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Violence dans les salles d’accouchement : ça se tasse

La violence dans les salles d’accouchement perpétrée sur les parturientes est un phénomène souvent dénoncé par de nombreuses personnes. Mais grâce aux dénonciations, au professionnalisme du personnel sanitaire (plus d’assistance dans les salles), en plus des sanctions, la pratique semble s’estomper sous nos cieux. Toute chose qui contribue à la promotion de la santé maternelle et néonatale.

 

« Nos sages-femmes sont désagréables comme si elles n’étaient pas des femmes. Ma cousine a accouché au Csom, son travail a duré plus de 2 jours. En plus de sa douleur, elle a fait face à la négligence de sa sage-femme », témoigne Assitan Ballo, une jeune étudiante résidant à Djalakorodji en commune I du district de Bamako.

Cette accusation est similaire au témoignage de Bintou Diarra qui à son tour affirme avoir été victime d’une accoucheuse aux comportements méprisant et dégradant. « Bien que c’était mon deuxième accouchement, la douleur était insupportable, je criais très fort. La sage-femme n’a pas apprécié, et sans ménagement elle m’a tenu des propos du genre : ‘une vieille comme toi, tu cries comme une gamine, vous nous fatiguez, vous prenez du plaisir à concevoir et au moment d’accoucher c’est pour crier comme si c’était nous les responsables de vos douleurs ».

Bintou Diarra est domiciliée à Lafiabougou en commune IV du district de Bamako et tout comme elle, le couple Dembélé garde une mauvaise impression de certains agents de santé. En effet, lorsque le couple raconte l’anecdote de la naissance de leur dernier né, le mari ne décolère pas. L’épouse à elle, revit la manière dont elle a été obligée d’endurer douleur et colibets au centre de santé. « Il a fallu que je menace les agents afin qu’ils s’occupent de ma femme. Lorsque nous sommes allés, sa sage-femme n’était pas de service et personne ne s’occupait de nous assis dans la salle d’attente », raconte M. Dembélé.

Pour sa part, l’épouse garde toujours en souvenir, sa présence parmi d’autres femmes à terme dans une grande salle, toutes tenaillées par la douleur et la peur au milieu du défilé d’un personnel soignant désinvolte. « Je souffrais mais j’avais surtout peur, j’avais à mes côtés une fille très jeune qui répétait sans cesse je vais mourir et j’entendais une aide-soignante parler de la déchirer, à ces mots mon cœur battait tellement fort, car j’imaginais le pire pour moi ».

D’autres femmes, heureusement, affirment au contraire avoir eu en face un personnel accueillant et bienveillant. Si pour certaines personnes le personnel soignant procède parfois à une discrimination fondée sur l’âge, le statut marital, social ou financier pour accueillir et accompagner les femmes en travail. Pour Mme Traoré Aminata Samaké, sage-femme dans l’hôpital du district de la IV, la mauvaise graine existe partout et ceci n’est ni une question de centre public ou privé mais juste une question comportementale propre à un individu.

Selon elle, il serait difficile à un personnel de santé d’agresser une parturiente dans une salle d’accouchement du fait qu’actuellement les accouchements sont effectués sous la surveillance de plusieurs assistants (stagiaires, sage-femme, infirmier/ères). « Vous savez, on ne peut pas dire que ce genre de pratique n’existe pas, moi je dirais plutôt qu’elle se faisait auparavant. Maintenant il serait bien difficile de violenter une patiente car aucune sage-femme n’opère plus sans assistance dans une salle d’accouchement donc difficile d’agresser la femme sur le point d’accoucher sans courir soi-même le risque de se faire remonter les bretelles », explique Mme Traoré Aminata Samaké, avant d’ajouter qu’aucun centre sanitaire ne cautionne de telle pratique et que si cela arrivait, des sanctions seront vite prises. « Du haut de ma trentaine de carrière, j’ai assisté une seule fois à ce genre de comportement. Un agent qui a eu à gifler la patiente et quand on a remonté les faits, il a été entendu au niveau de notre administration et il a été congédié car après enquête il s’est avéré que l’agent n’avait pas toutes ses facultés », déclare la sage-femme.

Aujourd’hui, des formations, des remises à niveau sont régulièrement prodiguées aux sages-femmes et autres personnels. Mais, le fait dissuasif, c’est l’audit après chaque décès. Si pour elle, le comportement d’une minorité du personnel soignant ne peut affecter la fréquentation des structures sanitaires, Mme Sané N’Diaye, spécialiste en communication et santé sexuelle et reproductrice, estime que la violence dans les salles d’accouchement peut impacter la fréquentation des services de santé chez les femmes en âge de procréer.

« De pareils comportements peuvent impacter une nouvelle grossesse chez les victimes. Il s’agit d’un comportement traditionnel chez nous car on pense que la femme doit souffrir pour donner naissance sauf que cela peut conduire les femmes à déserter les centres de santé, les inciter à accoucher à la maison. Et cela peut occasionner une souffrance fœtale chez l’enfant, voir son décès ». Au passage, elle recommande d’intensifier la sensibilisation chez les accoucheuses en vue d’éviter ces types de violences.

Pour Mme Sané N’Diaye, l’Etat doit continuer à s’investir dans le renforcement de capacités de tout le système sanitaire pour améliorer l’accueil et la prise en charge post- natal en plus d’une plus forte sensibilisation communautaire à travers les médias pour encourager les femmes à respecter le cahier de consultation prénatal et aller accoucher dans les centres de santé.

Les violences sont bannies par la loi au Mali si l’on se réfère à la constitution malienne qui garantit l’intégrité physique des personnes et la loi sur la santé de la reproduction adoptée en 2002, qui assure aux femmes et aux adolescentes des services de santé de qualité en matière de santé maternelle et reproductive.

Ladite loi dans son article 4 déclare : ‘Les populations ont le droit d’accéder à de services de santé qui permettent aux femmes de mener à bien la grossesse et l’accouchement, afin de préserver l’état de santé de la mère et du nouveau-né. »

Khadydiatou SANOGO, Ce reportage est publié avec le soutien de Journalistes pour les Droits Humains en partenariat avec FIT, WILDAF Mali et la Coalition des OSC pour la Planification Familiale

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