monter, je crois, à 6 000 hommes. Une aide de 500 hommes plus cette nouvelle présidente de transition… rien n’est suffisant mais nous sommes sur la bonne voie.

A Madagascar, cinq ans après le putsch d’Andry Rajoelina, un nouveau président vient d’être élu : Hery Rajaonarimampianina. Mais est-ce que c’est vraiment la fin de la crise ? L’élection du président malgache marque, en tout cas, un tournant. Ce sera le début de la fin de la crise. Mais la crise est là ! Selon la Constitution malgache, le président choisit son Premier ministre sur proposition de l’Assemblée. Si celle-ci lui recommande Andry Rajoelina, est-ce qu’on ne risque pas de retomber dans les ornières du passé ?

Il a eu, je crois, 53 députés. Donc on ne peut pas l’écarter.

C’est-à-dire un peu plus d’un tiers…

Un peu plus d’un tiers et par conséquent ce n’est pas quelqu’un que l’on peut écarter. Ainsi, il fera partie, certainement, de ce gouvernement. Il faut donner du crédit à ce nouveau président. Madagascar a été un pays très isolé depuis 2009. C’est le plus grand pays francophone de l’océan Indien. Il accueille la première communauté française au monde. C’est 25 000 ou 26 000 Français. Madagascar doit réintégrer l’OIF. En tout cas j’appuierai, au nom de la France, la réintégration de Madagascar au Conseil permanent de la Francophonie en mars 2014.

Et vous le direz, ce vendredi, quand vous serez à Antananarivo ?

Oui, absolument.

Mais vous ne craignez pas que le nouveau président ne soit que le « faux nez » d’Andry Rajoelina ? Une sorte de Dimitri Medvedev pour Vladimir Poutine ?

C’est une bonne image ! Donnons-lui du crédit. Je crois qu’on a tous envie que ce pays se relève. Donnons-lui un peu de crédit à ce nouveau président.

La présidente de la Commission africaine, Madame Dlamini-Zuma, appelle la communauté internationale à l’aide pour Madagascar. Que répondez-vous ?

La France n’a jamais lâché Madagascar, même quand l’Union européenne s’est retirée. Par conséquent, nous avons tous envie que Madagascar s’en sorte.

La Francophonie, c’est à la fin de cette année que le dernier mandat d’Abdou Diouf va expirer. Qui pourrait lui succéder ?

Ça c’est le grand mystère parce qu’effectivement, il n’y a pas encore vraiment de candidats. Il y a des rumeurs mais pas encore de visibilité sur ces candidatures. Nous attendons. Il y a quelques propositions. Pour l’instant, le secrétaire général Abdou Diouf est encore là. Nous en avons discuté, il y a une semaine. Nous avons encore du temps.

Après l’Afrique du Nord et l’Afrique de l’Ouest avec Abdou Diouf, beaucoup disent que c’est le tour de l’Afrique centrale. Ils évoquent le nom de Pierre Buyoya, de Jean Ping, d’Henri Lopes, de quelques autres.

Oui, mais les candidats ne se sont pas encore déclarés. Je ne pourrai donc pas m’avancer sur ces noms-là. Il est vrai qu’Henri Lopez s’était déjà porté candidat.

Contre Abdou Diouf, d’ailleurs.

Contre Abdou Diouf, à l’époque où il était Premier ministre. C’est une belle candidature mais toutes ces candidatures feraient de bons dirigeants de l’OIF. Mais pour l’instant je ne peux pas m’exprimer ni vous donner mon choix.

Mais l’Afrique centrale peut-elle espérer un jour avoir un de ses hommes ou une de ses femmes à la tête de la Francophonie ?

Mais pourquoi pas ? Bien sûr ! J’espère qu’il y aura ce genre de candidats.

Est-ce qu’un jour l’Algérie rentrera dans la Francophonie ?

Ecoutez, c’est mon plus grand souhait. La langue française n’appartient pas à la France. C’est Kateb Yacine qui disait que la langue française est notre « butin de guerre » et la Francophonie aurait bien besoin de l’Algérie.

Par vos origines algériennes, n’êtes-vous pas, peut-être, plus à même que d’autres de casser la glace entre Alger et Paris ?

Disons que je sais être algérienne dans ces moments-là. Oui, je suis très proche de l’Algérie. Aujourd’hui je peux leur dire que la langue française est une langue qui se parle à hauteur d’homme. Aujourd’hui je peux effectivement faire passer des messages avec mon identité qui est celle d’une Franco-Algérienne.

rfi

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