La crise au nord du pays n’affecte pas que les hommes. La végétation et les animaux en souffrent aussi énormément. C’est le cas des éléphants du Gourma qui sont menacés aujourd’hui de disparition.
Depuis un certain temps, ces pachydermes sont abattus régulièrement par des braconniers pour leur ivoire. Un habitué des brousses du Gourma assure avoir compté plus de 40 carcasses d’éléphants tués par balles et dépourvus de leurs défenses. Certaines sources indiquent que le nombre d’éléphants abattus dépasse la centaine.
Les braconniers profitent de la situation d’insécurité dans la zone pour décimer ces éléphants pourtant protégés par un projet. Dans le cadre de ce projet, l’Etat, avec l’appui de l’ONG Wild Fondation, avait beaucoup investi pour aménager des points d’eau sur le passage des éléphants. Le projet avait aussi embauché des agents locaux pour suivre les éléphants et signaler d’éventuelles actions de braconnage. La crise empêche aujourd’hui tous ces agents de faire leur travail.
Le braconnage des éléphants est une activité qui peut rapporter gros. La tentation est donc forte et peut s’exercer si les animaux ne bénéficient pas d’une protection des services de l’Etat. Selon nos sources, il y a plus de 10 ans, le kg d’ivoire coûtait 300 000 Fcfa. Un seul éléphant peut fournir plus 30 kg d’ivoire. On peut imaginer la fortune qu’empochent les braconniers en abattant un seul animal.
Le service des Eaux et Forêts confirme les dangers auxquels les éléphants du Gourma sont confrontés. Les pachydermes ne bénéficient plus de la protection des agents des Eaux et Forêts parce que la zone Banzena où séjournent les bêtes, échappe au contrôle du service, explique notre interlocuteur. Pour lui, il est inadmissible que ces animaux qui sont un patrimoine mondial soient abattus de la sorte.
L’insécurité qui prévaut dans la zone empêche les agents des Eaux et Forêts, mal équipés, de s’y aventurer. Le service a donc sollicité le concours de la MINUSMA pour organiser des patrouilles conjointes afin de limiter les dégâts. Quand la mission onusienne a donné son accord, des incidents armés ont éclaté dans la zone de Boni, mettant à l’eau le projet de patrouilles.
Selon nos renseignements, les éléphants qui ont pu échapper au carnage se trouveraient actuellement du côté du Burkina Faso où ils migrent habituellement même en temps normal. Selon leurs habitudes, ils feront leur retour dans le Gourma vers la fin de l’hivernage. Il y a donc lieu de prendre des mesures énergiques pour les protéger quand ils seront de retour dans notre pays. Si l’Etat marque sa présence dans la zone, les populations peuvent aider les forestiers à combattre le braconnage. Les braconniers sont, en effet, connus des habitants du Gourma hésitent aujourd’hui à les dénoncer par crainte de représailles.
Les éléphants du Gourma, dans un passé récent, attiraient beaucoup de touristes nationaux et étrangers. La zone est privée aujourd’hui de cette manne financière qui profitait beaucoup aux populations locales et aux hôteliers.
M. SAYAH
AMAP-Tombouctou
source : L’ Essor