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Tiébilé Dramé, Président du Parena : « Le Mali est aujourd’hui un pays en danger »

Dans un entretien accordé à notre confrère RFI, Tiébilé Dramé, Président du Parena et leader de l’Opposition républicaine et démocratique, est revenu sur l’immobilisme qui caractérise la gouvernance actuelle du Mali. Selon l’ex ministre des affaires étrangères du Mali, « un an après la signature de l’accord d’Alger, il n’y a malheureusement ni paix, ni réconciliation nationale ». Tiébilé Dramé, l’un des initiateurs de la marche qui a mobilisé des milliers de personnes, le weekend passé dans les rues de Bamako, afin de dénoncer la mauvaise gouvernance, a déclaré à RFI que « le Mali est aujourd’hui un pays fermé, coincé, un pays en danger. Vous avez donc les jihadistes d’un côté. Mais vous avez de l’autre côté, les mouvements signataires de l’accord d’Alger qui étaient au commencement du processus antagonique. Ils se sont réconciliés depuis et qui se liguent pour exiger du gouvernement une application stricte des termes de l’accord l’Alger ».

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RFI : Un an après la signature de l’accord de paix, toujours beaucoup d’attente, de déception. Qu’est-ce qui n’est pas fait, qui aurait dû être fait ?

Tiébilé Dramé : Un an après la signature de l’accord d’Alger, il n’y a malheureusement ni paix, ni réconciliation nationale. La région de Kidal échappe toujours au contrôle de l’Etat. A dix kilomètres de Tombouctou, il n’y a plus d’Etat. Entre le 21 et le 24 mai, pour ne prendre que cet exemple, il y a eu cinq attaques ou incidents armés dans les secteurs de Tombouctou et de Goundam.  Les réflexes et les replis identitaires sont en train de prendre le dessus dans plusieurs régions du Mali. Nous n’arrivons pas à stabiliser notre situation intérieure, à mettre fin aux attaques. Et ce sentiment que les choses ne bougent pas, qu’on n’avance pas, le processus de paix est dans l’impasse. Et comme conséquence, nous exportons l’instabilité chez nos voisins. Les attaques contre Le Cappuccino à Ouagadougou en janvier, l’attaque contre Grand-Bassam sont de toute évidence parties du Mali et perpétrées par des Maliens. Vous voyez, il y a comme une sorte de métastase de la situation au Mali.

Justement comment expliquez-vous cette situation ? C’est quoi, c’est l’immobilisme ?

Le Mali est aujourd’hui un pays fermé, coincé, un pays en danger. Vous avez donc  les jihadistes d’un côté. Mais vous avez de l’autre côté, les mouvements signataires de l’accord d’Alger qui étaient au commencement du processus antagonique. Ils se sont réconciliés depuis et qui se liguent pour exiger du gouvernement une application stricte des termes de l’accord l’Alger. Et dans cette exigence, ils ont le soutien de la communauté internationale qui ne comprend pas qu’on signe un accord et qu’on ne l’applique pas. Vous avez également le gouvernement du Mali, un faible leadership qui donne l’impression d’être débordé, dépassé. Je crois qu’il y a une urgence à réagir face à cela, à relancer le processus de paix, à sortir de cet immobilisme politique qui grippe le processus de résolution de la crise du Nord.

Pourquoi demandez-vous un audit urgent de la gestion des crédits alloués à la Défense ?

C’est important parce que nous baignons dans une ambiance d’atteinte à la morale publique, de faute de gouvernance qui érode la crédibilité du pays. Il y a des informations relatives à l’acquisition de matériel roulant, de véhicules P4 dont l’unité s’est élevée à plus de 50 millions de francs CFA. Si on ne fait pas d’ores et déjà l’audit avec les informations qui circulent sur les surfacturations, alors là on pourrait se retrouver malheureusement dans une situation où le pays fait des sacrifices pour doter les forces de moyens importants, et que ces moyens n’arrivent pas à destination, à cause de l’utilisation qui est faite.

Samedi 21 mai, plusieurs dizaines de milliers de manifestants ont dit leur ras-le-bol. Quelle est la portée de cette manifestation ?

C’est une manifestation pour le Mali pour dire au président de la République et au gouvernement d’entendre l’angoisse des Maliens, les inquiétudes et les souffrances des femmes et des jeunes du Mali. Nous avons dit que ce qui caractérise la gouvernance du Mali à côté des atteintes à la morale publique, à côté de la mauvaise gouvernance, à côté de la mauvaise gestion du dossier du Nord, ce qui caractérise nos dirigeants, c’est l’autisme. Voyez la situation sécuritaire comment elle se dégrade. Voyez le processus de paix, comment il est dans l’impasse. Vous voyez l’immobilisme politique dans lequel nous nous trouvons. Si le président de la République ne reste pas un peu plus à Bamako pour gérer ses affaires, la situation du pays risque de s’aggraver. Et c’est pourquoi nous voulons qu’ils sortent de cet autisme-là et qu’ils se rendent compte que le pays va mal et que le peuple a des aspirations.

De nombreux manifestants réclamaient le retour de l’ancien président, Amadou Toumani Touré, qui vit en exil à Dakar. Pensez-vous qu’il est temps que soient réunies les conditions du retour d’ATT ?

Tout le monde parle de réconciliation nationale. Il est évident que cette réconciliation nationale ne peut pas se faire sans un homme qui a dirigé le pays pendant dix ans. Il me semble important que le président Amadou Toumani Touré revienne au pays.

Alors vous appelez les gouvernants à se ressaisir, sans attendre. Qu‘est-ce que vous proposez ?

Nous appelons le président de la République en particulier, c’est lui qui a été élu, à convoquer les forces vives du pays en conférence, en concertation, en assises nationales. On a l’impression qu’il n’y a pas de plan, qu’il n’y a pas de stratégie, il n’y a pas de vision pour mettre en œuvre l’accord qui a été conclu il y a un an. Il n’y a pas eu d’appropriation nationale de l’accord. L’Assemblée nationale n’a pas encore eu connaissance, n’a pas eu l’occasion de débattre de l’accord. Alors là, il y a risque qu’à chaque étape de la mise en œuvre de l’accord, il y ait des résistances, des réticences, des incompréhensions. C’est tout cela qu’on nous voulons éviter. L’accord l’Alger prévoit une conférence d’entente nationale. Elle aurait dû être convoquée le 21 juin 2015, c’est-à-dire au lendemain de la signature pour permettre au pays de s’imprégner de l’accord et de convenir ensemble de ce qui a lieu de faire pour sa mise en œuvre. Donc ça devient aujourd’hui une urgence.

Source : RFI

 

Source: Lerepublicainmali

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