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VERITE, JUSTICE, RECONCILIATION : Audiences ouvertes !

13 victimes sont déjà passées à la barre. Elles ont en commun d’avoir traversé plusieurs atrocités lors des différentes crises du Mali de 1960 à nos jours. Les victimes ont raconté leur souffrance ce dimanche 8 décembre 2019 pendant la première audience de la CVJR ténue au CICB. Sous forme de panel, l’audience était dirigée par le président de la CVJ Ousmane Oumarou Sidibé et 6 commissaires dont 2 femmes.

 

La thématique de la première audience de la CVJR a porté sur les atteintes à la liberté. Il s’agit des arrestations, détentions, enlèvement, séquestrations etc.

La cérémonie d’ouverture s’est déroulée en présence de plusieurs personnalités du Mali comme les représentants de partis politiques, de la société civile, des mouvements signataires de l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger.

Le Mali a connu des moments tragiques dont des rébellions, des coups d’Etat, des manifestations de révoltes et des crises politiques. Ces multiples crises n’étaient pas sans répercussions sur le respect des droits de l’Homme. Dans l’impunité et la non reconnaissance des personnes affectées qui ont survécu à ces malheurs, revivent ces douleurs dans leur cœur et esprit.

C’est dans cette perspective que la CVJR leur a donné la parole à travers Ces audiences. Cependant cette vision reste dans un cadre de réconciliation et d’apaisement des cœurs. « Bien entendu, il ne s’agit pas ici d’audiences judiciaires. A la différence des tribunaux, ici seules les victimes seront entendues, la CVJR leur offrant un lieu digne et sécurisé où elles pourront raconter les souffrances vécues », présume M. Ousmane Oumarou Sidibé, président de la CVJR.

« Si nous avons décidé de consacrer cette première audience aux atteintes au droit à la liberté, c’est en raison de leurs effets néfastes sur l’être humain, de leur récurrence dans notre pays, et surtout d’une tendance inquiétante à leur banalisation dans l’opinion publique ».

Selon la CVJR, l’histoire du Mali est marquée par des époques d’arrestation et de détentions des personnes qui ont seulement voulu exprimer leur opinion à travers des réunions, des marches pacifiques ou d’autres types de manifestations non violentes. Cela nous renvoie aux manifestations de 1980 de l’Union nationale des élèves et étudiants du Mali, Uneem témoigné lors des audiences par la onzième victime.

« Notre génération a souffert pour le Mali et jusqu’à présent, on ne se bat que pour notre pays. Jusqu’à ce jour nous ne savons pas où a été enterré le secrétaire général de l’Uneem Abdoul Karim Camara dit Cabral. Personnellement, j’ai pardonné les douleurs subies, mais qu’en est-il des autres de notre génération ? Notre requête aujourd’hui est que l’ex-président Moussa Traoré révèle avant sa mort la tombe de Cabral. C’est également pour que sa famille achève enfin son deuil », déclare la victime, ancien membre de l’Uneem.

13 victimes, 13 vies brisées

A Léré, au moment d’une attaque en janvier 2012, une infirmière a été enlevée par les groupes terroristes. Lors des tirs, elle recevait une balle à la main. « J’étais avec ma domestique. On avait sous la main une femme enceinte qui était sur le point d’accoucher. En voulant nous échapper nous avons été toutes blessées. J’étais amenée par ces bandits armés pour aller soigner des malades. Avant le soin de ces patients j’ai d’abord voulu faire le pansement de ma main blésée, mais ils me l’ont refusé. Je soignais les autres en saignant. Lorsqu’ils m’ont relâchée, je devais traverser des milliers de kilomètres pour retourner à Léré et sans oublier que j’avais faim et soif. Il y’a toujours des bons parmi les mauvais. L’un d’entre eux m’a offert de la viande et un bidon de 10 litres d’eau que j’ai abandonnés en cours de route sous la fatigue », témoignait en larme l’infirmière. C’était l’un des cas hyper sensibles que la salle de l’audience n’a pas pu retenir ses larmes.

« Un témoignage très poignant! Il sera transcrit dans notre rapport. Nous sommes tous émus face à votre courage de femme », appuyait le président de la CVJR.

Les violences ne causent pas uniquement des maux physiques mais aussi mentaux. La victime numéro a été torturée lors de son enlèvement à Kidal en 2012. Il a tellement été stressé qu’il a été déclaré fou. « J’étais rejeté par ma famille car elle pensait que j’étais mentalement dérangé. Seule mon épouse me soutenait. Pour leur montrer que j’étais normal, j’ai passé par plusieurs stratégies. Pour me remettre de tout ça, je ne restais jamais seul, j’essayais de faire rire les autres et en tirer du plaisir », disait-il.

La CVJR a pris en compte toutes ces séries de témoignages. « Nous faisons confiance à votre récit et partageons réellement votre douleur. Nous garderons l’espoir pour un Mali de paix », était l’avis du président de la CVJR.

Toutes les victimes n’avaient qu’un message principal : restauration de la paix au Mali. Selon le président, les Maliens ne sont pas habitués à toutes ces violences. « Si on ne se prend pas les mains, l’ennemi prendra nos mains. Acceptons-nous et acceptons d’aller à la réconciliation. Le Mali n’est plus un pays en voie de développement, mais en voie de disparitions », insistaient-elles. Les victimes sont heureuses de l’initiative de La CVJR et lui ont fait part de leurs attentes.

La CVJR a clôturé cette audience par une remise d’attestations de reconnaissance aux différentes victimes pour avoir accordé leurs témoignages et leur a garanti une paix intérieure et une réparation des dégâts causés dans leur vie. « Ces cris de cœur doivent avoir toute l’attention et la pleine solidarité du pays tout entier », affirme-t-elle.

Fatoumata Kané

Mali Tribune

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